a) Extraits d’entretiens cliniques

Extrait n°1 d’entretien (enregistré avec l’accord du patient ) :

Moi

- Comment ça va en ce moment à l’hôpital, comment vous vous sentez ?

Olivier

- Ben pas très très bien, ben tendu forcément, car il y a des tensions entre tous les patients… Euh, j’attends plus grand-chose de la vie tout simplement. J’suis en train de, j’suis en train de… j’suis en train de crever à p’tits feux.

Moi

- Pourquoi vous êtes en train de crever à…, pourquoi avez-vous cette sensation que vous êtes en train de crever à petits feux ?

Olivier

- Parce que c’est la réalité.

Moi

- Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?

Olivier

- Mais euh, mon activité on va dire, par rapport à avant. Euh, tous les réflexes que j’ai plus, la capacité de mouvement, euh l’élocution, la puissance respiratoire, euh, voilà quoi.

Moi

- Ça vous mettez sur le compte des médicaments ou sur le compte de quoi ?

Olivier

- Sur le compte, pas spécialement des médicaments non… Sur le compte de la vieillesse, du fait que j’ai trop fumé dans ma vie aussi très certainement, des maladies aussi, j’sais pas c’que j’ai, c’est des mots, ben la vieillesse tout simplement.

Moi

- Vous êtes encore jeune, qu’est-ce que vous appelez la vieillesse ?

Olivier

- Ben euh l’âge ça n’a rien à voir. La vieillesse c’est la vieillesse corporelle. De toute façon vous y passerez aussi, vous penserez à moi quand vous serez dans cet état là quoi, à moins que quelqu’un vous supprime quand vous êtes en pleine forme.

Moi

- Donc là c’est parce que vous vous sentez diminué que vous vous sentez vieillir ?

Olivier

- Ouais parce que c’est une réalité. J’ai pas euh, j’ai plus eux plus euh… ben j’arrive encore à parler. J’ai plus eu tout ce qui est… par exemple vous toussez donc vous n’êtes pas en en bonne santé. Et bien non c’est le contraire, quand on tousse, c’est qu’on a encore les réflexes pour évacuer suffisamment tout ce qu’il y a dans les poumons. Donc c’est des réflexes que j’ai quasiment plus. Pour le reste, c’est au niveau de la perte de motricité ouais, des trucs que je pouvais faire avant et que j’arrive plus à faire.

Moi

- Les réflexes c’est ça ?

Olivier

- Ouais, les réflexes. Oui mais c’est même plus de l’ordre des réflexes, mais de l’ordre de la tétanie On pense pouvoir faire quelque chose, on aimerait bien bouger mais le corps ne peut plus.

Moi

- Et vous avez l’impression que ça passe vite, que les gens autour de vous vont plus vite autour de vous ? Comment vous avez l’impression que…

Olivier

- Ben j’ai l’impression de subir complètement. C’est pas un état idéal. J’regardais la télévision. Un film montrait des euh, des camps d’extermination, et à un moment donné y’a l’image d’un homme nu, c’était un squelette, mais il avait encore la force de marcher. Et j’ai vraiment peur de finir comme ça. Donc euh, ouais, j’suis comme tout le monde, j’ai peur des autres et j’fais c’que je peux pour me « défendre » entre guillemets.

Moi

- Vous avez l’impression que les autres sont dans un mouvement plus vite que ce que vous vivez ?

Olivier

- Ben oui forcément. Comme tout le monde oui, comme quelqu’un qui est dans le coma.

Moi

- Ça vous fatigue mais ça vous panique un peu ?

Olivier

- Ben oui forcément. Et oui parce que quand vous pouvez pas vous défendre des gens qui vous tournent autour. Ouais Je sais pertinemment que j’ai pas… ben si j’peux me défendre. J’peux peut-être faire un p’tit peu mal à la personne en face.

Moi

- Donc vous vivez sur un mode passif ?

Olivier

- J’ai pas l’choix d’faire autrement.

Moi

- On a un p’tit peu parlé de votre famille. Est-ce que vous avez eu des épisodes de deuil dans votre famille ?

Olivier

- Ouais. Comme tout le monde. Quand j’avais huit ans, il y a eu mon oncle, qui est mort en Bretagne, mon grand père, qui est mort y’a cinq ans. J’l’imagine comme moi, bloqué sur le lit, à plus avoir la force de parler. Bon ben ça y est il est mort, on l’amène sur un brancard.

Moi

- Ben il avait pas l’même âge que vous non ?

Olivier

- Ben j’vous répète encore une fois, l’âge ça n’a rien à voir.

Moi

- C’est la condition physique, c’est un peu quelque chose quand même ?

Olivier

- Non.

Moi

- Comment vous les avez vécus ? C’étaient des personnes particulièrement proches de vous qui sont mortes ?

Olivier

- Des connaissances ouais des connaissances. Des visages ouais tiens lui j’l’ai vu là et puis après il est mort. Mais l’affection c’est un prétexte. L’amour de l’autre, égoïstement ça vous renvoie à vos propres peurs. Moi j’en suis plus à d’l’affection, j’suis plutôt du côté misanthrope. Les gens autour c’est des ennemis potentiels, ils me fatiguent, j’en ai marre d’eux. C’est une fatigue potentielle.

Moi

- Potentiellement ils vont vous tuer ?

Olivier

- Oui même sans m’toucher.

Moi

- Mais comment ?

Olivier

- C’que vous êtes en train de faire, quand vous parlez, ça vous fatigue, quand je vous réponds, ça me fatigue. Tout simplement, par épuisement. Et puis à un moment donné dans la journée. Y a plein de choses qui sont fatigantes. Etre assis c’est fatigant, être debout, c’est fatigant. Quand on n’a plus la force.

Moi

- Est-ce qu’il y a des moments où vous ne vous sentez pas fatigué ?

Olivier

- Non j’suis toujours fatigué.

Moi

- Est-ce que vous avez toujours été comme ça ?

Olivier

- Non j’ai pas toujours été comme ça. A 20 ans, quand j’faisais plein de sport… Mais c’était pas pareil. J’étais capable de faire quatre heures de tennis d’affilées en plein soleil, chose que je suis incapable de faire aujourd’hui. Faudra bien que ça s’arrête un jour. J’pense que tout le monde est fatigué, et qu’on a un potentiel d’énergie qui s’épuise. C’qui fait peur, j’pense pas c’est la mort en elle-même, mais c’est la douleur en elle-même.

Moi

- Que vous ressentez de la mort des autres ou de vous-mêmes ?

Olivier

- Ben oui, on est fondamentalement égoïste. Là je souffre là.

Moi

- Là vous souffrez, mais vous n’êtes pas mort.

Olivier

- J’ai mal là, j’ai mal derrière, j’ai mal aux poumons, j’ai mal au ventre.

Moi

- Et pour vous c’est lié à la mort ? Parce que la souffrance ça dit quand même que vous êtes en vie, que y’a quelque chose qui s’passe.

Olivier

- J’suis en train de me décomposer de l’intérieur, ça fait mal, mais je peux rien y faire. Oui ça fait mal de voir que les muscles ne répondent plus, que… que…, qu’on est paralysé, que ça fait mal aussi de sentir qu’on gêne les autres forcément, qu’on se pense gênant.

Moi

- Pourquoi gêner ? Vous pensez à qui en parlant des autres ?

Olivier

- C’est un terme générique, ça vous inclut dedans, aussi. Tous les discours qu’on entend, sur les gens, on raconte tous n’importe quoi. Des mots c’est que des mots, c’est juste pour se défendre, parce qu’on a peur. Regardez j’suis encore là, j’existe comme une petite bête… C’est une campagne d’affichage qui est dans Marseille et qui dit « Nous ne sommes pas des robots ». Ben si on est comme des automatismes. J’aimerais que ça s’arrête, j’aimerais tellement que ça s’arrête. J’arrive pas à bouger, quoi. J’entends les gens, qui passent un coup de balais… Tac tac tac j’ai un peu de forces, j’arrive à me lever. J’arrive à faire ce que je peux pour prendre mon petit déjeuner, après j’ai un peu de force, et après j’arrive à dessiner un peu, à écrire. C’était avant-hier, j’avais plus de force de me lever, donc j’ai dormi dehors, et j’ai eu hyper froid. Je me suis pelé… pelé… pelé… j’arrivais pas à bouger, j’arrivais pas à me lever…

Moi

- Pourquoi vous êtes sorti ?

Olivier

- Parce que c’est comme ça.

Moi

- Y’ a eu une part de vous qui vous a dit de sortir ?

Olivier

- Parce que on bouge quand on se sent menacé.

Moi

- Vous vous êtes senti menacé dans l’hôpital ?

Olivier

- Ben oui carrément. C’est mon voisin.

Olivier

- J’ai peur d’être étranglé. C’est la règle du jeu, je me sens menacé. Non mais c’est pas lui particulièrement, tout potentiellement est une arme. Vous avez un stylo dans la main, c’est une arme aussi.

Moi

- Qu’est-ce que je vais faire de ça ?

Olivier

- Un stylo ça se transforme très vite.

Moi

- Pourquoi je ferais ça ?

Olivier

- Parce que vous savez même pas ce que vous êtes capable de faire. Vous avez beau… Moi j’ai jamais tué personne, mais j’aurais très bien pu le faire, et j’ai des envies de le faire. Quand il ronfle, qu’il allume la lumière, que je dors qu’il m’réveille, qu’il rallume. Si j’ai un couteau entre les mains, j’lui coupe la gorge. Mais j’le ferai pas, parce que c’est pas… J’m’en fous.

Moi

- Quand vous étiez dehors, vous n’avez pas eu la force ? Vous aviez pas votre portable pour appeler ?

Olivier

- Non. Quand on peut pas, on peut pas.

Olivier sort en effet d’une nuit d’errance, hors du service, où il n’a pas eu la force de rentrer, restant frigorifié, allongé dehors, dans la nature.

Moi

- Une prochaine fois, si vous sortez comme ça, vous pouvez prendre votre portable. J’pense que ça arrange aussi le service de savoir que vous pouvez appeler en cas de problème. Et pour vous c’est moins fatigant d’appeler, pour qu’on vienne vous chercher, au lieu d’attendre dans le froid.

Olivier

- Ça s’passe, comme ça s’passe.

Moi

- Il faudrait faire en sorte que la prochaine fois, ça se passe un peu mieux pour vous, de façon moins douloureuse pour vous du moins.

Olivier

- J’savais pas. J’me suis dit j’vais sortir faire un tour. J’me suis posé à un endroit, comme on s’assoit. J’me suis allongé, finalement j’me suis endormi. J’avais plus l’énergie de bouger. On sait jamais c’qu’on va faire à un moment. Vous avez des questions ?

Moi

- Non là j’vais arrêter avec aujourd’hui parce que je vous ai quand même fait bien travailler avec mes questions, je pense que ça a été assez fatigant pour cette fois. La seule chose que je peux vous dire, c’est que l’équipe soignante, elle est là pour vous soigner.

Olivier

- Arrêtez c’est un discours positif. Ça c’est quoi ? C’est un truc contre la tuberculose, Quand vous êtes faible, vous avez moins de défenses immunitaires. On vous pique avec du poison. C’est la stupidité humaine. Le lithium ça vous bouffe le cerveau. On s’aime pas les uns les autres, on s’fait pas de cadeau c’est comme ça. Mais bon vous penserez à moi quand vous serez dans le même état.

[…]

Extrait n°2 d’entretien (enregistré avec l’accord du patient) :

Olivier

- On parle par exemple de sécurité dans les hôpitaux psychiatiques… Mais s’échapper de l’hôpital y a rien de plus simple, les portes sont ouvertes. Si vraiment je voulais partir, j’prends mes affaires. J’serais dans la nature. Si ça paraît long non, non pas spécialement. Ça m’est égal.

Moi

- Pourquoi ça vous est égal ?

Olivier

- Pourquoi ça m’est égal ? Parce que déjà le temps est un système inventé par l’homme, c’est peut-être pratique pour les cadres. C’est pour donner une image ou dire j’ai la pêche, mais c’est ni plus ni moins que des mots. Ah je suis dans une maison de repos, mais je suis loin loin loin de me reposer. Et personne se repose vraiment.

Moi

- Vous vous ennuyez ?

Olivier

- Qu’est ce que l’ennui ?... Un peu. Ouais, c’est plutôt des moments où ce que vous vous appelez ennui, j’parlerais de moments, d’autres appelleront ça de la léthargie, c’est des moments où on n’a pas la force de faire des choses et où on n’a pas l’envie. C’est comme de sentir un danger pendant la nuit. Le corps il répond pas quoi, ça. L’ennui ça pourrait être ça, quoi. Pour moi l’hôpital c’est une cité universitaire avec la fac de psycho. C’est qu’un cadre. Après c’est vrai que ça rassure peut-être mon entourage car je suis joignable, j’ai une adresse. J’ai de la chance, je suis entouré, y a plein de gens qui m’aiment. Mais on t’aime mais t’es fatigant, comme je le suis pour les autres.

Ça c’est le discours que je tiens aujourd’hui, j’avais pas du tout le même il y a deux ans. Il a eu des périodes où j’hurlais dans tous les sens pour sortir.

Moi

- Qu’est-ce qui vous a fait changer finalement de point de vue ?

Olivier

- Ben l’attitude. C’est utopique de croire qu’on est libre dans ce monde. Personnellement j’ai jamais fait de mal physiquement, moi je me suis fait mal par contre. Mais finalement, si, j’ai fait du mal aux gens. […] Y avait deux jeunes filles qui couraient en disant « j’me suis fait agresser ». Le gars il est arrivé en face de moi en m’aboyant dessus, en me disant « t’as agressé quelqu’un aujourd’hui ? » Non, ouais par ma présence… J’me suis douché hier. Après c’est que d’l’apparence... On est obligés de montrer aux gens qu’on est bien vivants. Moi y a deux ans, j’ai failli passer au crematorium ici, en étant vivant, piqûre pour te calmer… Quand un bébé il pleure il pleure il pleure, l’adulte il gueule, il gueule, il gueule. Il gueule puis à un moment donné il tombe de fatigue. Ils m’ont mis quelque chose pour dormir. J’avais juste la vision du plafond, et la mobilité de la tête. A un moment donné ils ont placé le brancard devant le crematorium de l’hôpital. Je leur ai demandé : « Mais vous allez quand même pas me brûler, je suis vivant ? »

Moi

- Comment ils vous ont embarqué les pompiers ?

Olivier

- Les pompiers c’est des hommes en costume, c’est tout. J’avais fait peur, j’avais terrorisé des gens en cité U, mais comme d’autres le font.

Moi

- Vous aviez fait quoi ?

Olivier

- J’avais fait quoi ? Je jouais avec les mots et les contradictions des religions par rapport à la parole des gens. Dans les termes cliniques, c’est délire mystique. C’est banal. […] Ma famille. Alors ma famille. Ma famille c’est l’être humain. Vous en faites partie, d’une certaine manière. C’est toujours la même histoire ; C’est un rapport conflictuel, de tensions. Après j’pourrais trouver d’autres mots en disant « non vous inquiétez pas, j’suis quelqu’un de gentil, j’ai quand même bac+5, j’ai commencé des études de médecine avant l’architecture ». Mais ouais forcément c’est c’que j’explique aux gens. J’ai pas choisi d’être là, maintenant je suis là, j’fais avec. C’est une question de tempérament.

Moi

- De tempérament ?

Olivier

- Normalement on parle de tempérament. C’est pas de moi, mais c’est de… j’sais plus qui. Il y aurait deux familles de tempérament. Par exemple les dépressifs, les mous en fait, les légumes. Les tempéraments hyperactifs, les personnes qui sont toujours hyperactives, et puis les tempéraments entre les deux. Ce qui est qualifié en termes cliniques de bipolaires, c’est-à-dire ce que j’ai. J’suis un faux mou, mais j’peux d’un coup être très rapide et me déplacer très rapidement. Sur ces familles de tempérament, il y a ce que l’on appelle les acquis, ce que l’on singe chez les autres, le fait de faire peur, c’est pas innocent non plus. C’est l’histoire de la grenouille qui se fait plus grosse que le bœuf. Sur ces tempéraments, il y a tous les acquis des gens qu’on singe, qu’on copie, et la comparaison c’est comme les acquis qu’on prend à travers les autres, c’est comme les bâtiments qu’on reconstruit. Définition qui vaut rien du tout, car j’ai hérité de mes parents, et forcément… (silence) je sais que mon père a toujours été hyper destructeur et très humiliant, mais bon c’est ce qu’on fait tous avec l’autre. Il y a des moments où on est gentil, et puis hop quand la personne est partie « hop la stagiaire, la petite rousse, elle est bien gentille mais elle est un peu coconne, bien sympa… » Ma mère elle me colle, elle m’énerve. Et mon père c’est pareil. Il écoute personne. Tu n’écoutes plus personne, et plus personne ne t’écoute. Mes parents ils font tout ce qu’ils peuvent pour se maintenir en vie, ouais ils sont comme vous et moi, on prend des claques à droite à gauche, on pose notre cul puis on se relève… On vous soigne et en fait on vous empoisonne. Il suffit de lire la liste des effets secondaires des médicaments qu’on prend pour s’en rendre compte. […]

Extrait n°3 d’entretien (enregistré avec l’accord du patient) :

Ce jour-là, Olivier est très doux dans son ton, encore plus que d’habitude, ce qui contraste violemment avec l’agressivité recelée dans ses propos.

Olivier

- Le monde est violent. En marchant sur le Boulevard Baille, j’ai découvert un morceau de tibia découpé à la scie sur le sol. Ma grand-mère, je lui ai fait la misère. Elle est hypercroyante : elle m’emmenait de force à la messe, faisait des coups de gong la nuit qui me réveillaient. Elle m’a emmené chez le médecin, puis chez un psychiatre, et je me suis foutu de sa gueule. Et il a appelé les pompiers.

Moi

- Comment vous vous êtes foutu de la gueule du psychiatre ?

Olivier

En mimant son discours au psychiatre…

- Je lui ai dit : « il y a une différence entre vous et moi. Vous êtes un petit clou, et j’ai un marteau ensemble dans la main, mais l’inverse est vrai aussi. On construit l’arche de Noé ensemble ». Puis je me suis jeté sur son canapé.

Moi

- Pourquoi ?

Olivier

- Par provocation. Vous ne comprenez pas. Psychiatre, c’est un costume, un titre. Je peux très bien être psychiatre. Il faudrait vous hospitaliser, vous avez des angoisses…

Il dit ces mots en mimant un retournement de situations, me mettant dans le rôle de la patiente, et lui du psychiatre qui rédige une ordonnance.

Moi

- Pourquoi par provocation, alors que vous savez que, devant un psychiatre, il allait vous faire conduire à l’hôpital psychiatrique ?

Olivier

- A Nîmes quand j’ai été interné, c’était le carnage. J’ai insulté un flic, je me suis retrouvé au poste, menotté, dans une cellule difforme, avec des sensations d’espaces embrouillées. J’hurlais. Et soudain, j’ai vu une petite trappe au plafond : ça y est, je me suis dit, c’est exactement comme dans les camps de la mort. J’ai été placé à Nîmes, puis j’ai été transféré ici car j’y étais suivi.

Puis Olivier parle de ses médicaments et dit que c’est « du poison ». Il me dit son désir aussi de tuer, d’étrangler, d’être violent. Même s’il sait qu’il ne le fera jamais, et qu’on lui fera avant qu’il ne le fasse.

L’entretien s’arrête. Quelques minutes plus tard, je le rencontre dans le couloir : il me demande en quelle année d’étude je suis, et combien de temps encore ça va durer : « deux ans ». Lui : « c’est une histoire sans fin ».