Quant au New Age « outil », il s’apparente dans une certaine mesure à une religion populaire telle que la définit P. Williams :
‘1. In terms of social structure, all these movements exist apart from or in tension with established groups with regular patterns of organization and leadership. […]’ ‘2. In terms of sociology of knowledge, the beliefs and lore of these movements are transmitted through channels other than the official seminaries or oral traditions of established religious communities, whether tribal or modernized. […]’ ‘3. In terms of symbolism, expression, and behavior, “official” religion tends to take on characteristics consonant with the broad sociological process called “modernization.” […] Popular movements, in contrast, generally look for signs of divine intervention or manifestation in the realm of everyday experience. 504 ’En tous ces points, le New Age dans son ensemble correspond à cette définition. Cependant, il est dans la notion de « religion populaire » un élément fondamental que P. Williams n’inclut pas de manière explicite dans sa théorie : il s’agit de l’aspect « populaire », c’est-à-dire par et pour le peuple, pris ici au sens courant (par opposition aux élites). Or, si le New Age correspond, en termes de structure sociale, de sociologie du savoir, de symbolisme, d’expression et de comportement, à la définition de P. Williams, il n’en reste pas moins que ce mouvement s’adresse autant à l’élite (cf. supra, même chapitre, A.) qu’au « petit peuple ». Il s’adresse aux deux publics de manière différenciée, comme le montre la distinction de D. Hervieu-Léger entre les « mouvements conversionnistes », (basés sur l’émotion et l’immédiat, et représentant pour des publics défavorisés « une solution instantanée aux frustrations ») ; et « mouvements de rationalisation spirituelle » (qui offrent un enseignement intellectualisé et codifié) 505 .
Au niveau thématique en particulier, certaines composantes du New Age - outil s’apparentent à la religiosité populaire. Outre que les traditions se superposent et s’entrecroisent sans frontières clairement définies, il existe des tendances communes, notamment un appel à l’occulte en tant que force agissante et explicative du monde, et une forme de syncrétisme.
Quelle est la frontière entre religion populaire et New Age ? Au cours de nos interviews, nous avons été confrontés à certains individus qui n’ont pas vraiment conscience d’appartenir au New Age, en partie parce qu’ils considèrent plus l’élément de continuité avec des traditions populaires (que ce soit la Santeria, Babalu’ay, les traditions chamaniques, les clairvoyants, etc.) que la mouvance contemporaine dans laquelle se situe le renouveau de ces pratiques et systèmes de pensée. Ceux-ci ont véritablement été co-optés par le New Age, qui puise dans les diverses traditions, allant parfois jusqu’à se les approprier.
P. Williams, Popular Religion in America, pp. 17-18.
D. Hervieu-Léger, La Religion en miettes, p. 95.