Refus de l’action politique et de l’implication dans le monde matériel

Une autre attitude très répandue dans le New Age, est le refus de l’action et de l’activisme politiques, qui sont perçus comme étant corrompus et impurs ; inefficaces car systématiquement fondés sur un préjugé, et en raison de la difficulté à percevoir les tenants et les aboutissants de tout phénomène social, politique ou économique. En conséquence, cela donne lieu à un relativisme extrême, et une réticence à s’impliquer de quelque manière que ce soit. Cette réticence à s’engager dans une « cause » se rencontre également chez d’anciens baby-boomers et/ou anciens activistes. Par exemple, Rod se déclare indécis quant aux réels effets du militantisme et de l’activisme ; de plus il est proie au doute en ce qui concerne la pureté des intentions et la notion de vérité : en quoi la vérité qu’il tient pour vraie, fonctionne-t-elle pour tous (et dans toutes les cultures), et au nom de quel valeur suprême peut-il tenter de l’imposer à d’autres ? Chez les néo-païens, qui qualifient leur spiritualité de « religion de la Nature », il existe aussi des partisans de l’inaction :

‘[…] despite this widespread verbal agreement [about the importance of ecological matters] there was a deep split between Pagans whose commitment to ecological principles was strong and practical, and those whose commitment was limited to a religious vision. […] Quite a few spoke against any kind of militant action to save the environment. “The principles of the Craft,” said one priest from the Midwest, “are more universal than environmental.” 666

Dans le domaine de la protection de l’environnement, l’absence d’action laisse la place à un changement des comportements (choix du style de vie et choix de consommation), tout aussi importants pour la survie de la planète. Certaines options, tout en n’impliquant que l’individu, n’en sont pas moins signes d’un engagement fort : végétarianisme, recyclage, déplacement à vélo, culture biologique d’un potager, etc.

L’inaction a donc ses adeptes et ses charmes, qui ne la prônent cependant pas pour les mêmes raisons. D’une part, les mystiques et les philosophes considèrent que le vrai combat ne se situe pas sur le plan matériel mais sur le plan spirituel. Dans cette optique, une méditation collective a un effet infiniment plus puissant que des actions de démazoutage après une marée noire, par exemple. Le slogan New Age (« you create your own reality ») peut aussi s’appliquer à la santé de la planète. Il suffirait donc d’exclure la pollution, l’industrialisation, la surpopulation, et l’épuisement des réserves naturelles de son esprit pour que ces réalités perdent de leur consistance. de ne pas penser au sombre avenir de la planète pour s’en préserver. D’autre part, certains New Agers, sans dénigrer les effets de l’action, sont cependant paralysés par les dilemmes éthiques de l’implication dans le monde : quelles sont les motivations profondes, comment dans un contexte de relativisme total, choisir en fonction de quelle réalité il faut agir, quels vont être les effets pernicieux de toute action ? Enfin, la gestion des ressources planétaires passe pour beaucoup par des actions dans les pays en développement, or certains participants de la nouvelle conscience refusent d’adopter une position de « donneurs de leçons » auprès de ces populations.

Dans le New Age nous rencontrons donc :

1) un souci prononcé et généralisé de l’environnement ;

2) deux visions du monde, l’une dualiste et l’autre moniste, qui se combinent avec différents degrés d’optimisme et de pessimisme quant à l’avenir de la planète ;

3) des actions très disparates envers la nature.

Comme nous pouvons d’ores et déjà le pressentir au travers de la question de l’anthropocentrisme, visions du monde et pratiques s’organisent différemment en fonction des publics New Age. Les utilisateurs et consommateurs s’impliquent dans les pratiques les plus traditionnelles, cependant que les acteurs construisent de véritables alternatives aux modes de pensée et d’action.

Notes
666.

M. Adler, Drawing Down the Moon, 1986, pp. 400-401.