5.7.1.2- Rôles

L'idée d'une norme est associée à la possibilité d'une déviance, et celle-ci, le plus souvent, advient dans les faits. Dans la mesure où les normes sont associées à des groupes, et que ces normes sont variables en fonction des groupes, il va apparaître que les déviants sont eux-mêmes variables en fonction des groupes. Tel comportement est considéré comme déviant dans tel groupe, qui ne le serait pas dans tel autre. Ainsi, les normes du groupe peuvent parfois créer la déviance par l'imposition de règles communes.

Le rôle d'une norme est d'engendrer une certaine uniformité où les comportements seraient parfaitement identifiables. Mais les normes rencontrent des êtres humains qui ne s'y plient pas; bien plus, elles-mêmes évoluent.

Parmi les diverses fonctions des normes, on dégage les plus essentielles :

• La réduction de l'ambiguïté : devant l'impossibilité d'apporter des réponses certaines à une situation, la norme consolide les positions des individus pour mieux maîtriser la réalité.
• L'évitement du conflit : le fait que différents types de réponses se présentent et entrent pour une part en compétition, crée des tensions et comporte des risques de conflits. L'apparition d'une norme de groupe résulte justement de ce que les sujets acceptent et intériorisent des estimations convergentes, afin d'écarter le conflit.
• Le processus de négociation : la normalisation s'opère comme un processus de négociation. Elle permet de comprendre l'uniformité répandue dans la société; les individus repèrent les règles qui régissent les comportements et ils les prennent en compte pour être adaptés socialement.

‘« Louis Dumont a créé la notion d’idées-valeurs. Il prend l’exemple de la gauche et de la droite : deux termes apparemment neutres, et pourtant… Dans presque toutes les cultures du monde, le côté droit est à l’honneur et le côté gauche est un objet d’appréhension. En France par exemple, les invités les plus honorés ont leur place à la droite du maître de maison… c’est particulièrement net avec la présence de la pensée binaire. Dans toutes les catégories occidentales, un des éléments se caractérise par sa plénitude et l ‘autre par le manque du premier : le diable, c’est l’être qui manque totalement de Dieu, l’obscurité est l’absence complète de lumière. Mais ce n’est pas là toutefois que le jugement dévalorisant est le plus fort. Le plus dévalorisé, c’est l’entre-deux. Entre le blanc et le noir, on a le métis ou le gris… ces formes intermédiaires n’entrent pas bien dans une case de la pensée, et l’on aimerait les réduire soit à l’une soit à l’autre » (VERBUNT, 2001, p. 222). ’

Cette situation nous fait penser à la société libanaise dans laquelle "l'entre-deux" n'existe pas : la norme exige une appartenance religieuse bien claire et précise; se déclarer athée est de l'ordre de l'interdit, il faut être musulman ou chrétien…

L’intériorisation des normes entraîne un attachement affectif aux valeurs dont on a hérité. Les respecter permet à chacun d’être dans « la normalité » et préserve du risque d’exclusion.