L’aide à dominante pédagogique s’adresse plutôt à des élèves de cycle deux. Leur rapport aux apprentissages est actif et ils présentent des déficits dans l’acquisition des compétences fondamentales en maîtrise de la langue, des concepts logico-mathématiques, en développement de l’imaginaire. Ces élèves ne manifestent normalement pas de troubles associés tel qu’un dysfonctionnement au niveau de la constitution psychique de la personnalité, pas d’envahissement affectif dépendant. Ils ont besoin d’activités d’étayage qui vont soit les aider dans l’acquisition des compétences de base, soit leur apporter les éléments de méthodologie qui leur manquent. Il s’agit de proposer des activités qui influent sur le fonctionnement mental et facilitent l’entrée dans les apprentissages.
Les enseignants décrivent ainsi les enfants qui bénéficient de l’aide à dominante pédagogique : ils sont plutôt lents en classe et donnent l’impression de ne pas écouter, ce qui nécessite une attention plus importante de la part des enseignants dans les répétitions et dans les rappels à l’ordre. Ils paraissent absents, perdus dans leurs pensées. Ils perturbent parfois la classe de par leur attitude inattentive. Les résultats scolaires, sans être catastrophiques, ne sont pas très brillants.
« On s’attache principalement au langage oral et écrit et aux mathématiques. L’aide pédagogique vise, en effet, à combler des lacunes, à faciliter chez l’élève la construction d’outils à tous les niveaux de l’école élémentaire. Au niveau du cycle deux, à la jonction GS/CP 116 , l’aide pédagogique contribue également à bien fixer les préalables aux acquisitions scolaires, en insistant sur le développement des compétences transversales : discipliner le regard, anticiper, mémoriser, fixer l’attention et l’écoute. Telle est bien sa fonction d’adaptation et de prévention » 117 .
L’aide à dominante pédagogique prend effectivement forme une fois que des activités d’investigation ont eu lieu. Il s’agit de mettre en place pour l’élève un projet d’aide individualisée. Ce projet tient compte des avis des différents partenaires : le maître généraliste, le maître E, les parents, l’élève, le psychologue scolaire. Les activités mises en place diffèrent de celles proposées en classe, l’aide ne se fonde pas seulement sur ce qui n’a pas été compris en classe. Il y a souvent confusion chez les différents partenaires : l’aide à dominante pédagogique est assimilée au soutien scolaire – d’où la possibilité de conflits déjà évoquée –. Les activités pédagogiques proposées sont de type « médiationnel », le maître E est un médiateur entre l’enfant en difficulté et les apprentissages. Le travail de médiation est essentiellement relationnel et laisse une large part à l’oralisation. L’enfant en difficulté, pour prendre conscience aussi bien de ses lacunes que de ses capacités cognitives, explicite ses représentations mentales de la tâche à accomplir ainsi que le choix de ses stratégies. Il comprend ainsi ce qui ne fonctionne pas et modifie sa démarche. Cette oralisation permet au maître E de relever des indices quant aux difficultés éprouvées par l’élève et y apporter une remédiation. Ces deux activités sont presque simultanées. Ainsi, si ses maîtres et ses pairs accordent le droit de parole et surtout écoutent l’enfant en difficulté, les regards sur celui-ci changent et c’est seulement par ce changement que l’élève est en mesure de progresser.
Le fait de quitter sa classe pour « aller travailler dans une autre est essentiel pour que l’enfant progresse. Il va faire des acquisitions qui vont lui permettre de prendre conscience de ses progrès, en suscitant l’expérience de la réussite » 118 . De retour dans sa classe d’origine, il se sent plus fort, prouve qu’il est en mesure « de faire comme les autres ». L’élève réussit avec le maître spécialisé là où le maître généraliste est impuissant. A ce dernier de ne pas se sentir atteint dans ses compétences professionnelles. Si l’on considère que le travail effectué auprès de l’élève en difficulté n’est pas un travail d’équipe, alors une situation de jalousie peut s’installer, mettant en péril l’action d’aide.
Les tâches du maître E sont multiples : actions sur les apprentissages scolaires, mise en place de relations de confiance favorisant, entre autre, le désir d’apprendre, aide au changement du regard de tous. Ce dernier point peut donner lieu à des frictions dues aux différences de point de vue et à la rigidité des personnes. Cet élément rejoint notre hypothèse de recherche. L’aide du maître E, pour être pleinement efficace, s’accompagne d’une collaboration étroite entre les acteurs et les usagers du système éducatif. Cette collaboration souvent difficile, nous amène à nous interroger sur ce qui fait obstacle à de bonnes relations au service de l’élève aidé.
Grande section de maternelle/ cours préparatoire.
GILLIG J.-M. 1998. L’aide aux enfants en difficulté à l’école, Paris, Dunod, p. 99.
Circulaire 90.082 : « Mise en place et organisation des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté ».