12.14- « Le moins-plus »

Il faut donc bénir les dissemblances qui apparaissent. Ce sont ces différences qui créent l'attraction; ce sont elles qui nourrissent les conversations, les interrogations, les confidences; qui engendrent la richesse des échanges entre les partenaires.

Permettons à l'autre de redevenir lui-même, abstenons-nous de le juger, efforçons-nous de le comprendre. Son monde intérieur est différent du nôtre, il n'en est pas plus déraisonnable ou moins valable; à nous d'entrer dans ses arcanes.

Cette démarche de différenciation oblige le couple à un travail profondément maturant :

La communication interculturelle reconnaît "l'étranger" à la fois semblable et différent. Reconnaître l'autre comme différent, c'est accepter de relativiser mon propre système de valeurs; c'est admettre qu'il puisse y avoir d'autres motivations, d'autres références, d'autres habitudes que les miennes; c'est éviter d'interpréter les comportements de l'étranger dans mon propre langage afin de comprendre la signification qu'ils revêtent pour lui-même.

Une telle décentration suppose la prise de conscience de sa propre identité culturelle. Dans les perceptions, les représentations, les appréciations que j'ai de l'autre, il s'agit d'abord de ressaisir mon propre regard; le discours que je tiens sur lui reflète d'abord ma propre identité.

Reconnaître en même temps l'autre comme semblable, c'est admettre que la différence n'exclut pas la similitude; c'est le considérer comme appartenant fondamentalement à la même humanité que moi; c'est supposer que la différence n'est pas seulement un obstacle à la communication, mais peut être un stimulant et un enrichissement.

Prendre en compte (et donc de ne pas ignorer ou dénier) les phénomènes de catégorisation différentielle; ensuite, les accepter et enfin prendre conscience des mécanismes en jeu. Cet "accompagnement" peut certainement favoriser davantage un éventuel dépassement des stéréotypes et des préjugés.

Chacun voudra, plus ou moins consciemment, inclure l’autre partenaire dans sa propre logique. Pourtant, la vie conjugale n’est possible que par une reconnaissance des différentes logiques. Celle-ci ne s’obtient pas toute seule. Elle suit une phase de négociation, où chaque partenaire finit par se situer clairement face à l’autre. Elle ne se fait pas sans connaissance de l’autre et sans tenir compte de sa logique à lui.

La prise de conscience des caractères différenciateurs aboutit ici non pas aux oppositions obstinées, aux divisions, mais au respect de la différence de l'autre, à la prise en compte de la distance conjugale, à l'intérêt et au plaisir de la nuance dans l'altérité qui peut aller jusqu'à l'étonnement quotidien.

Ce sont les couples, dont leurs familles ont des contacts et une ouverture à l'autre religion, qui paraissent le plus "réussir" un haut niveau d'interculturalité dans leur couple. Quand on considère les choix effectués pour l'enfant, on remarque effectivement que c'est dans ce type de famille que les facteurs d'identité (prénom, etc.) de l'enfant reflètent un compromis réel.

Cette ouverture à la religion différente vécue dans la famille parentale, pourrait déterminer apparemment l'aptitude à « partager » l'enfant. Non en luttant pour se l'arracher mutuellement, mais en coopérant pour le faire participer, aussi harmonieusement et équitablement que possible, aux deux cultures religieuses en présence, valorisées au même degré.