Section 2. L’analyse économétrique de la relation transport/économie

Des modèles associant les dimensions de génération et de distribution des flux de transport sont parfois utilisés pour prévoir la demande de transport de marchandises à long terme. Ces modèles permettent d’estimer des flux de transport spatialisés. Pour prévoir les volumes de transport de marchandises à long terme, ces modèles sont plus ou moins explicitement contraints d’estimer qu’il existe une relation entre l’évolution de la demande de transport de marchandises et l’activité économique. Cette relation est, plus généralement, au cœur des fonctions économétriques de demande de transport de marchandises. L’objet de la présente section consiste à présenter un ensemble de techniques économétriques utilisées pour estimer la sensibilité (ou l’élasticité) de la demande de transport de marchandises par rapport au PIB.

La relation entre la demande de transport de marchandises et l’activité économique repose cependant sur aucun fondement théorique de type microéconomique. Ce constat pourrait porter certains à réprouver l’estimation de cette relation. En pratique, de nombreuses évidences empiriques justifient cette relation.

Une illustration inattendue de cette relation est par exemple offerte par un modèle séminal de l’analyse technique en finance : la théorie de Dow (Dow theory). Le père de cette théorie, Charles H. Dow (1851-1902), est un journaliste américain 2 dont le nom est resté à la postérité pour avoir créé, avec son associé Edwards Jones, un indice synthétique d’évolution des marchés financiers (l’indice Dow-Jones). A l’origine, l’indice de Dow, le Dow-Jones industrial index, était déterminé à partir du cours des douze principales entreprises industrielles américaines. Il est moins connu que, parallèlement à cet indice, Dow propose, un second indice : le Dow-Jones transportation index, déterminé à partir des cours d’une dizaine d’entreprises liées au secteur des transports (essentiellement ferroviaires). Une des principales propositions de la théorie de Dow énonce alors que l’indice de Dow-Jones industriel et l’indice de Dow-Jones des transports sont des indices synthétiques de la conjoncture économique. Dans un ouvrage de référence sur la théorie de Dow récemment réédité, cette proposition est formulée comme suit :

The fluctuations of the daily closing prices of the Dow-Jones rail and industrial averages afford a composite index of all the hopes, disappointments, and knowledge of everyone who knows anything of financial matters, and for that reason the effects of coming events (excluding acts of Gods) are always properly discounted in their movements. The averages quickly appraise such calamities as fires and earthquakes 3 (Rhea, 2002, p.19).’

Cet exemple étonnant souligne l’évidence de la relation entre la conjoncture industrielle et la demande de transport. Il s’agit d’une relation structurelle entre des variables agrégées que l’on pourrait également qualifier de relation macroéconomique.

De nombreuses techniques économétriques ont été employées dans la littérature pour estimer cette relation. La présente section distingue deux types d’approche.

Une première sous-partie présente les modèles économétriques utilisant les techniques économétriques standards. Les méthodes économétriques les plus élémentaires sont alors employées pour estimer cette relation. Parmi ces modèles, le modèle double-logarithmique est le plus couramment utilisé. Ce modèle a toutefois été critiqué par certains chercheurs selon lesquels il est plus pertinent d’estimer cette relation en introduisant l’hypothèse d’une élasticité variable et non celle d’une élasticité constante. Une seconde sous-section souligne ensuite le renouveau de la littérature offert par l’application de nouvelles techniques d’estimation issues de l’économétrie des séries temporelles .

Notes
2.

C. Dow fut le co-fondateur du Wall Street Journal et de la société d’information financière Dow Jones & Co.

3.

Les fluctuations quotidiennes des cours à la clôture des indices de Dow ferroviaire et industriel offrent un indice composite de tous les espoirs, déceptions et connaissances de quiconque connaît les marchés financiers, et, pour cette raison, les effets des événements futurs (à l’exception des interventions divines) sont toujours correctement prévus dans leur mouvement. Les moyennes évaluent rapidement l’effet de calamités telles que les incendies ou les tremblements de terre.