5. La cohérence urbanisme – déplacements

notion abstraite ou concrète ? quelle utilité ?

C’est très dur de trouver une transversalité là dessus, de faire travailler les gens ensemble. Sur le SCOT, on voit très bien les limites de ce travail là, par secteur. Là, on fait une réunion croisée avec l’attraction résidentielle, avec R. Chancrin. On ne se connaissait pas. On se rencontre avec la plaine du Forez. Une fois qu’on se rend compte qu’on est à peu près d’accord sur les grandes idées, après il faut le mettre vraiment en place sur le terrain, mais c’est terminé, nous, on ne peut plus travailler tout seuls. Donc il faut travailler avec l’attractivité résidentielle, avec le développement économique, la solidarité territoriale… Mais j’ai bien vu, sur le transport, à un moment, qu’il n’y avait plus rien à dire – c’est vite dit… Mais c’est tellement lié avec le reste !

Disons que cette notion qui est dans la loi force les acteurs à se rencontrer entre eux, et derrière il y a des projets qui devraient en sortir. Mais s’il n’y avait pas la loi, sur des territoires aussi larges, ce serait dur… ou ça avancerait beaucoup moins vite. Là, on a un cadre législatif. Il y a une prise de conscience. Je crois que les élus l’ont tous compris. Dans le SCOT, on va voir, on en est aux premières inter-commissions… Après, ça va être des batailles à l’intérieur de chaque territoire, où il y aura encore quelqu’un qui voudra construire… Au niveau du SCOT, la Commission dérogatoire a certainement soulevé quelques problèmes… Je sais que la Ville va bientôt y passer son PLU. Cet exemple là, c’est Claude Marder, mais j’ai suivi un peu aussi. Les réflexions du PLU, je crois qu’on a travaillé intelligemment, c’est que le SCOT est pris en compte. Autant qu’on ait les bonnes alertes. Là, c’était le bon niveau pour dire attention.

Peut-être que sur les transports, il fasse confiance aux collectivités, et que les collectivités prennent ça en main.

De mon point de vue, l’Etat sera de moins en moins pesant. Il continue encore aujourd’hui à dire ce qu’il faut faire, mais comme il n’a plus les moyens… Mais il ne vous aura pas échappé qu’il y a des échéances en 2007, peut-être ces débats-là vont ressurgir !

Il y a au moins un échelon de trop dans le mille-feuille administratif français. Quand je dis ça et que mes collègues du Conseil général se sentent visés, ils me disent que je ne me rends pas compte du rôle du Conseil général pour toute la ruralité. Je n’ai pas l’habitude de critiquer ce que je ne connais. Donc s’ils ont raison, ils ont raison ! Mais en tous les cas, du côté du pouvoir central, il faudrait clarifier les choses…

Sur la cohérence, quand je vois, dans le SCOT, qu’on gomme un peu certains effets contraignants de la loi SRU et qu’on ne remet pas en cause certaines choses, on brouille un peu les pistes. Mais ça, c’est la cohérence au niveau politique… ça n’est pas mon niveau, ça. Mais ce n’est pas une raison, parce que moi je me considère comme un élu de la base, un élu de terrain, pour ne pas dire ce qui de notre point de vue est raisonnable, et essayer de convaincre nos concitoyens : Agenda 21, développement durable… une fois que les gens partageront vraiment ça, on ne pourra pas leur imposer autre chose.

Je me donne peut-être une importance que je n’ai pas : je n’ai qu’un mandat. Je ne suis maire, qu’uniquement… Je ne souhaite pas une élection à la Communauté d’agglomération ! La situation actuelle me va bien, je ne vois pas pourquoi on la changerait. Je ne vois pas pourquoi on viendrait créer une collectivité qui viendrait s’ajouter au mille-feuille, sous prétexte que des élus gèrent des budgets pareils, qui ont tant de responsabilités, ils n’ont pas de légitimité… Eh bien si, ils ont une légitimité, celle de leurs concitoyens !

Moi je trouve bien qu’une intercommunalité, en tout cas celle de l’agglomération stéphanoise, soit une intercommunalité de projet. Ca, c’est ce qui permet de booster un territoire. Ca surpasse les questions individuelles et politiques. On est là pour bâtir des projets qu’aucun de nous, au fond, même pas la ville-centre, ne pourrait bâtir ! Ce coup de fouet qu’on entend souvent dans les assemblées comme celles-ci, en quelque sorte reprocher au Président de tout accaparer sur Saint-Etienne… d’une certaine manière, c’est logique ! C’est logique que beaucoup de choses aillent à une ville-centre… On ne peut pas construire une agglomération si elle n’a pas un cœur, un point fort ! Tout le monde sait que la ville de Saint-Etienne était en mauvaise posture… Ceux qui se rassemblent aujourd’hui pour donner un coup de fouet à la ville de Saint-Etienne, aujourd’hui, à l’étape où on en est, ça me semble logique. Mais il faut qu’ils voient qu’après, c’est tout le territoire… Quand la ville-centre est suffisamment organisée, forte, avec ses universités, ses hôpitaux, ses administrations, le secteur périurbain, lui, peut jouer son rôle, accueillir des agriculteurs, des touristes… Parce qu’il y a une mise en commun du territoire.

Il n’y a pas de fumée sans feu. Si la loi le redit, c’est que c’est difficile à faire. L’Etat reconnaît qu’il n’y arrive pas, et que donc au moins, on peut l’inscrire dans la loi. Ca donne l’impression qu’il faut que l’Etat en fasse son cheval de bataille pour que les gens en prennent conscience. Sauf que je pense que la conscience, elle est prise. Contrairement à ce que peut penser l’Etat ou ses services, ça n’est pas une question de savoir si les gens comprennent ce qui se passe, de l’utilité, de l’importance… Les gens sont très conscients. Mais la question, opérationnellement, sur le terrain, au quotidien, c’est très dur ! Mais heureusement que l’Etat ne donne pas le mode d’emploi de la cohérence ! Moi, ça me paraît assez normal. La loi peut trouver des modes opératoires, essayer de mettre en place des instruments qui sont incitatifs, comme elle l’a fait pour l’intercommunalité. Il faut que l’Etat soit facilitateur, pas prescripteur. L’enjeu, l’ancrage, il est bien territorial. Mais il faut se demander comment l’Etat peut se donner les moyens de faire confiance aux collectivités.

Le discours ambiant, c’est de dire que les Conseils généraux s’occupent des voitures, génèrent des routes, ce qui a un impact sur l’urbanisme, et qu’une fois que les routes sont faites, les autres collectivités subissent le fait que les gens vont habiter loin, alors qu’elles n’ont pas demandé ces routes que le Conseil général a faites. Je crois qu’en grande partie, il y a une façon de retourner le propos qui est un peu facile. Le Conseil général ne s’occupe pas des gens qui habitent à un endroit, il s’occupe des gens qui passent. Son rôle c’est ça. La route, ça a été un facteur de développement national très important, on vit encore sur cette lancée là, et on n’a pas encore inventé autre chose. Le fait de pouvoir bouger, de gagner du temps, de faire des économies sur les temps de parcours… Mais ce n’est pas en restreignant les capacités d’écoulement qu’on résoudra ces questions… Il y a aussi le souhait des gens qui veulent avoir leur pavillon… Il faut regarder les dynamiques de fond qui génèrent ça. La vérité se joue sans doute sur les deux niveaux. Mais agir seulement sur le robinet, ça ne résout pas les dynamiques de fond. Qu’on dise au Conseil général que les routes génèrent de l’étalement urbain… Non, les routes permettent l’étalement urbain, ce n’est pas la force initiale qui leur donne envie d’aller habiter ailleurs, ni la force initiale qui donne aux entreprises des envies de gagner des coûts de transport par tous les moyens. Après, le Conseil général peut dire qu’il va être vertueux, et dire qu’il va obliger les gens à arrêter de vouloir vivre à la campagne… Mais s’il dit ça, c’est qu’il veut faire mourir son espace : les gens n’auront plus envie d’y habiter, et les entreprises ne voudront plus y rester. Et le Conseil général n’est pas chargé de suicider son propre territoire ! Je crois donc que c’est comme ça qu’il faut poser la question… Après, ça n’empêche pas de réfléchir ensemble aux capacités offertes par la route de développer le territoire. Mais la question essentielle, sur ce sujet, c’est qu’au niveau communal, c’est dur de résister à un permis de construire… C’est vraiment ça qui se joue au quotidien.

Et puis on dit que l’étalement urbain, ça n’est pas eau. Moi ce qui me gêne le plus dans l’étalement urbain… On consomme de l’espace naturel. Il y en a qu’il faut conserver, et interdire à tout le monde. Mais tous ne sont pas comme ça. On a une marge sur laquelle on peut consommer de l’espace, sans que ça ne remette en cause la pérennité générale. Mais la question c’est de savoir quels espaces on crée. Pour moi la vraie question angoissante sur l’étalement urbain est là. Quelle est la ville qu’on crée ? Et malheureusement on ne l’a pas posé comme ça. A force d’accuser la route, on ne pose pas la vraie question. Nous on le voit bien dans les communes. Le nombre d’endroits où l’on se bat, en disant qu’il ne faut pas faire trop d’impasses, de ne pas créer des « camps d’indiens retranchés », où on mettra des miradors à l’entrée… ça socialement, on sait qu’on n’est pas en train de créer de la société, on est en train de créer de l’anti-société. C’est ça la principale question : le type d’espace qu’on crée.

On a maintenant toute une série de formes urbaines qui peuvent devenir accessibles, y compris sur le plan financier, à une majorité de gens. A Bonson, c’est l’exemple que j’ai en tête, on est capable d’offrir du collectif ou du semi-collectif de qualité à proximité de la gare et des écoles, tout en étant à 10 – 15 minutes de la campagne. On a maintenant suffisamment d’exemples concrets pour voir qu’on peut faire, donc il faut faire. Quand je vois les maisons Borloo à 100 000 €, coincées entre un périphérique et une voie ferrée, si on les fait là… Il y a une exigence de qualité de vie, il y a une exigence de services, il y a une exigence de commerces… Je crois qu’on ne peut plus entraîner les gens malgré eux vers cette fuite à l’extérieur ! Sinon, je pense qu’on est coupables… Donc, tout ça, c’est du concret, c’est très concret ! Et les coûts… mettre aux normes tous les réseaux, toutes les voiries de toutes les communes qui ont ouvert à l’urbanisation à outrance depuis 20 ans, est-ce que les gens ont seulement conscience de ça ? Est-ce que les gens qui habitent Saint-Christo ou Marcenod se rendent comptent qu’ils ont de la chance d’habiter à la campagne, mais que dans 4 ou 5 ans, la station de lagunage sera obsolète ? On est dans une situation pas encore critique, mais à problème ! Et on n’incite pas les gens à être raisonnables… Mais tout le monde n’en a pas encore conscience. Donc je suis convaincu que la puissance publique doit avoir un rôle moteur.

Par rapport à la cohérence, moi ce que j’attendais des PDU sur cette notion était peu importante, mais c’était très lié à ce qu’on travaille depuis deux – trois ans, sur l’accessibilité. Derrière la notion de déplacements, il manque pour moi une carte qui spatialise es niveaux de service que l’on doit avoir en terme de mobilité, qu’on cartographie tout ça, et qu’on donne à la population cette information, pour leur dire à l’avance le niveau de desserte dans les dix ans qui viennent. C’est connu de tout le monde, ça accompagne les PLU, les documents officiels… Et on fait une interface transports – urbanisme comme ça, sur quelque chose qui est connu, simple… un vrai outil qui est une bonne information pour la population. J’attendais qu’on puisse accoucher ça après le PDU, qui serve aussi d’évaluation. Mais je n’ai pas vu grand monde s’y intéresser.

La deuxième approche, qui à mon avis doit être vraiment celle vers laquelle on doit arriver, qui est quelque chose de très concret, très pragmatique. Quitte d’ailleurs à se détacher des grands discours, et des principes affichés, et à travailler sur des échelles assez réduites, avec du concret.

Pour éviter ce hiatus, le choix qu’on a fait au niveau de la cellule, c’est d’être assez actifs sur les porters à connaissances et les avis de l’Etat, en se disant « pourquoi n’alimenterait-on pas les avis de l’Etat sur un volet spécifique déplacements ? », en ayant une entrée très concrète, et en faisant une analyse au niveau de la commune pour les PDU, avec des propositions les plus pratiques et les plus illustrées possibles. Ca, c’était l’envie qu’on avait de développer ça. Après, comment fait-on pratiquement ? Ca nous a conduit à mettre en place une approche de type gestion de SIG, des choses un peu en cascade, qui nous ont conduit à nous dire que cet outil est intéressant. On a passé pas mal de mois à mettre en place l’outil et aujourd’hui, on s’astreint, pour l’ensemble des réflexions, du type PLU, PLH, PDU, Schémas de déplacements, d’avoir un discours sur un volet déplacements assez détaillé, à la fois au niveau de l’association de l’Etat, et puis sur les avis. C’est un peu récent, aujourd’hui, j’ai du mal à voir un véritable retour des partenaires et un recul en ce qui nous concerne, mais il y avait bien ce souci d’être concrets, parce que les principes généraux, on n’ira pas loin.

Il n’y a pas de réponse universelle. On a essayé de raisonner en termes de typologies de communes, de groupements de communes. C’est difficile d’avoir des grilles qui permettent d’avoir une approche qui soit cohérente sur une typologie de commune donnée. On n’aboutira pas à des recettes universelles, qu’on pourra appliquer…

Concrètement, l’impact du PDU dans les révisions de PLU… aujourd’hui, on ne le sent pas encore véritablement.

Sur l’évaluation du PDU, on pourra mettre en place des approches qui permettront d’en sortir une évaluation, quand bien même on n’ait pas d’objectifs suffisamment nombreux, précis, quantifiés au départ. Là je ne me fais pas trop de soucis. Mais c’est vrai qu’intellectuellement, ce serait beaucoup plus simple d’avoir des objectifs précis.

Dans le travail technique, la cohérence chez nous, on en revient à l’organisation de notre service : c’est un travail d’échanges communs. Si on veut de la cohérence, il faut de la connaissance, c’est-à-dire être capable de faire circuler l’information, que tout le monde se comprenne et soit au même niveau. Ca renvoie donc aux questions de référentiels, dont on parlait tout à l’heure. C’est aussi une question de méthode, repositionner les acteurs au bon endroit, avoir les outils de construction d’action et de projet qui soient très clairs, qu’on ne mélange pas, comme on le voit dans certains dossiers, l’action avec l’objectif, l’enjeu avec l’objectif. Donc c’est toute une culture, une méthodologie de projet à avoir, qui permet d’avoir une cohérence. Alors, bien sûr, il y a plein d’écueils ! Tout le monde a un avis sur la circulation routière : c’est redoutable ! A nous d’avoir les outils, à chaque fois, pour reconstruire à partir d’une méthode, mais où les élus ont leur mot à dire. Si on devient trop rationnels, on ne fait plus qu’adapter le système, et n’avoir plus de capacité d’innovation. Donc il faut rester à l’écoute des désirs d’élus ! Donc la cohérence, c’est par l’organisationnel qu’on peut l’avoir. Derrière, il y a des conséquences sur le territoire : où on met les logements prévus au PLH, par exemple ?

Il y a de la place pour tout le monde. Ce n’est pas au PDU de traiter la question de la cohérence. Il y a un chapitre, très bien, mais c’est au SCOT de statuer là-dessus. Imposera-t-il beaucoup de choses aux communes ? Je ne le pense pas.

Donc si on n’a pas les moyens d’appliquer la demande de cohérence entre urbanisme et transports, elle n’existera jamais, pas plus à Saint-Etienne qu’ailleurs. Quand elle existe ailleurs, c’est plutôt je pense, par la force des choses. Ici, on n’a pas la compétence urbanisme. Ca, c’est le SCOT. Il ne doit pas aller réinventer un système de transport, ça a déjà été fait par le PDU, même si des territoires restent à traiter. Mais il faut sortir des mots, et donner des outils très concrets. Donner la priorité à la densification autour des gares, et ne pas pointer le négatif. Ca ne marche pas. Aujourd’hui, les critères des commissions de dérogation du SCOT, c’est l’aspect paysager, et l’atteinte à l’économie agricole. Il n’y a pas de critères liés aux déplacements ! Donc on peut bien invoquer l’esprit de la cohérence…

La semaine dernière, j’ai rencontré les gens de l’EPA, ils avaient l’air de découvrir le PDU. Il y a donc bien un problème de relais chez nous. Ils tiquaient sur la priorisation accordée au TCSP sud-est, parce que je pense que le « G7 » avait du leur dire que le nord-est est prioritaire. OK techniquement, s’il y a choix politique. Mais il faut habiller ce projet. Pas seulement pour l’affichage, mais il faut un vrai projet d’urbanisme sur le Soleil. Sinon on ne peut pas justifier ce tram pour le technopôle !

L’emboîtement des documents du haut vers le bas, n’existe sans doute que dans l’esprit de ceux qui ont rédigé la loi… Et encore ! Si on avait fait le PDU sans faire derrière les PDS, où en serait-on aujourd’hui ? Sinon, la seule solution, c’est d’imposer les choses. Mais l’Etat est trop déliquescent aujourd’hui. Et les élus, la classe politique, sont ruraux et pas urbains, en France. Pour le moment, le SCOT Sud Loire ne crée pas un projet, il effectue des dérogations. Que l’on débatte d’un projet ! Même si derrière on nous demande de réviser le PDU, pas de problème… Mais s’il n’y a pas de débat…