Il est bien difficile de parler de traditions religieuses en Californie, ou du « Californian state of mind » sans décrire un peu cet Etat immense et très varié. Il existe notamment une différence assez marquée entre le nord et le sud de l’Etat (les notions géographiques sont quelque peu malmenées par la perception populaire, que nous allons ici respecter : le nord s’étend de la frontière avec l’Oregon jusqu’au sud de la baie de Monterrey ; cependant que le sud continue jusqu’à la frontière mexicaine).
L’immigration anglo-américaine en Californie a marqué différemment les deux parties de l’Etat : au nord, la « ruée vers l’or » a attiré une population composée d’hommes jeunes et d’aventuriers. Cette culture accorde une importance capitale aux notions d’indépendance et de tolérance, dans une région qui a conservé un caractère instable pendant plusieurs décennies, et où la vie de famille était plutôt rare. Dans le Sud, par contre, l’immigration était plus constituée de familles, et de retraités, désireux de reproduire le cadre familial et religieux de leurs villes natales (souvent du Midwest). Par la suite, la Californie du Sud va s’ouvrir à des Nouveaux Mouvements Religieux qui auront pour point commun d’être relativement conservateurs ou tout au moins a-politiques. Les mouvements de guérison par la foi (« faith healing ») et les mouvements mystiques s’y acclimatent bien, suivis par les mouvements orientaux dès le début du XXèmesiècle, et prennent un nouvel essor dans les années 1960. Le Nord est plus rebelle ; dans les années 1950 il constitue un épicentre du mouvement beatnik, et la contreculture s’y exprime par le biais des mouvements du potentiel humain (étude des capacités psychiques de l’homme, des sciences relationnelles dans la lignée par exemple de A. Maslow*).
Le sud, perçu aujourd’hui comme étant plus décontracté (« beach culture »), comporte des zones très conservatrices, avec la présence d’une base de la Marine (à San Diego), ainsi que des villes entières de retraités (Palm Springs, par exemple). Le Nord, vu comme plus « européen » et plus intellectuel, est également beaucoup plus « libéral » sur le plan politique et culturel. Ainsi, le New Age va prendre des orientations différentes selon son implantation : plus social, contestataire et politisé dans la périphérie de San Francisco, plus mystique, et plus patriotique dans le sud. 543
Pour une analyse plus détaillée de l’histoire et de la sociologie de la Californie, cf. P. Lagayette, Californie : mirages et miracles, 1999.