11.9- Nos félicitations… Nos condoléances

"Après 20 ans de mariage avec un homme qui a une religion différente de la mienne, je peux dire que je suis contre le mariage mixte" (Antoinette, chrétienne, 45 ans).

" Vraiment, je regrette de tout mon coeur d'être un jour la femme d'un Musulman. J'ai raté ma vie" (Maria, 50 ans).

Réussir son mariage, c'est réussir un des plus importants des projets personnels. Cependant, pour des raisons diverses, les résultats de ce projet ne sont pas toujours garantis. Quelle évaluation, les enquêtés-conjoints font-ils de leur vie de couple mixte ?

Tableau n˚89- Répartition de la population masculine selon la religion et l’opinion sur le taux de réussite de la vie conjugale
Tableau n˚89- Répartition de la population masculine selon la religion et l’opinion sur le taux de réussite de la vie conjugale

90.9% des enquêtés-hommes, dont 43.2% musulmans et 47.7% chrétiens, trouvent leur vie de couple "réussie". 6.8% la trouve "plus ou moins réussie". Personne ne reconnaît son échec.

Tableau n˚90- Répartition de la population féminine selon la religion et l’opinion sur le taux de réussite de la vie conjugale
Tableau n˚90- Répartition de la population féminine selon la religion et l’opinion sur le taux de réussite de la vie conjugale

69% des enquêtés-femmes, dont 39.4% musulmanes et 30.3% chrétiennes, trouvent leur vie de couple "réussie". 23.5% la trouve "plus ou moins réussie", et 4.5% "échouée".

Cette échelle d'attitude nous montre les nuances du ressenti: un nombre important des femmes ne peuvent pas dire que leur vie de couple est "échouée", par contre, elles ne peuvent non plus dire qu'elle soit "réussie". L'insatisfaction de cette catégorie des femmes enquêtées est bien ressentie.

" Aujourd'hui, si on me donnait la chance de me remarier, je n'épouserais jamais un chrétien. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de bien connaître mon mari avant le mariage, ni de connaître sa religion. Nous avons passé notre temps à réfléchir comment nous rencontrer et réussir à faire face à la pression violente des parents et de la société. Nous aurions dû prendre ce temps pour approfondir des sujets plus importants : la différence religieuse dans le couple, mieux se connaître…" (Mirvat, femme musulmane, 50 ans).

Malgré le sentiment de défaite et parfois de détresse ressenti par ces femmes, le taux de divorce est presque nul. Elles préfèrent sauvegarder leur mariage plutôt que de partir dans l’inconnu. Elles pensent sûrement à leurs enfants, au qu'en dira-t-on. Si la femme n'a pas de ressources, elle a peur de prendre l'initiative d’un départ. Certaines préfèrent assumer leur choix par peur de la réaction de sa famille et de son entourage.

"Mon mari, c'est quelqu'un de très dur et sauvage. Malgré tout, je vis toujours avec lui; il faut que j'assume le choix que j'ai pris. C'est mon destin et je n'y peux rien" (Mirvat).

"De plus, quand je me dispute avec lui, je n'ose en parler à personne, parce que mon mariage avec lui était mon choix, j'ai mené ce choix contre toute ma famille; et je n'ai pas le droit de me plaindre.

C'est comme ça, je vis toujours avec lui, il est mon mari et je fais avec" (Nawara).

Nada - femme chrétienne - qui a vécu deux mariages, le premier avec un chrétien et le deuxième - qui dure toujours - avec un musulman témoigne et évalue sa vie conjugale :

"Mon expérience négative avec mon premier mari chrétien, m'a donné le courage d'essayer quelque chose de différent : épouser un musulman. Même avec un chrétien on peut ne pas réussir notre mariage. Il n'y a rien de pire, j'ai vécu le pire avec ce chrétien. Ma décision était très claire cette fois-ci : je veux vivre avec Moustafa. Mes parents n'ont pas refusé, ils sont ouverts; l'important pour eux, c'était que je trouve un autre mari et de ne pas rester toute ma vie "divorcée".

J'ai de la chance de rencontrer Moustafa, je suis tellement heureuse avec lui.

Je conseille le mariage mixte. Si les chrétiennes ont peur du divorce chez les musulmans, je leur pose la question suivante : N’y a-t-il pas d’adultère chez les chrétiens, n'y a-t-il pas des maris chrétiens qui ont des maîtresses?".

Quant aux hommes, le taux de réussite de leur vie conjugale nous semble remarquable. Une telle évaluation n'est pas si étonnante dans une société qui leur donne les privilèges sociaux et juridiques.

En conclusion, l’enfant qui est normalement le fruit d’amour de la vie à deux, peut se transformer malheureusement en source de haine et de rivalité dans le couple. L’enfant, et particulièrement dans le couple mixte chrétien/musulman, peut réveiller les empreintes identitaires chez les conjoints. Chacun, consciemment ou inconsciemment, essaie de faire de l’enfant sa copie conforme; ainsi un rapport de force se crée dans le couple, et une guerre culturelle entre les deux religions - représentées par les deux conjoints - prend place au sein de la vie à deux.

Loin de l’interculturalité et du respect de la religion de l’autre, l’enfant demeure tiraillé entre deux parents en conflit perpétuel.