1.2.3 - Les officiers de couleur

La frégate la « Vertu » emporte pour sa part un contingent particulier d’officiers ¹⁰² vétérans des guerres de Saint-Domingue : tous sont de couleur. La plupart sont mulâtres, officiers entourant le général Rigaud, champion malheureux de cette faction contre Toussaint-Louverture, quelques autres sont noirs. Tous ont en commun d’être originaires de Saint-Domingue et d’être des adversaires plus ou moins prononcés de Toussaint. En plus de leur connaissance de l’île, leur poids politique peut s’avérer déterminant dans la lutte d’influence contre le gouverneur à vie de Saint-Domingue. Le premier Consul avait en effet donné pour consigne à Leclerc de s’appuyer sur les mulâtres contre les noirs en cas de résistance de Toussaint, afin de diviser les rebelles. Débarqués plusieurs jours après le reste de l’expédition, Leclerc les emploiera essentiellement comme chefs de gendarmerie ou commandants de place, ne les employant que rarement à encadrer les troupes locales ralliées à lui, comme ceux-ci l’auraient souhaité. En fait, à l’exception de Pétion, dont tous les membres de l’expédition vantent les mérites, aucun de ces officiers de couleur venus de France ne participe activement aux combats.

Plus tard, le premier Consul enverra encore en mission spéciale le chef de brigade « Hercule » Damingue. Cet ancien esclave noir cubain était entré en 1796 dans les guides de Bonaparte en Italie, et commandait en 1802 l’un des deux escadrons de chasseurs de la Garde Consulaire, sur le même pied qu’Eugène de Beauharnais. C’est sans doute du fait du privilège de la Garde que ce chef d’escadrons part en mission à Saint-Domingue comme chef de brigade. Il ne sera toutefois pas confirmé dans son grade à son retour …