1. Extinction du mouvement New Age ?

Les années 1990 sont à la fois la culmination et un point tournant de l’histoire du New Age. En effet, d’une part, le mouvement a acquis une notoriété quasi nationale, comme le note R. Kyle :

‘ By the early 1990s, polls indicate that about one in four Americans are aware of the New Age. About sixty percent of the Christians in America accept some New Age beliefs and practices, even if they do not always associate them with the New Age. 277

D’autre part, il est dans le même temps coopté par la culture américaine dans son ensemble. Certaines croyances du New Age, notamment la réincarnation, l’astrologie, et les phénomènes paranormaux, sont partagés par beaucoup. J. Melton annonce que « 20 à 30% des Occidentaux croient en la réincarnation, pratiquent ou ont pratiqué la méditation, et suivent plus ou moins leur horoscope. » 278 D’après certains observateurs, c’est là un signe que, si le New Age disparaît, c’est qu’il est en train de se diluer dans la culture dominante. On ne peut plus parler de mouvement, car il a atteint son succès maximal de « conversion » (au sens faible) de l’ensemble de la population. J. Melton conclut à ce sujet :

‘[…] we are no longer dealing with a marginal phenomenon. The dissenting opinions symbolized by the New Age movement are now strongly entrenched in Western society, and in the near future we can expect to see it offering a more direct challenge to more familiar modes of thinking and acting. 279

A l’approche du changement de millénaire, les attentes millénaristes semblaient sur le point de se concrétiser, mais beaucoup paraissent alors se désintéresser de la question avant la date fatidique. Pour certains observateurs, comme M. Introvigne 280 , le New Age a laissé la place au « Next Age », c’est-à-dire que le but n’est plus le « Nouvel Age » où la société dans son ensemble serait transformée, mais le « Prochain Age » où chacun – à commencer par soi – serait transformé. Selon les partisans de la théorie du « Next Age », la vision planétaire s’est réduite à une vision personnelle. Cela se traduirait par la désaffection de l’organisation en « groupe » ou en « mouvement » au profit de formes plus individuelles.

Avec l’abandon de l’aspect littéral du mythe du New Age, une partie des chercheurs 281 estime que l’on voit la fin du mouvement. Au contraire, avec l’abandon de ses aspects millénaristes qui en font un mouvement dépendant de l’histoire, le New Age atteint une phase de maturité. Pour beaucoup de Nouveaux Mouvements Religieux 282 , l’abandon du millénarisme a constitué une crise dont la résolution marque en quelque sorte le passage à l’âge adulte. Le New Age a une histoire quelque peu différente en ce qu’il n’a pas attendu l’échec de la prophétie (selon les formulations, l’avènement du « nouvel âge » était prévu pour 1996, 1998 ou 2000) pour perdre son aspect millénariste.

Notes
277.

R. Kyle, The New Age Movement in American Culture, pp. 65-66.

278.

J. G. Melton « The Future of the New Age Movement » in E. Barker, M. Warburg, New Religions and New Religiosity, p. 142, « 20 to 30 percent of Westerners believe in reincarnation, either practise or have practiced meditation, and follow their horoscope to some degree. ».

279.

Ibid., p. 148.

280.

M. Introvigne, “After the New Age: is there a Next Age?”, in RENNER II Seminar "New Age Religion and globalization: the european experience”, Copenhagen, 1999.

281.

J. G. Melton, “ The Future of the New Age Movement”, in E. Barker and M. Warburg (eds.), New Religions and New Religiosity, p. 133, par exemple: « by the end of the decade, the movement was obviously on the decline and today we can confidently pronounce its obituary. », ou D. J. Hess, Science in the New Age dans une analyse moins radicale.

282.

C’est le cas notamment des Mormons, et des Témoins de Jéhovah.