3.4.6- L’islam et le mariage mixte

Dans l'islam, Le mariage mixte est toléré entre un homme musulman et une femme non musulmane, pourvu qu’elle appartienne à une religion du Livre, le mariage mixte est absolument illicite en ce qui concerne les femmes musulmanes et des hommes non-musulmans. Pour une musulmane, épouser un non musulman, revient à se couper de façon irrémédiable de sa communauté religieuse, sauf à obtenir de son conjoint une improbable conversion à l’Islam.

La religion représente donc de façon incontestable, dans le cas des musulmans, un obstacle au mariage mixte, tout au moins en ce qui concerne les femmes, car seul le mari transmet la religion. Il est défendu à la femme musulmane d'épouser un non musulman : "art. 58 : Le mariage du non-musulman avec une musulmane est nul", afin précisément que la progéniture ne se détache pas de la communauté musulmane par effet de ses propres lois, et aussi pour que le mariage et tous les droits qui en découlent soient régis par la législation musulmane.

Le Coran reste muet au sujet du mariage d'un juif ou d'un chrétien avec une musulmane. Mais la tradition arabo-musulmane opère une différence radicale entre le mariage mixte des hommes et le mariage mixte des femmes. Ce dernier, seul, fait l’objet d’un interdit rigoureux, l’homme musulman étant autorisé à épouser une non musulmane, pourvu qu’elle appartienne à une religion « du Livre ».

L’interdit qui pèse sur le mariage mixte des femmes s’impose avec une telle évidence qu’il n’offre guère matière à commentaire. Une femme épousée est une femme gagnée au groupe, alors qu’une femme donnée en mariage est une femme perdue pour le groupe.

Notons que quelques législations musulmanes modernes ont entamé aussi un changement qui assure l'égalité entre l'homme et la femme musulmans dans ce domaine.

L'homme musulman a le droit d'épouser une juive ou une chrétienne qui gardent leur religion personnelle, en se mettant au service de la communauté musulmane en lui donnant des enfants qui, suivant la loi, doivent être musulmans. Un texte très net du Coran le permet (Coran 5/5).

La conversion à l'islam n'est donc imposée qu'à l'homme voulant épouser une musulmane, dans tous les cas. Et à celle qui n'est ni musulmane, ni juive, ni chrétienne, si elle veut se marier à un homme musulman.

Notons seulement que la qualité de juive ou de chrétienne est prise surtout d'un point de vue sociologique. En Orient (par exemple au Liban) où les diverses communautés confessionnelles gèrent le statut personnel, l'appartenance sociale à la communauté suffit.

Mais, en dépit de cette permission pour ce type de mariage, " les "fuKaha" préfèrent que l'homme musulman n'épouse une non musulmane qu'en cas de nécessité. Ils pensent que l'homme musulman, en épousant une juive ou une chrétienne, risque de prendre à la légère les principes de l'islam, et de négliger sa religion à cause de sa femme.

Par ailleurs, ils disent que ce type de mariage a une influence négative sur les enfants, lesquels ne reçoivent pas une pure éducation islamique. "Les fukaha autorisant ce mariage ont établi que les enfants procréés par un musulman suivent la religion de leur père, que l'épouse Kitabiyyan'hérite ni de son époux, ni de ses enfants, et que ni son époux, ni ses enfants n'héritent d'elle, car il n'est point d'héritage lorsqu'il y a différence de religion" (SAAD, 2004, pp. 648-650).

Cet exposé théorique rapide sur le mariage chrétien et le mariage musulman nous fait mieux comprendre la complexité de la situation quand il s'agit du mariage mixte; surtout dans une société - comme la société libanaise - qui ne croit qu'à la légalité du mariage religieux. Ces deux systèmes matrimoniaux religieux peuvent constituer une source importante d’inégalité sociale.

Par conséquent, les deux religions pourraient se transformer en obstacles dangereux qui séparent les gens et les répartissent en catégories bien distinctes.

Ainsi, nommer un mariage par un "mariage mixte chrétien/musulman " donne l'idée de deux personnes appartenant à deux catégories différentes : elle est musulmane / il est chrétien ou elle est chrétienne / il est musulman. La catégorisation sociale prédomine énormément dans la société libanaise.

Qu'est-ce qu'on entend par "catégorisation sociale" ? Quel pourrait être son impact sur la réalité sociale des individus et précisément sur la vie des couples mixtes ?