5.2. L’hypothèse de recherche

Notre pratique nous amène à énoncer une hypothèse portant sur les raisons de l’inefficacité des aides à dominante pédagogique à l’école. Appartenant à deux groupes sociaux différents, les maîtres généralistes et les maîtres E exercent deux métiers propres au sein de la même profession. De par l’identité professionnelle de chaque groupe social d’appartenance, des représentations professionnelles spécifiques se sont faites jour et divergent quant au regard porté sur les notions de difficulté d’apprentissage et d’échec scolaire. Ces conceptions singulières entraînent des vues différentes sur les modalités d’intervention auprès de l’enfant en difficulté d’apprentissage, engendrant parfois une impossibilité de travail commun. Les conflits ont une répercussion directe sur l’enfant aidé : à cause de leurs différends d’ordre identitaire, les uns et les autres amènent (involontairement) l’enfant d’une position de difficulté passagère à une situation d’échec scolaire durable.

On observe deux situations paradoxales: doublement investi, l’enfant est l’objet d’une « surenchère » pédagogique : le maître généraliste lui présente les apprentissages de sa classe d’âge, bien qu’il n’ait pas les capacités psychiques de les acquérir, alors que le maître E le fait travailler sur des compétences transversales et méthodologiques chez lui défaillantes mais nécessaires à une scolarité « normale ». A court terme, les performances médiocres de l’élève risquent petit à petit de le mettre en situation d’abandon. Abandon pédagogique : l’enfant ne va plus être pris en considération par le maître généraliste qui se sent désinvesti de sa mission éducative, le maître E n’aborde pas les compétences de sa classe d’âge. Abandon social : l’enfant est placé au cœur de querelles identitaires et professionnelles.