4.2 - Le retour au bercail

Le retour en France n’est pas exempt de péripéties, tant dans le trajet lui-même que dans les causes du retour …

4.2.1 - Les officiers rentrés en France …

On sait donc que plus de la moitié des officiers envoyés aux colonies ont donc été tués (34,6%) ou capturés (23,8%). Les autres sont rentrés en France pour diverses raisons …

A Saint-Domingue, quatre généraux de division rentrent librement en France avant la capitulation : Desfourneaux, Desbureaux, Quantin et Boudet. Deux à la Guadeloupe : l’amiral Lacrosse, faisant fonction, et le général Ambert. Un seul officier promu à ce grade en cours de campagne rentre également : le général Clauzel.

Desfourneaux, est renvoyé pour des raisons politiques : gouverneur de l’île en 1797, il s’y était attiré l’inimitié des colons qui s’en plaignent quotidiennement à Leclerc à son retour en 1802. Celui-ci le renvoie pour des raisons d’ordre public, mais avec ménagement : « je renvoie en France le général Desfourneaux ; je n’ai aucune plainte à faire contre lui, au contraire je n’ai qu’à me louer de son zèle, mais par les circonstances dans lesquelles il s’est trouvé ici, je crois que sa présence ne peut produire un bon effet » 424 . Il fait toutefois preuve de moins d’indulgence un mois et demi plus tard, lorsqu’il revient sur cette affaire : « J’avais ôté le général Desfourneaux de la partie française, où par son peu de connaissance des hommes et des choses et son désir immodéré de faire parler de lui il ne pouvait que faire du mal. Je l’avais envoyé dans la partie espagnole, où il n’y avait rien à faire. Arrivé là, il a cherché à se faire un parti, il a vexé les hommes que j’y avais placé. Il a été jusqu’au point d’intercepter ma correspondance avec le général Kerverseau ; je l’ai rappelé » 425 .

Desbureaux et Quantin rentrent pour des raisons morales. Tous deux s’opposent à la politique criminelle de Rochambeau et à la soif de pillage du corps expéditionnaire. On a déjà vu le départ du général Quantin 426 , Beaubrun-Ardouin rapporte ainsi  celui de Desbureaux, peu après l’affaire des chiens mangeurs d’hommes de Rochambeau : « Ainsi le général Desbureaux, qui se montra si humain, si honnête homme aux Cayes, dégoûté de ce qu’il voyait, demanda-t-il à partir pour la France : il agit comme le général Devaux, qui ne put supporter au Port-au-Prince ce qui se passait sous ses yeux » 427 . Comme pour Devaux, Rochambeau leur accorde sans tarder le droit d’embarquer, sans doute fort heureux de se débarrasser de ces hommes à la conscience trop encombrante … Ils gênaient déjà Leclerc lorsque celui-ci était encore à la tête de l’armée, au point qu’il cherchât à plusieurs reprises à les dénigrer aux yeux du gouvernement métropolitain : « Vous m’avez envoyé les généraux Desbureaux et Quantin : le premier ne se remue point crainte de mourir ; le second ne connaît rien à la guerre » 428 ou encore « Le général Desbureaux est un homme sans énergie qui craint de mourir. Le général Quantin est un homme qui ne peut assembler deux idées » 429 . Opinion qui n’était visiblement pas partagée par son propre chef d’état-major, qui dans le rapport qu’il adresse au ministre de la Guerre à son retour de captivité écrit : « Le département du Sud qui, jusqu’alors s’était maintenu dans l’ordre éprouva aussi quelques secousses, des insurrections eurent lieu vers les quartiers d’Aquin et de Saint-Louis, mais le général Desbureaux en fit prompte justice et le calme s’y rétablit » 430 .

Boudet seul semble avoir été envoyé en France sans arrière-pensée, puisque Leclerc l’envoie rendre compte personnellement de la situation au ministre de la Marine et des Colonies et au premier Consul, mission des plus honorables, un mois avant sa mort : « Toute mon armée est détruite, même les renforts que vous m’avez adressés. Le général Boudet fera connaître au Premier Consul et à vous ma véritable position » 431 .

Quant à Lacrosse, il est « autorisé à rentrer en France pour raison de santé » le 8 mai 1803. En fait, il est renvoyé par son successeur, le général Ernouf, le jour même de l’arrivée de celui-ci ! La politique autoritaire de Lacrosse en 1801, ses fautes politiques à l’égard des troupes coloniales (comme le refus de nommer Pélage au commandement de l’armée à la mort du général Béthencourt) avaient mené à l’insurrection de celles-ci sous le commandement de Delgrès et Ignace. Exilé à la Dominique, il était rentré dans les bagages de l’armée de Richepance, avant d’être nommé capitaine général à Tobago. Un placard ! Mais Richepance meurt avant son départ, et Lacrosse s’autoproclame de nouveau capitaine général de la Guadeloupe. Il renvoie rapidement en France le successeur légitime de Richepance, le général Gobert, ainsi que divers opposants, avant de pratiquer une répression sanglante. Exacerbant de nouveaux les passions que Pélage et dans une moindre mesure Richepance avaient su apaiser, les critiques à son égard s’accumulent auprès du gouvernement qui envoie en urgence le général Ernouf pour le relever. C’est donc un nouveau désaveu pour l’amiral …

Reste le cas du général Ambert. Arrêté et destitué par un arrêté de l’empereur le 19 mai 1808, qui lui reproche de « s’être retiré dans ces terres à la Guadeloupe sans faire aucun service et être resté volontairement spectateur des désordres et de la guerre civile dans la colonie » 432 , il s’évade et parvient à rejoindre la métropole où il réclame un procès. Celui-ci l’acquitte à l’unanimité, mais pas avant 1812.

De Saint-Domingue, huit généraux de brigade rentrent en France avant la fin du corps expéditionnaire : Humbert, Salme, Kerverseau, Amey, Dutruy, Sarrazin & Poinsot. A la Guadeloupe, le général Gobert seul est de retour en métropole avant la capitulation de l’île. A ceux là s’ajoutent cinq  officiers promus à ce grade en cours de campagne : de Lacroix, de Thouvenot et (Pierre) Devaux à Saint-Domingue ; Ménard à la Guadeloupe et Castella à la Martinique. On a vu également le cas des généraux de couleur …

Dans la version officielle de la campagne de Saint-Domingue, telle que tirée de la correspondance de Leclerc, Humbert a lamentablement échoué à Port-de-Paix, dès les premiers jours du débarquement : s’emparant de la ville le 10 février 1802, il poursuit deux jours plus tard le général rebelle Maurepas dans les mornes (collines) à l’intérieur des terres, mais se fait durement repousser. Se repliant dans la ville, il doit s’enfermer dans la place et n’évite l’anéantissement que par l’intervention des marins de la flotte descendus à terre. Avec ce maigre renfort, Humbert se serait inconsciemment jeté de nouveau sur Maurepas, avec le même sanglant résultat. C’est en tout cas ce que lui reproche Leclerc devant le ministre de la Marine ou le premier Consul. Pourtant, à lire la correspondance entre Humbert et Leclerc, une autre version apparaît : c’est Leclerc qui ordonne à Humbert de poursuivre l’ennemi hors de Port-de-Paix, avec le seul renfort des marins, malgré les réticences de ce dernier, rendu plus prudent par son récent échec : « Les 400 hommes [les marins] que vous m’avez envoyés par le « Jean-Bart » sont arrivés ici, mon général, au moment où j’allais m’enfermer dans les forts, ayant appris que l’ennemi travaillait dans son camp à faire des fascines et à nous livrer une attaque. Je suis fâché de vous dire que ce renfort est insuffisant pour l’objet que vous me demandez, celui de chasser l’ennemi à six lieues du Port-de-Paix. Les rebelles ont réuni leurs meilleures troupes. Ils sont infiniment plus nombreux que nous, ils occupent à trois lieues d’ici des mornes inaccessibles fortifiés par toutes les ressources de la nature et de l’art. Il faudrait au moins trois mille hommes, agissant par plusieurs colonnes à la fois pour les en débusquer. Je ne suis pas accoutumé, mon général, à marchander pour ce qui regarde mon devoir et mon métier. Mais quand je vous assure qu’avec les moyens que j’ai, il m’est impossible d’exécuter cette opération, vous pouvez [me croire] » 433 . Humbert s’exécute pourtant, et est inévitablement battu, de nouveau, le 15. Leclerc écrit à Paris : « J’avais ordonné au général Humbert de s’emparer de Port-de-Paix, et de s’y maintenir ; ce général a outrepassé mes ordres et maître de la place, il a voulu pousser en avant dans le pays. Je lui avais donné un vaisseau et une frégate, avec lesquels il devait enlever la place, s’y maintenir et rien de plus. Ce général a plus calculé sur sa bravoure que sur les règles de l’art militaire, il a attaqué l’ennemi dans une position retranchée qu’il occupait à trois lieues de Port-de-Paix et il s’est fait battre » 434 . Quelques jours plus tard, il poursuit dans cette voie : « J’aurais désiré envoyer une colonne sur le Port-de-Paix pour réunir à nous à Plaisance et chasser les troupes qui se trouvent dans cette partie, mais le général Humbert qui se trouve dans cette partie m’a fait des sottises » 435 . Le général Debelle, venu au secours d’Humbert avec une colonne de renfort le 17, attaque sans tarder malgré les conseils de prudence d’un Humbert échaudé : rien n’y fait, et les deux généraux français sont encore battus. Dans son rapport, Debelle rejette toute la responsabilité de l’échec sur Humbert, qui est de nouveau blâmé. Celui-ci s’en défend auprès du capitaine général : il est évident que Debelle veut lui faire porter le chapeau « en représentant sous de fausses couleurs mes opérations militaires au Port-de-Paix (…) Je n’ai pas eu l’honneur de partager la confiance du général Debelle. Il a essuyé un échec dans lequel je déclare que je ne suis absolument pour rien. Je lui ai offert tous les conseils que ma connaissance des localités me mettait à même de lui offrir, je l’ai secondé tant que j’ai pu » 436 . Leclerc s’acharne à l’abattre aux yeux du gouvernement : « Le général Humbert s’est déshonoré au Port-de-Paix par sa conduite lâche. Celui-là, je vous le renverrai en France, avec un rapport sur sa conduite adressé au ministre de la Marine » 437 . Le jour même, le capitaine général ordonne sa mise aux arrêts à bord de la flotte. Humbert se défend de nouveau : « J’ai reçu votre ordre qui m’ordonne les arrêts à bord ; étant malade et dans les traitements, j’ai écrit au général Boyer qu’il me laisse quelques jours à terre. Il ne m’appartient pas de vous demander les motifs de ma détention. Cependant, je présume que le général Debelle vous a fait quelque rapport désavantageux malgré que j’ai trop bonne opinion de moi pour y faire attention, je n’en suis pas moins mortifié pour avoir consigné au général Debelle mon mécontentement de ses fautes militaires » 438 . Finalement réintégré à la division Salme, il y est apprécié de son supérieur, puis du successeur de celui-ci, le général Brunet. Mais une mésentente avec l’un de ses subordonnés, Grandet, va provoquer un nouveau faux pas de sa carrière. Ce chef de brigade n’a de cesse de se plaindre d’Humbert auprès du général Clauzel, successeur de Brunet à la tête de la division de Droite, allant jusqu’à l’accuser de collusion avec l’ennemi : «Le général Humbert est arrivé avec 280 hommes, et nous avons commencé l’attaque de la colline du Margot. Il devait retourner à Port-Margot pour y prendre des troupes pour marcher par les hauteurs pendant que je m’avancerais par la colline. Je ne puis faire que ce que le général m’ordonne : nous sommes au Petit Bourg, il parlemente avec l’ennemi en attendant, j’ai trois détachements au Trou d’Enfer avec lesquels je ne puis communiquer. Je vois l’ennemi camper à un quart de lieue de nous » 439 . En fait, c’est Grandet lui-même qui parlementait avec les rebelles, organisant des négociations pour se saisir par ruse des chefs rebelles et les faire étrangler 440  ! Humbert, exaspéré, fait mettre Grandet aux arrêts, mais Clauzel relève Humbert de ses fonctions et le rappelle au Môle Saint-Nicolas. Arrivé là, ce dernier semble demander l’intervention en sa faveur du général Brunet, son ancien chef, qui commande cette place. Celui-ci s’enquiert auprès de l’état-major de Clauzel des motifs de mécontentement à l’encontre d’Humbert 441 . Le même jour, Humbert offre de remettre sa démission à Thouvenot 442 , chef d’état-major de Clauzel, mais celui-ci ne peut l’accepter, ce droit étant réservé au capitaine général. Agissant sans doute à l’insu de son supérieur, Thouvenot commande au capitaine de gendarmerie Delion de mener une enquête « sur la mésintelligence qui règne entre le général Humbert, d’une part, et le général Clauzel et le chef de brigade Grandet, de l’autre » 443 . Finalement, Humbert se voit une fois de plus simplement déplacé, puisqu’il reçoit l’ordre 444 le 15 d’aller prendre la tête de la brigade du général Vonderweidt, mort une semaine plus tôt. Le lendemain, Delion rend un rapport évasif, n’osant même pas citer le nom d’Humbert : « J’ignore s’il y a mésintelligence entre les officiers supérieurs dont vous me parlez ; ce que je sais c’est que généralement on m’a paru méfiant de « celui-là » [Humbert] entre autres les officiers qui ont marché avec lui (…) ». Finalement, il est également lâché par le général Brunet, qui lui reproche le « mécontentement général qu’il a excité » 445 par ses rapines, prend la défense de Grandet contre lui et demande son rappel au Cap. Humbert est effectivement rappelé dès le lendemain … Thouvenot lui signifie l’ordre de se rendre au Cap le jour même, puis de nouveau le lendemain. Mais Humbert refuse de quitter son poste, cherche de l’aide auprès de Thouvenot et Brunet. En vain : Thouvenot réitère le même ordre le 7 septembre 446 . Dix jours plus tard, c’est Brunet en personne qui lui écrit pour lui intimer d’obéir aux ordres 447 . Humbert obtempère finalement. Leclerc écrit alors au premier Consul : « Je renvoie en France le général de brigade Humbert. C’est un ignorant, un faiseur d’affaires sales. Cet homme ne va pas même au feu » 448 . Si les deux premières assertions sont sans doute exactes, la dernière est en contradiction complète avec les premiers rapports du capitaine général sur Humbert, qui lui reprochait : « Ce général a plus calculé sur sa bravoure que sur les règles de l’art militaire, il a attaqué l’ennemi dans une position retranchée ». De plus, toutes les campagnes du général Humbert correspondent davantage à cette dernière remarque qu’à la précédente : que ce soit en Irlande ou à New Orleans, Humbert a toujours commandé depuis l’avant, chargeant sans jamais compter l’ennemi. Mais surtout, il semble que ce que l’on reproche vraiment à Humbert, c’est le fait que sa brigade ait « mal voté » lors du suffrage sur le consulat à vie. Le commandant Parnageon, qui a succédé à Humbert à Plaisance et Port-Margot, rapporte le 23 août à Thouvenot le vote défavorable de la 38e demi-brigade (sous les ordres d’Humbert deux semaines plus tôt, alors que s’organisait le scrutin), comme l’illustre le commandant : « J’ai fait venir les deux hommes chez moi, et leur ai demandé le motif qui les avait engagé à mettre ‘Non’. Ils m’ont répondu que Bonaparte les avait fait venir ici et qu’ils ne l’aimaient point. Enfin, ces enfantillages des hommes qui ne réfléchissent point : le caporal parle de la présente où on est » 449 . Le « lâchage » d’Humbert par Brunet à lieu le lendemain même, et son rappel tout juste vingt-quatre heures plus tard. Embarqué pour la France le 17 octobre 1802, les motifs de ce renvoi ne sont envoyés à Paris que trois jours plus tard, par Pierre Boyer, le successeur de Dugua au poste de chef d’état-major de l’armée : « Le général en chef me charge de vous rendre compte qu’il a ordonné le retour en France du général de brigade Humbert sur les plaintes qui lui ont été faites contre le général, qui s’est permis de détourner des magasins de l’armée des rations en les vendant à son profit. D’avoir eu des liaisons d’intérêt avec des gérants et conducteurs nègres de différentes habitations au détriment des propriétaires. D’avoir eu des relations coupables avec des chefs des brigands. Ces plaintes, jointes au mécontentement du général en chef contre ce général, l’ont engagé à lui ordonner de quitter l’armée et se rendre en France à votre disposition. Il est parti du Cap le 26 Vendémiaire sur le navire marchand l’Aimable Françoise, capitaine La Borgne allant au Havre » 450 . C’est sur cette seule lettre qu’Humbert sera destitué et confiné à demeure, alors même qu’aucune autre preuve n’a alors été soumise au Conseil de guerre, puisque celui en fait la demande de communication … Sans doute général de peu de talents, ni de scrupules, Humbert n’en a pas moins été à plusieurs reprises le bouc émissaire parfait pour expliquer les premiers revers du corps expéditionnaire. Soutenu par quelques collègues, il est ensuite complètement abandonné dès lors que ses troupes votent ouvertement contre le Consulat à vie, faute impardonnable dont il est une fois encore rendu responsable … Comme souvent, le renvoi pour prévarications n’est qu’un leurre servant à couvrir d’autres griefs, plus politiques.

C’est également le cas du général Salme. Si l’on s’en réfère à la seule biographie existante concernant ce personnage, celle de Louis Heitz 451 , ce général aurait été la victime de son sens moral et de son humanité : « Le général Salme, tout en remplissant bravement ses devoirs de soldat, ne pouvait s’empêcher de protester contre la violation de l’esclavage, et déplorait une expédition qui nous coûtait tant de sang : aussi la première mesure du général Leclerc en arrivant, au Cap, fut le renvoi en France du général Salme (mai 1802) » 452 . La réalité semble toutefois un rien différente. Si l’on en croit ses exploits, Salme n’avait rien d’un philanthrope à l’égard de ses adversaires de couleur : formant l’avant-garde de la division Hardÿ à la poursuite de Christophe, « le général Salme s’empara d’un camp ennemi avec les bagages et passa deux cents hommes au fil de l’épée » 453 . Le 8 avril, il « presse » dans sa brigade tous les mulâtres et le bétail de la plantation Morin, et dresse un reçu pour « les mulâtres et les vaches » 454 , entre lesquels il ne semble pas faire grande différence. Enfin, trois semaines plus tard, Leclerc est contraint de le rappeler à l’ordre en personne suite à des plaintes formulées à son égard par le général noir Maurepas, à qui Salme a eu le manque de tact de demander des chaînes pour les prisonniers : « Vous ne pouviez (…) prendre une envie plus nuisible à notre position dans la colonie que d’écrire la lettre que vous avez envoyée au général Maurepas en lui demandant des chaînes. Il ne faut jamais parler de chaînes dans la colonie. Certains mots effrayent les noirs. Nous avons devoir de conciliation et de surveillants. Une mission tout autant politique que militaire, ainsi je vous recommande de ne jamais rien dire ou faire qui puisse contrarier les intentions du gouvernement français qui sont d’établir ici la liberté et l’égalité » 455 . Pour cette raison, Leclerc lui retire le commandement de Port-de-Paix. Soit que cette lettre ne lui soit encore pas parvenue, soit qu’il passe outre les conseils de modération, Salme fait une nouvelle fois preuve de peu de diplomatie dès le lendemain en désarmant toutes les troupes de couleur, ralliées aux Français, qui se présentent à son camp pour venir chercher des vivres. Leclerc leur fait immédiatement rendre leurs armes et cherche à atténuer l’attitude de Salme dans une lettre au général noir Christophe 456 . Les 4 et 5 mai, Salme donne normalement ses ordres 457 . Du 5 au 13, date à laquelle Leclerc annonce son renvoi, toute correspondance de ou vers Salme a disparu, aussi bien dans la correspondance de l’armée de Saint-Domingue que dans le dossier de ce général aux archives militaires. La seule référence qui y est faite est à chercher dans une lettre personnelle de Dampierre à Thouvenot, datée du 10 mai, dans laquelle il annonce « aujourd’hui, on enterre le beau-frère du général Salme » 458 . Qu’a pu faire Salme entre-temps qui justifie son renvoi ? A son beau-frère, Leclerc écrit : « Le mauvais état de la santé du général Salme m’a engagé à permettre ce général de retourner en France. J’ai nommé ce général au grade de général de division, pour la conduite distinguée qu’il a tenu dans diverses actions contre les rebelles. Je vous prie de le faire confirmer dans ce grade. J’ai chargé ce général de vous transmettre tous les renseignements dont vous auriez besoin sur la position actuelle de l’armée de Saint-Domingue » 459 . Officiellement, c’est donc un renvoi pour raison de santé, avec comme ultime mission de rendre compte au gouvernement, une mission de confiance. Pourtant, un mois plus tard il écrit : « Le général Salme faisait des affaires, je l’ai renvoyé mais avec ménagement parce qu’il a bien servi dans la campagne » 460 . Lorsque Salme arrive à Paris le 13 juillet 1802, il écrit au ministère de la Marine et des Colonies pour se faire reconnaître dans son nouveau grade (il utilise d’ailleurs déjà du papier à en-tête lui conférant ce grade), transmettant au ministre la lettre de Leclerc du 13 mai, que ce dernier lui a remise ouverte. Le jour même, Decrès transmet la lettre au ministre de la Guerre. La lettre porte alors en marge, annotée deux jours plus tard par Berthier ou l’un de ses aides : « Le Premier Consul a refusé la confirmation du grade de général de division » 461 . Visiblement, des soupçons pèsent sur lui quant à son intégrité au cours de la dernière campagne, car celui-ci demande la publication de la lettre de Leclerc à son égard, et écrit à Berthier : « Revenu de Saint-Domingue où j’ai fait la guerre comme à mon ordinaire, c'est-à-dire sans jamais avoir été battu et sans en avoir rapporté un sol, j’ai lieu d’être surpris (…) qu’à mon arrivée à Paris, la lettre que vous écrit le général en chef, le rapport qui me concerne, n’ai encore point été rendue publique. (…) Un militaire tel que moi (…) n’a jamais rien à redouter qu’on parle et je répondrai » 462 . Dès lors, on le renvoie d’un ministère à l’autre, l’oubliant le plus vite possible. Salme continue un temps de se battre pour faire reconnaître sa promotion, mais sans grand espoir, car dès le 19 juillet, il raye lui-même la mention imprimée « de division » de l’en-tête de ses lettres pour corriger de sa main « de brigade » 463 . Deux mois et demi plus tard, sans nouvelle du gouvernement, il se rappelle au bon souvenir de Berthier, et demande à passer à Pondichéry avec le grade de général de division 464 . Preuve s’il en est que son séjour colonial ne fut pas pour lui un purgatoire. Pourtant, la seconde lettre de Leclerc concernant Salme, celle du 11 juin, et atténuant ses mérites d’accusations de malhonnêteté, n’a pu arriver avant lui : Salme paye-t-il alors encore son amitié avec Moreau ? Il semble bien, car il est rayé des cadres de l’armée le 16 octobre 1802. Retiré dans une propriété en Alsace où sa femme tentera de l’empoisonner, il éprouve des difficultés à se faire payer sa pension de retraite par le gouvernement, puis est surveillé par la police lors du procès de Moreau. Il ne reprendra du service qu’en avril 1810, en Espagne, et mourra un an plus tard lors du siège de Tarragone. Alors seulement Napoléon lui reconnut son grade de général de division, et fit déposer dans son cercueil le brevet l’attestant …

Le général Kerverseau, qui avait fait toute la campagne de Saint-Domingue isolé dans la partie espagnole de l’île, avait réussi par une politique avisée à y maintenir le calme malgré un cruel manque d’effectif. Après la capitulation de Rochambeau au Cap et l’évacuation des dernières places françaises de la côte, tous les détachements français isolés qui y parviennent le rejoignent à Santo Domingo, dont les généraux Ferrand et du Barquier 465 . Kerverseau, commandant dans la partie espagnole et le plus ancien en grade, doit logiquement prendre le commandement de l’ensemble des rescapés. Mais Ferrand, arrivé à la tête d’une troupe supérieure en nombre à celle de Kerverseau, ne l’entend pas ainsi, et en une nuit, il rallie à lui les soldats de celui-ci, le contraignant à quitter l’île. Kerverseau ne se fait pas prier : il demandait depuis longtemps à rentrer en France, et si la méthode est peu orthodoxe, il n’en rate pas l’occasion pour autant. De retour en France, il couvrira même les agissements de son collègue …

Sarrazin obtient de rentrer en France après une grave crise de fièvre qui le laissera officiellement mort. Lorsqu’il reçoit l’autorisation d’embarquer pour Cuba, d’où il rejoindra l’Europe, il abandonne avec tant de précipitation son commandement de Port-au-Prince au général Lavalette du Verdier que beaucoup l’accuseront plus tard de désertion. Quant aux généraux Dutruy, Amey et Poinsot, les deux derniers ne font qu’un très bref séjour dans l’île, sans occuper de commandement, avant de rentrer en France. Poinsot n’y reste même pas un mois ! Dutruy pour sa part y séjourne près d’un an, mais ne semble pas non plus avoir occupé de postes indépendants. Lacroix demande à rentrer en France peu après le fameux raid de Capois contre la Tortue : il a perdu en cette occasion son jeune frère et toute la fortune qu’il avait accumulée depuis son arrivée. Démoralisé, dégoûté par la barbarie de cette guerre, il obtient de s’embarquer pour l’Europe à la fin de mai 1803. Thouvenot est, on l’a vu 466 , renvoyé avec le général Clauzel pour les mêmes motifs que ce dernier. Quant à (Pierre) Devaux 467 , peu après avoir obtenu ses galons de général, il quitte la colonie par opposition à la ré-instauration de l’esclavage qui se profilait.

Le départ de Gobert à la Guadeloupe présente des similitudes avec celui de Kerveseau à Santo Domingo. Lieutenant de Richepance, Gobert était en droit de réclamer pour lui le titre de capitaine général à la mort de son chef, mais Lacrosse s’autoproclama très vite à ce poste. Gobert ne semble pas avoir fait de difficulté, restant à sa place. Mais le nouveau capitaine général souhaite le voir éloigner au plus vite, aussi accepte-t-il immédiatement lorsque Gobert demande à retourner en France 468 . Il le pousse même à s’embarquer lorsque celui-ci, piqué au vif par des sous-entendus sur son sens du devoir émanant de Lacrosse (« si les craintes que vous semblez concevoir sur l’état actuel de votre santé sont jugées par vous plus puissantes que les raisons d’utilité de service que je suppose, je ne refuserai pas à votre départ pour la France » 469 ), souhaite finalement rester. Ménard est promu général par Lacrosse pour remplacer Gobert à la tête des troupes de l’armée de la Guadeloupe. Le capitaine général espère que cet officier qui lui doit sa promotion sera plus docile : il n’en est rien. Ménard s’insurge dès novembre 1802, deux mois à peine après sa promotion, contre les méthodes de Lacrosse : celui-ci le fait rien moins qu’« arrêter et embarquer d’office pour la France [avec] plusieurs officiers : la crise menaçait de tourner, encore une fois, à l’état aigu. Heureusement, le gouvernement de la métropole y mit fin en rappelant Lacrosse, qui fut remplacé par le général de division Ernouf » 470 .

Les adjudants-commandants, très nombreux à l’entrée en campagne car cherchant à gagner l’épaulette de général de brigade dont ils ont souvent la fonction sans le titre, ont généralement été exaucés ou tués, car ils sont peu nombreux à rentrer en France : (Urbain) Devaux, Idlinger, Villet, Ramel, David, Musquinet de Beaupré et (H.) Reynaud à l’armée de Saint-Domingue ; Reubell et Dugommier-Dangemont à la Guadeloupe.

Idlinger est renvoyé par Rochambeau car ayant été trop proche de Toussaint-Louverture sous les ordres de qui il a servi ; Musquinet de Beaupré est évacué à la mort de son neveu, le capitaine général Leclerc ; (H.) Reynaud, agent spécial du premier Consul, rentre en France une fois sa mission accomplie ; (Urbain) Devaux quitte Santo Domingo en janvier 1804 lorsque Ferrand organise sa petite armée ; David arrache un congé au capitaine général deux semaines avant la capitulation, ce qui lui permet d’échapper aux geôles britanniques ; Ramel est évacué sur blessure, quand Dugommier-Dangemont l’est sans doute pour une nouvelle crise de folie puisqu’il est de nouveau interné peu après son retour en France.

Un grand nombre de chefs de brigade rentre en France avant la fin de la colonie. Pour beaucoup, il s’agit d’anciens commandants ou même de capitaines ayant obtenu les galons qu’ils étaient venus chercher : Allix de Vaux, Lalance 471 , Drouin de Bercy 472 , Touzard, Langlet, Bachelu, Bourke, Abbé, (C., dit « Jeune ») Boyer, (Pierre) Aussenac, Dalton, Bruguières, Lallemand de l’armée de Saint-Domingue ; Dumoutier, Naverres, Cambriels et Arnauld à la Guadeloupe.

Allix de Vaux est arrêté sur plainte de malversations financières, mais déchargé de toute accusation et libéré, il demande à rentrer en France, ce qui lui est accordé. A-t-il négocié son blanchiment contre une « donation » au trésor de Rochambeau, ou bien ce procès était-il un avertissement pour l’inviter à quitter l’île ? Il ne serait pas le premier pour qui le renvoi pour malversations ne soit qu’une façade …

Lalance, ancien compagnon de Bonaparte à Toulon et en Italie est renvoyé en France après la mort de Leclerc, avec les officiers « sensibles », c'est-à-dire proches des grandes familles politiques et militaires ou leurs aides de camp, comme c’est le cas pour Bachelu, Bourke, Abbé, Dalton ou Bruguières.

Drouin de Bercy, colon entré dans l’armée expéditionnaire directement comme chef de brigade dans l’état-major de Leclerc, retourne en France après la mort de Leclerc, se préoccupant plus de la manière de lutter contre la fièvre jaune que contre les insurgés. Toutefois, il sera à la Restauration l’un des ardents partisans de la reconquête militaire de l’île 473 .

Leclerc renvoie Langlet dès le 9 mai 1802 : « Je renvoie le chef de brigade Langlet, non pas que je sois mécontent de lui, mais parce que ce brave, eut égard à son grand âge, est véritablement incapable de supporter les fatigues du climat. Je vous prie de bien traiter ce militaire respectable qui compte de longs services » 474 .

Lallemand est renvoyé suite à la conspiration contre Rochambeau. Quant à Touzard et C. Boyer, la raison de leur retour m’est inconnue …

A la Guadeloupe, Dumoutier rentre en France pour raison de santé. Presque infirme, il n’était passé à la Guadeloupe que pour accompagner sa femme venue retrouver sa mère, et avait fait la démonstration pendant la répression de l’insurrection d’Ignace et Delgrès de sa totale incapacité à assumer un commandement.

Naverres est renvoyé en France comme porteur des dépêches du capitaine général Ernouf, rôle qu’il avait déjà tenu entre Saint-Domingue et cette île.

Cambriels, démis de ses fonctions par ce même Ernouf pour avoir échoué dans un raid contre Sainte-Anne en 1808, est renvoyé en France en juillet 1809 pour y être jugé. Prit en route par les Anglais, il obtient de rentrer en France sur parole, et se défend alors à son procès des charges portées contre lui. Blanchi, il obtient le commandement du 31e de ligne …

Quant à Arnauld, il repasse en métropole à sa demande peu après le remplacement de Lacrosse par Ernouf : faut-il y voir une marque de fidélité à son ancien chef, ou de défiance à l’égard de son successeur ? Colon martiniquais, grand ami de Rochambeau qu’il regrette de ne plus voir à la tête de la Guadeloupe, ayant suivi Lacrosse lors de son exil à la Dominique, on peut raisonnablement penser qu’Arnauld approuvait pleinement la ligne « dure » de l’amiral …

Notes
424.

Leclerc à Decrès, 6 juillet 1802, Lettres du général Leclerc n°91

425.

Leclerc à Decrès, 20 août 1802, Lettres du général Leclerc n°118

426.

cf. Infra, p.142

427.

Beaubrun-Ardouin, Op. Cit., p.342

428.

Leclerc à Decrès, 13 septembre 1802, Lettres du général Leclerc n°127

429.

Leclerc à Decrès, 16 septembre 1802, Lettres du général Leclerc n°129

430.

« Rapport fait au gouvernement par le général Pierre Devaux, chef d’état-major de l’armée sur les évènement survenus à Saint-Domingue depuis le mois de Messidor an X de la République », cité in Boyer, Op. Cit., p.72-73

431.

Leclerc à Decrès, 26 septembre 1802, Lettres du général Leclerc n°135

432.

Six (Georges), Dictionnaire des généraux et amiraux de la Révolution et de l’Empire(1792-1814), tome 1, Paris, Georges Saffroy, 1934, p.13

433.

Humbert à Leclerc, 14 février 1802, cité in Baeyens (Jacques), Sabre au clair : Amable Humbert, général de la République, Paris, 1981, Ed. Albatros, encart central.

434.

Leclerc à Decrès, 15 février 1802, Lettres du général Leclerc n°24

435.

Leclerc à Napoléon, 17 février 1802, Lettres du général Leclerc n°28

436.

Humbert à Leclerc, 23 février 1802, cité in Baeyens, Op. Cit., p.93

437.

Leclerc à Napoléon, 5 mars 1802, Lettres du général Leclerc n°38

438.

Humbert à Leclerc, 5 mars 1802, cité in Baeyens, Op. Cit., encart central

439.

Grandet à Clauzel, s. d. (env. 30 juillet), cité in Baeyens, Op. Cit., p.99

440.

Brunet à Leclerc, 24 août 1802, S.H.A.T., B76

441.

Thouvenot à Clauzel, 13 août 1802, S.H.A.T., B76

442.

Thouvenot à Humbert, 13 août 1802, S.H.A.T., B76

443.

Thouvenot à Delion, 14 août 1802, cité in Baeyens, Op. Cit., p.100

444.

Thouvenot à Humbert, 15 août 1802, S.H.A.T., B76

445.

Brunet à Leclerc, 24 août 1802, S.H.A.T., B76

446.

Thouvenot à Humbert, 7 septembre 1802, cité in Baeyens, Op. Cit., p.100

447.

Brunet à Humbert, 17 septembre 1802, cité in Baeyens, Op. Cit., p.101

448.

Leclerc à Napoléon, 7 octobre 1802, Lettres du général Leclerc n°145

449.

Parnageon à Thouvenot, 23 août 1802, S.H.A.T., B76

450.

Boyer à Decrès, 20 octobre 1802, cité in Baeyens, Op. Cit., p.104

451.

Heitz (Louis), Le général Salme (1766-1811), Paris, Henri Charles Lavauzelle, 1896, 184 pages.

452.

Ibid, p.145

453.

Leclerc à Decrès, 9 mars 1802, cité in « Rapport fait par le ministre de la Marine et des Colonies aux consuls de la République », B.N.F.

454.

Salme au capitaine Paul, 8 avril 1802, Rochambeau’s papers n°210

455.

Leclerc à Salme, 27 avril 1802, S.H.A.T., B73

456.

Leclerc à Christophe, 28 avril 1802, cité in Bouvet de Cressé, Op. Cit., p.120

457.

Salme à Humbert, 4 & 5 mai 1802, S.H.A.T., B76

458.

Dampierre à Thouvenot, 10 mai 1802, S.H.A.T., B76

459.

Leclerc à Napoléon, 13 mai 1802, S.H.A.T., 8.YD.469 (dossier Salme)

460.

Leclerc à Napoléon, 11 juin 1802, Lettres du général Leclerc n°80

461.

Decrès à Berthier, 13 juillet 1802, S.H.A.T., 8.YD.469 (dossier Salme)

462.

Salme à Berthier, 16 juillet 1802, S.H.A.T., 8.YD.469 (dossier Salme)

463.

Salme à Berthier, 19 juillet 1802, S.H.A.T., 8.YD.469 (dossier Salme)

464.

Salme à Berthier, 6 octobre 1802, S.H.A.T., 8.YD.469 (dossier Salme)

465.

Général de brigade, mais surtout … chef de l’administration des hôpitaux !

466.

cf. Infra, p.143-146

467.

cf. Infra, p.140-141

468.

Gobert à Lacrosse, 4 septembre 1802, cité in 1802 en Guadeloupe …, Op. Cit., p.29

469.

Lacrosse à Gobert, 4 septembre 1802, Ibid

470.

Poyen, Op. Cit., p.260

471.

Général de brigade d’artillerie au service de la République Cisalpine. Mais le bureau de l’Artillerie à Paris ne le replace que comme capitaine à son retour (1800) au service français. Napoléon l’élève rapidement de nouveau chef de brigade, et l’affecte à l’expédition de Saint-Domingue poour lui permettre de récupérer ses épaulettes de général : « Le citoyen Lalance, ex-général de brigade cisalpin, sera employé dans l’armée de Saint-Domingue, comme chef de brigade directeur du parc. Le général Leclerc lui donnera de l’avancement s’il s’en rend digne », Napoléon à Berthier, 30 octobre 1801, Napoléon Bonaparte. Correspondance général n°6620

472.

Ne pas confondre avec le chef de brigade Drouin, commandant la Légion de la Loire.

473.

Drouin de Bercy (M.), De Saint-Domingue, de ses guerres, de ses ressources et des moyens à prendre pour y rétablir la paix et l’industrie, Paris, Hoquet, 1814.

474.

Leclerc à Berthier, 9 mai 1802, Lettres du général Leclerc n°62