2.2.1.2— La recherche des gloses

La recherche des gloses va nous conduire maintenant à traiter, en complément de l’étude du champ générique de la folie et de la déraison, des mots appartenant à diverses catégories grammaticales à l'intérieur d'expressions complexes parlant également de la folie et de la déraison. Comme nous avons pu le dire plus haut 567 , cette démarche permet de palier certaines difficultés méthodologiques relatives à l'analyse onomasiologique à qui on reproche de ne tenir compte que de mots faisant partie d'une même partie du discours, quand le locuteur en utilise plusieurs pour s'exprimer.

D'un point de vue logique la démarche est double. On a premièrement regroupé les mots constitutifs des gloses suivant une progression temporelle 568 applicable à tout événement en prise sur une personne atteinte de folie ou de déraison : la cause de cet événement, son emprise sur le sujet, et les conséquences de cet événement. On retrouve ainsi le découpage en trois expressions complexes renvoyant aux trois sémèmes définis plus hauts à partir des trois axes généraux des causes, des sujets et des conséquences, mais aussi à une inscription dans l'anormalité par la combinaison des axes de la nature et du lieu. Chacun des trois éléments des gloses de la folie sont bivalents et construits sous la forme d'une base nominale associée à une expansion, les trois éléments étant articulés en général par le verbe de l’axe S2 des sujets. Ainsi d'un point de vue sémantique, l’équation sémique des gloses se présente comme la combinaison de six sèmes choisis à partir des trois grands axes des causes, des sujets, et des conséquences et des axes secondaires de la nature et du lieu.


Axe S1 des causes

Axe S2 du sujet

Axe S3 des conséquences
[nature] [lieu] [nature] [lieu] [nature] [lieu]
         

On a deuxièmement fait se succéder les gloses suivant un plan paradigmatique 569 regroupant les mots constitutifs sur les différents axes généraux et secondaires. Les gloses ont par ailleurs été regroupées suivant des lieux uniques qu’on a pu déterminer sur l’axe des sujets. Ainsi il y a huit sèmes de ce type pour Mélite qui sont les lieux où se concentrent la folie et la déraison dans cinquante-huit gloses dont six variantes : [âme] (6 gloses), [cervelle] (3 gloses + 2 var.), [cœur] (2 gloses), [esprit] (4 gloses + 1 var.), [je] (20 gloses + 1 var.), [jugement] (1 glose), [raison] (6 gloses + 2 var.), [sens (les ou le)] (10 gloses).

Ce sont ces lieux de la folie et de la déraison qu’il nous importait de noter, n’ayant pas la place ici pour une description approfondie des gloses elles-mêmes. Il aurait en effet fallu retrouver tous les sèmes des gloses tels que nous les avons définis pour le champ générique « Changements humains hors norme » si nous avions choisis d’élargir aux différentes parties du discours l’étude menée sur les noms afin d’avoir une vision complète de la folie et de la déraison. Il s’agit d’une piste de recherche particulière que nous indiquons, notre but étant ici d’avoir ici une vision d’ensemble sur quatre pièces de Corneille.

Notes
567.

Voir dans cette partie, le chapitre « 1.2.2— La démarche onomasiologique ».

568.

Les structures lexicales avec des possibilités de combinaison des éléments sont ainsi définies par des rapports « in praesentia » (ou syntagmatique) qui définissent les champs associatifs selon Jacqueline Picoche. Picoche, 1977, p. 95.

569.

Les structures lexicales avec des possibilités de substitution des éléments sont ainsi définies par des rapports « in absentia » (ou paradigmatique) qui définissent les champs génériques selon Jacqueline Picoche. Picoche, 1977, p. 95.