3. Place des femmes : vers une égalité avec les hommes ?

Cette question très sensible, en particulier dans la société américaine où le débat sur le droit à l’avortement et à la contraception fait rage, pose également problème dans le New Age. Là encore, deux tendances contradictoires sont en action. Le mouvement oscille entre féminisme – statut de la femme en tous points égal et identique à celui de l’homme, liberté absolue – et retour à des valeurs traditionnelles – place de la femme auprès des enfants et dans les foyers, les femmes sont orientées vers des « valeurs féminines » comme la douceur, la protection et des « rôles féminins » comme la maternité.

Il nous faut ici faire une distinction entre les Nouveaux Mouvements Religieux et le New Age, car leurs positions ne sont pas identiques sur ce sujet. Les premiers (dans leur ensemble, rappelons ici que toute généralisation est purement spéculative et ne vise pas à nier la variété des mouvements ni les positions spécifiques de chacun) ont plutôt tendance à prôner un retour à des valeurs plus stables. Ils souhaitent fournir aux individus déstabilisés par le changement social des cadres relationnels et affectifs solides.

Au sein de ces mêmes mouvements de droits civiques des années 1960 qui prônaient l’égalité entre les êtres humains quels que soient leur race, leur sexe ou leur origine sociale, souvent les femmes avaient un rôle secondaire, même lorsqu’elles représentaient une partie importante des activistes. Ce phénomène de discrimination insidieuse, en parfait désaccord avec la philosophie dont se réclamait la contreculture, se retrouve par la suite également au niveau de certains Nouveaux Mouvements Religieux, où les femmes sont généralement considérées comme inférieures aux hommes sur le plan spirituel, et parfois dans d’autres domaines. Dans Moon Sisters, Krishna Mothers, Rajneesh Lovers: Women’s Roles in New Religions, S. J. Palmer analyse les relations hommes-femmes telles qu’elles sont théorisées et vécues dans les principaux Nouveaux Mouvements Religieux, et les classifie selon trois types: sex complementarity, sex polarity, et sex unity.

‘Sex Complementarity regards each sex as endowed with different spiritual qualities and emphasizes the importance of marriage for uniting two halves of the same soul to form one, complete androgynous being. The individual’s gender and often the marriage relationship might continue on in the after-life. […] Sex Polarity views the sexes as spiritually distinct, separate, and inessential or irrelevant to the other’s salvation. Levels of salvation might be quite different for men and women because they are not considered spiritually equal. Usually, men are considered the superior sex, as in ISKON and the 3HO, but Rajneesh, Dada Lekharj, and Mary Daly view women as superior to men. The notion of pollution is sometimes present and the sexes are segregated to avoid weakening each other’s spiritual resolve. […] Sex Unity sees the body and its gender as a superficial layer of false identity obscuring the immortal, sexless spirit (e.g., est’s Real Self). 388

Plutôt que de rechercher de nouveaux modes de relations, les Nouveaux Mouvements Religieux représentent une tentative de retour à une certaine stabilité après le traumatisme des années soixante. Cette théorie semble étayée par le fait que les relations établies au sein de ces mouvements sont parfois fort similaires aux traditions remises en question par la contreculture, et presque toujours simplifiées, réduites à un simple principe régulateur. En effet, S. J. Palmer note à propos des sept groupes qu’elle a étudiés :

‘The most unusual feature of women’s roles that struck me when I first began to attend the meetings of new religions was their clarity, or perhaps simplicity would be a better word. This clarity and simplicity is often achieved by emphasizing one role and deemphasizing, or rejecting, other roles. 389

Par ailleurs, on note au cours de la dernière décennie un radoucissement des pratiques, si ce n’est de l’idéologie des Nouveaux Mouvements Religieux. Ceci se retrouve en particulier au sein de l’ISKCON, où d’après S. J. Palmer, « These ‘macho’ attitudes expressed above are more typical of the early days of ISKCON, before the communal structure declined. Today, a more positive value is awarded to marriage, and ISKCON men have matured in their understanding of women and marriage ». 390 De même, l’une des jeunes femmes interviewées dans ce groupe où la supériorité masculine est très clairement établie au niveau théorique, m’a expliqué alors qu’elle me présentait les statues de Krishna et de sa compagne, que dans le couple divin, le détenteur du pouvoir suprême était sa compagne puisqu’elle était « the queen of His heart », à Lui qui est tout-puissant 391 . D’après cette dévote, le pouvoir divin est donc essentiellement féminin.

Cette évolution récente semble ne représenter qu’une partie d’une évolution globale, celle-là même qui a vu la maturation progressive du New Age. En effet, ce mouvement s’avère avoir – du moins en apparence – intégré la critique faite aux mouvements issus de la contreculture quant à leur hypocrisie : d’une part discours égalitaire, et d’autre part une pratique réelle qui n’offrait aux femmes qu’un rôle de second plan. L’ère du Verseau, comme l’annonce Marilyn Ferguson, 392 sera féminine. En de nombreux sens, elle l’est déjà : ses membres sont le plus souvent des femmes, comme l’indiquent les interviews des employés au Deepak Chopra Center, ainsi que les membres du Fireweed Eagle Clan. 393

Toute une partie de la rhétorique New Age repose sur l’élaboration d’un nouvel équilibre entre cerveau droit et cerveau gauche, yin et yang. Un pan du New Age s’apparente ou se nomme « religion de la déesse » et mêle féminisme, religions néo-païennes, et écologie. Le terme « Goddess », de plus en plus polysémique et chargé d’affect, est entré dans le vocabulaire des adeptes de la « nouvelle conscience » au même titre que « karma* » ou « corps astral* ». De plus en plus de livres sur la spiritualité féminine paraissent : Eve’s Wisdom: The Goddess Within, et The Goddess versus the Alphabet sont deux exemples de cette littérature, dans deux styles bien différents 394 . La connivence entre New Age et féminisme opère dans les deux sens : d’une part la « nouvelle conscience » s’appuie sur les connexions, réseaux et discours féministes, au niveau du « recrutement » en particulier ; d’autre part les féministes voient dans ce nouveau paradigme la possibilité d’un réel changement vers plus d’égalité pour les femmes. J. P. Bloch, après avoir interviewé 22 participants de la « nébuleuse », parvient à la conclusion que le concept de « Goddess » représente pour ses interlocuteurs féminins un moyen d’affirmation de soi, tant au niveau socio-politique qu’au niveau personnel :

‘In sum, the women I interviewed spoke of Goddess spirituality as a means of obtaining gender equality and self-validation by having a female image of the divine with which to identify. But they did not exclude other spiritual possibilities. The alleged dualism between male and female was acknowledged, and balance was sought by honoring both – rather than straightforwardly advocating androgyny. 395

Lorsque l’on demande aux participantes de la nouvelle spiritualité d’expliquer le déséquilibre numérique en faveur des femmes, l’explication typique est souvent proche de celle formulée par Samantha, cliente au Deepak Chopra Center :

‘I think women are probably more in touch with their feelings and more willing to let people know that they are, so I think it’d be more of a female thing… In fact we did have three men in that particular class of about ten or eleven. 396

Cette interprétation relève d’une forme de stéréotype, que les femmes ont intégré et donc qu’elles cherchent à reproduire, qui comporte également des dangers. En effet, si le domaine d’excellence des femmes se situe au niveau spirituel et celui des hommes au niveau matériel, activisme et lutte pour une plus grande égalité ne sont plus nécessaires. L’on retrouve ainsi le thème de la “sphère” féminine, cocon préservé mais aussi prison, tel que l’évoque E. M. Schur :

‘[…] there must be a special temptation to accept the “emotional superiority of women” argument that sometimes creeps into thinking of this sort. If women are naturally passive, supporting, and loving, perhaps there’s really no need for a women’s movement at all. 397

Une autre explication de ce phénomène est à chercher dans l’histoire. En effet, les adeptes contemporains de la nouvelle spiritualité sont en partie d’anciens membres de la contreculture, et il s’agit pour ces femmes qui ont milité pour leurs droits au niveau légal, politique et civique, de trouver au niveau spirituel une pratique qui corresponde à leurs aspirations. Ce transfert du domaine public et politique vers la sphère privée et spirituelle revêt d’autant plus d’importance que les participantes arrivent à un stade de leur vie où les questions existentielles se manifestent avec plus de force.

Cependant, on constate à ce niveau encore des paradoxes : si c’est aujourd’hui l’ère du féminin, si le temps est venu d’une plus grande égalité entre les sexes, comment expliquer que les écrivains auteurs des best-sellers qui trônent sur les rayons « Nouvelle Conscience », ainsi que les gourous et leaders charismatiques, soient en majorité des hommes ? On peut ici voir à l’œuvre la logique de séduction si fortement implantée dans le New Age et décrite par Ferreux : « dans les stages New-Age, […] selon moi, le nombre de participants dépend davantage de la séduction, du charisme de l’animateur que de ses compétences. » 398 Mais ce phénomène révèle également un courant plus profond dans la société américaine, où les femmes ont le plus souvent des rôles de second plan. E. M. Schur note à ce propos :

‘Perhaps it is not surprising that most of the awareness gurus are men. In large measure the movement perpetuates the well-entrenched tendency for men to tell women what’s wrong with them, and then offer to do something about it. 399

On assiste par ailleurs à une nouvelle distribution des rôles d’après le sexe au sein du New Age. Les femmes auront plus tendance à assister à des cours de yoga, à suivre des ateliers dans des centres de type Chopra Center, à participer à des « medicine wheels* » ou autres phénomènes pan-Indiens, où à se retrouver lors d’événements qui leur sont réservés. 400 Les hommes, quant à eux, se tournent en plus grand nombre vers des groupes comme le Satanisme, et des Nouveaux Mouvements Religieux plus structurés. En effet, selon une récapitulation des différentes études, présentée par S. J. Palmer :

‘The Unification movement in Britain and America has a sex ratio of 2:1 in favor of men (Barker 1985, 206). […] Of ISKCON, Johnson states that “in most regular temples men outnumber the women by about two to one” (Johnson 1976, 46). […] The Children of God also attract more men than women, for Wallis (1979) states that among the single members men outnumbered women by about 2:1. 401

Certains groupes réservés aux hommes ont également fait leur apparition dans les années 1980. Ils proposent des réponses et rassurent ceux qui ont été déstabilisés par l’émancipation des femmes et n’arrivent plus à trouver leur place dans la société, face à l’omni-compétence des femmes (qui gèrent famille, relations sentimentales, vie spirituelle et carrière). Cette nouvelle répartition des rôles entre hommes et femmes est également renforcée par des schémas de pensée spécifiques selon le sexe. En effet, certains termes et concepts du New Age sont compris et vécus différemment par les hommes et les femmes. J. P. Bloch note au cours de son enquête :

‘The men I interviewed […] saw the Goddess not in terms of gender inequalities but in terms of nurturing and assistance. Unlike the women I interviewed, the men (except for Jack) did not explicitly question the alleged patriarchal biases that are said to exclude the Goddess from mainline religions. 402

Cette attitude psychologique se fait donc l’écho de ce que l’on constate dans la pratique, c’est-à-dire que les relations hommes-femmes n’ont pas atteint une égalité de fait. Cependant, l’idée que chaque individu possède des caractéristiques plutôt féminines et d’autres plutôt masculines est plus répandue dans le New Age que la revendication égalitaire (même potentiel, mêmes droits, mêmes rôles). En conséquence, l’idéal relationnel du New Age est une répartition harmonieuse des rôles basée sur la complémentarité et l’utilité de chaque pôle. La nouvelle conception de la sexualité telle qu’elle est véhiculée par le New Age illustre les paradoxes et les enjeux des relations dans la nouvelle spiritualité. La recherche d’une conception de la sexualité plus équilibrée reflète le questionnement sur les relations hommes-femmes en général.

D’une part certains Nouveaux Mouvements Religieux prônent, à l’image de nombre de religions traditionnelles, l’abstinence ou le contrôle de la sexualité. ISKCON, par exemple, se montre – en théorie – encore plus exigeant que les religions chrétiennes puisque les rapports sexuels sont autorisés uniquement dans le but de procréer, et donc uniquement à la période du cycle féminin où la femme est la plus fertile. Cette restriction physique est accompagnée et justifiée par une philosophie très similaire à celle des XVIIIème et XIXème siècles en Europe occidentale, où le rapport sexuel affaiblit l’homme en le drainant de son sémen, essence de vie précieuse qui nourrit l’intellect. S. J. Palmer reporte:

‘Mother Parvati, a devotee of fifteen years who is in charge of training women and arranging marriages (among other services), explained the relative status of men and women in the movement […]: It takes three cups of blood to produce just one drop of semen and one drop is enough to dispel the thirty-two hundred diseases of the body, according to Vedic medicine. The semen is lifted by the life airs to the brain where it bathes the brain and creates intelligence. 403

Cette théorie entraîne nécessairement une inégalité entre les sexes, en particulier la supériorité des hommes sur le plan spirituel comme sur le plan intellectuel. En conséquence:

‘Women are lower in the scale of purity and evoke pollution fears in the men. Women lack the advantage of semen, and the men believe if they can retain it within the body, it will transform into a powerful fuel facilitating their spiritual advancement. 404

Au sein de la théologie de l’ISCKON telle qu’elle est exposée ici – et ceci n’est pas un cas isolé au sein des Nouveaux Mouvements Religieux – abstinence sexuelle et inégalité des sexes sont intimement liées et se justifient mutuellement.

D’autre part, on a, à l’autre extrémité du spectre des différents mouvements, l’attitude inverse où la sexualité est, dans la lignée directe de la contreculture, banalisée et débarrassée de tous interdits. C’est le cas d’un certain nombre de Nouveaux Mouvements Religieux à haute visibilité, tel Children of God. En pratique, les mouvements qui ont une telle attitude par rapport à la sexualité occupent souvent le devant de la scène médiatique, au point que pratiques sexuelles permissives et proéminence du mouvement sont presque systématiquement liés.

A mi-chemin entre ces deux extrêmes, le New Age se trouve encore une fois être plus proche du courant majoritaire. En effet, si la sexualité reste un des éléments centraux – ainsi qu’un des éléments qui font vendre – de la « nouvelle conscience », il ne s’agit plus de révolutionner les mœurs ni de scandaliser le grand public. Cependant, dans le catalogue de vente par correspondance Whole Life Products, parmi les coussins de méditation, les bracelets de cristal qui correspondent au signe astral, et autres bibelots (50 pages en tout), pas moins de cinq cassettes vidéo différentes sont en vente: “The Ecstasy of Exotic Sex”, “Intimacy and Sexual Ecstasy”, “Better Sex Video Collection” (en trois volumes), etc. 405 De même, au Chopra Center, deux stages (parmi la vingtaine qui sont proposés) traitent de la sexualité: « Sacred Sexuality: A Journey into Wildness and Wisdom », et « Tantra: Ecstatic Living through Conscious Loving » 406 . L’on peut donc conclure que la sexualité représente une partie importante du New Age, en particulier au niveau commercial (les stages du Chopra Center coûtent $1700 les trois jours).

La quête d’une harmonie physique entre partenaires reflète celle d’une meilleure compréhension mutuelle affective et relationnelle, ainsi que le sentiment d’un malaise généralisé dans les interactions sociales. En effet, des relations et des rôles qui allaient de soi auparavant (femme au foyer, responsable de l’éducation des enfants, par exemple) sont remis en cause. C’est le phénomène que Dawson appelle « de-institutionalization » 407 . Cependant, les préoccupations concernant la sexualité restent une priorité et une démarche essentiellement féminines, et l’on peut voir ici encore le reflet d’un certain sexisme, qui fait de la femme un objet sexuel – et qui par la même occasion, réduit la sphère d’intérêt légitime des femmes à la satisfaction de son partenaire. E. M. Schur note à ce propos:

‘Whether women are told they will achieve sexual joy via dependence or via self-assertion, the result is pretty much the same. Either way, the message is that their lives should revolve around their bodies. That self-fulfillment is, essentially, sexual fulfillment. 408

L’attrait du New Age pour la sexualité, replacé dans le contexte de l’attention portée au relationnel, dépasse cependant cette interprétation réductrice. En effet, l’on peut considérer la sexualité comme un mode relationnel. Nous assistons donc à une réelle sacralisation, qui s’oppose à la vision matérialiste et utilitaire des relations interpersonnelles en général, et sexuelles en particulier. Comme le souligne C. Raschke, il s’agit de leur redonner un sens sacré :

‘Altogether, the tantric path of “kundalini yoga,” as it is popularly called, reflects a philosophical perspective that identifies sexuality with the creative and intelligent power of the universe. New Age religion in its varying facets has affirmed the connection between sexuality and spirituality. 409

La place privilégiée des femmes dans le New Age (tant sur le plan numérique que thématique), de même que l’importance de la sexualité, constituent-ils un phénomène véritablement nouveau, ou peut-on considérer qu’elle s’inscrit dans une tradition religieuse américaine ? Historiquement, les femmes ont souvent tenu un rôle de second plan au sein des principales institutions religieuses des Etats-Unis. Le clergé y est masculin, et donc les femmes sont reléguées à une participation active certes, mais secondaire. Cependant, elles ont traditionnellement constitué la majorité des disciples. La raison de ce lien fort entre féminité et religion se retrouve dans la notion du XIXème siècle, selon laquelle l’une des caractéristiques les plus appréciées chez le « sexe faible » est la piété (l’un des quatre piliers du « cult of true womanhood » 410 ). I. Zaretsky et M. Leone expliquent comment, au XIXème siècle, la nature « sensible » des femmes justifie que la responsabilité de maintenir la paix et la foi au sein du foyer leur incombe, et comment, au XXème siècle, leurs tendances à « l’hystérie » expliquent leurs élans de piété. 411 En ce sens, la notion contemporaine selon laquelle les femmes sont « naturellement » plus sensibles à la spiritualité que les hommes, s’inscrit bien dans une tradition américaine, et plus largement du protestantisme évangélique, qui place le fardeau du salut de la société sur des épaules féminines.

Par ailleurs, le réveil religieux actuel se différencie de la tradition américaine en ce que la démarche des femmes est ouvertement une « prise de pouvoir » (empowerment) au niveau spirituel, à la suite d’une démarche similaire dans le domaine politique. Pour certains, le caractère féminin du New Age n’est que la suite logique du mouvement féministe qui se réapproprie le spirituel après s’être attaché à se réapproprier le politique.

Il est intéressant de remarquer que l’Eglise, qui fut le premier lieu qui permit aux femmes américaines de s’affirmer, de s’exprimer, qui fut un tremplin (avec la cause abolitionniste et la lutte contre l’alcoolisme) pour le féminisme, finit par être abandonnée de nombre de féministes, car considérée comme trop sexiste. Ann, membre fondateur du Fireweed Eagle Clan, raconte qu’elle a quitté l’Eglise Episcopale parce qu’elle ne laissait pas de réelle place pour les femmes, bien que celles-ci représentent les trois quarts des membres actifs :

‘There was always something missing. And eventually, I even worked on the church staff, always trying to reform the church, trying to make it more coherent and congruent, and working on that. And eventually, I gave up on that. Because increasingly, I became conscious, additionally, of the language, which did not include women, and so as my feminist insights grew, my distance from the orthodox church grew. […]’ ‘I was on the church committee, […] and there was an argument as the Bishop announced something, that they were going to seat a woman on the diocesan council. There were several clergymen who got up, and disputed the Bishop for the seating of this woman […] and that was the beginning of my leaving the church! 412

Ainsi, des femmes qui s’étaient investies dans les religions traditionnelles se rendent compte – en partie grâce au mouvement féministe – des schémas d’exploitation qui y fonctionnent, et abandonnent leur foi avant de se reconvertir dans le New Age. En ce sens elles parviennent à trouver une forme de religion qui leur permet de se réconcilier avec la spiritualité en général, et dans le même temps avec le social.

La place qui est faite aux femmes dans les Nouveaux Mouvements Religieux, mais surtout celle qu’elles-mêmes se créent dans le New Age, s’avère emblématique de l’ambiguïté que cultive la nouvelle spiritualité avec la notion d’égalité. Alors que dans bien des sens il s’agit de transférer l’affirmation de soi du niveau politique au niveau religieux, par d’autres aspects la rhétorique de la « nouvelle conscience » renforce les stéréotypes qui limitent les femmes dans la vie quotidienne.

Au sein du New Age il existe plusieurs concepts clés qui cristallisent des divergences profondes dans le mouvement. Les trois domaines que nous venons d’explorer en sont caractéristiques. Ils mettent en jeu une tension entre modernité et passéisme, entre conservatisme et progressisme, entre la volonté de changement affirmée dans le mythe du New Age et un discours qui réinvente une légitimité à des attitudes dénoncées et critiquées dans les années 1960 et 1970.

Notes
388.

S. J. Palmer, Moon Sisters, Krishna Mothers, Rajneesh Lovers, p. 10.

389.

Ibid., p. 1.

390.

Ibid., p. 22.

391.

Entretien avec Shakuntala, 01-05-2000.

392.

M. Ferguson, The Aquarian Conspiracy, pp. 226-228.

393.

Voir entretien avec Michelle (19-04-2000), Peggy (26-04-2000) et Ann (26-04-2000).

394.

A. Eisen, Eve’s Wisdom: The Goddess Within, Kansas City, Andrews McMeel Publishing, 1999; L. Shlain, The Alphabet versus the Goddess.

395.

J. Bloch, “Countercultural Spiritualists’ Perceptions of the Goddess,” Sociology of Religion, 1997, p. 186.

396.

Entretien avec Samantha, 19-04-2000.

397.

E. Schur, The Awareness Trap: Self-absorption instead of Change, 1976, p. 137.

398.

M. J. Ferreux, Sociologie des imaginaires et pratiques du New Age, p. 162.

399.

E. Schur, The Awareness Trap, pp. 125-126.

400.

Voir annexe IV.3.

401.

S. J. Palmer, Moon Sisters, Krishna Mothers, Rajneesh Lovers, p. 239.

402.

J. Bloch, “Countercultural Spiritualists’ Perceptions of the Goddess,” p. 189.

403.

S. J. Palmer, Moon Sisters, Krishna Mothers, Rajneesh Lovers, p. 16.

404.

Ibid., p. 42.

405.

catalogue de vente par correspondance Whole Life Products, 1334 Pacific Avenue; Forest Grove, OR 97116, voir annexe IV.4.

406.

The Chopra Center for Well Being: Seminars, Workshops and Programs for the year 2000, pp. 11-12, voir Annexe IV.2.

407.

L. Dawson, Comprehending Cults, p. 53.

408.

E. Schur, The Awareness Trap, p. 134.

409.

C. Raschke, “The New Age: The Movement Toward Self-Discovery,” (pp. 106-120) in D. Ferguson (ed.), New Age Spirituality, p. 110.

410.

exposé par B. Welter dans “The Cult of True Womanhood, 1820-1870”,1966.

411.

M. Leone and I. Zaretsky (ed.), Religious Movements in Contemporary America, p. xxxii.

412.

Entretien avec Ann, 26-04-2000.