III.3.3. Mélancolie et construction de la temporalité psychique

La mélancolie semble être un fondement constitutif de toute psychose, ce qui explique en partie la similitude des rapports au temps vécu, lorsqu’ils sont liés à la dimension de perte et de deuil pathologique.

III.3.3.1. Le noyau mélancolique

Tatossian exprime de cette manière le temps psychotique : « Chez l’homme normal le primat de l’avenir fait du vécu temporel en son essence un vécu de pouvoir – pouvoir de transformer le monde par l’action et soi-même par le déploiement du sujet. L’immobilisation du temps vécu a pour corollaire la perte de la possibilité et l’incapacité basale à l’action véritable, c’est-à-dire vécue comme déploiement de soi. Être mélancolique c’est fondamentalement ne-pas-pouvoir manger, penser, comprendre, travailler, faire l’amour, c’est ne-rien-pouvoir ». La psychose c’est la « stagnation du devenir » (1979b, p. 114-115). Il semble que l’on puisse étendre cette pensée sur la mélancolie au noyau psychotique en général. Ainsi, par exemple, dans le délire paranoïaque, il y a, aussi étrange que cela puisse paraître au premier abord, une « incapacité basale à l’action véritable, c’est-à-dire vécue comme déploiement de soi ». Au contraire, tout est concentré et replié sur soi, dans une diminution du soi.