1.3. 1981, l’avènement d’une nouvelle politique

En 1981, l’avènement d’une nouvelle politique laisse espérer un changement profond dans le système éducatif. Les mêmes constats que ceux du plan Langevin-Wallon sont faits : l’école doit s’adapter aux évolutions aussi bien sociales qu’économiques et technologiques. On va vers un désir de démocratisation de l’enseignement, d’égalisation des chances et de réduction de l’échec scolaire. Diverses mesures voient le jour, notamment grâce à une augmentation des moyens financiers. La loi d’orientation sur l’éducation est promulguée le 10 juillet 1989. Nous commentons ce texte dans ce qu’il a d’innovant quant à l’aide aux élèves en difficulté.

La loi d’orientation s’oriente vers une « égalisation des élèves » et non plus une « égalisation des chances », « l’enseignement s’adapte à leur diversité et les cycles assurentune continuité éducative » 24 . Si la loi se fixe de mener 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat 25 , son objectif premier est d’apporter à tous une formation de qualité. Les missions de l’école sont centrées sur les élèves et sur les rythmes d’apprentissage. Les trois cycles aujourd’hui en place voient le jour, la scolarité élémentaire n’est plus scindée en huit classes, mais en trois cycles que l’élève peut effectuer en deux, trois ou quatre années. Les enseignants situent leurs élèves par rapport à ce qu’ils savent et non plus par rapport à une norme à atteindre à une date déterminée. Quand il s’agit de prendre une décision concernant un élève, tous les enseignants l’ayant et l’ayant eu en charge sont consultés. Une continuité éducative est assurée. Les conseils des maîtres voient le jour : les enseignants ne travaillent plus de façon isolée mais s’intègrent au sein d’une communauté éducative.

Le projet d’école est créé. Il représente « une dynamique pour l’établissement ». Ce projet consigne toutes les articulations entre les activités pratiquées dans l’école. Les parents d’élèves sont consultés lors de sa préparation. La lecture en est au cœur, celle-ci est évaluée à l’école primaire et des actions de soutien sont mises en place.

La loi d’orientation de 1989, puis celle de 2005 26 , s’accordent à dire que l’école doit préparer de futurs jeunes citoyens à assumer une vie responsable.

Les parents d’élèves sont intégrés aux décisions concernant l’établissement et deviennent membres de la communauté éducative. La circulaire du 9 avril 1990 : « Mise en place et organisation des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté » va dans le même sens que la loi de 1989 en ce qui concerne l’intégration des parents au projet éducatif de l’enfant.

La loi d’orientation de 2005 complète celle de 1989 sur de nombreux points. La « résignation » tend à disparaître avec la mise en place du « programme personnalisé de réussite éducative » dès l’apparition des difficultés d’apprentissage. Ce programme engage les acteurs et les usagers de l’école : l’élève, ses parents, le directeur de l’école et les enseignants. L’implication des parents dans la scolarité de leur enfant est renforcée. Elle prévoit « qu’au terme de chaque année scolaire […] après avoir recueilli l’avis des parents »les professeurs se prononcent sur la suite envisagée de la scolarité de chaque élève.

Pour l’instant, la promulgation de la loi d’orientation de 2005 27 est trop récente pour évaluer l’efficacité de son application. Cependant, elle permet, avec ses différents dispositifs (que nous présentons plus loin), de porter un autre regard sur l’élève et la scolarité est considéré comme un parcours à construire et non établi d’avance. Avec le « socle commun de connaissances », on souhaite ôter tout jugement dans le regard porté sur l’élève.

Cet aperçu historique révèle que, au cours des six dernières décennies, la notion d’échec scolaire évolue et est étroitement liée au degré d’exigences scolaires et sociales ainsi qu’aux demandes du marché de l’emploi. La loi d’orientation de 2005 met en place une action en faveur de l’élève en tant qu’individu. Notons que l’Ecole italienne est précurseur en matière de prise en compte des élèves à besoins spécifiques en intégrant l’éducation spéciale à l’instruction publique dès 1923 par la réforme Gentile 28 . Une politique d’intégration – plutôt que d’exclusion – est une réalité observable et efficace. On ne parle pas de discrimination – même positive – puisque les profils différents d’élèves font partie d’un paysage scolaire quotidien et unique.

Notes
24.

LURCAT L. 1998. La destruction de l’école élémentaire et ses penseurs, Paris, François-Xavier de Guibert, p. 174.

25.

En avril 2002, le gouvernement en place reconnaît l’utopie de ce point. La réalité des bacheliers atteint actuellement 65% d’une classe d’âge.

26.

Loi 2005.380 du 23 avril 2005 : « Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école ».

27.

Loi 2005.380 du 23 avril 2005. Ibid.

28.

DE ANNA L. 1996. « L’intégration scolaire des enfants handicapés en Italie », Handicaps et inadaptations – Les cahiers du CTNERHI, 72, pp 43-57.