Le modèle proposé est directement influencé par les modèles décomposant la problématique du couplage. Il s’inspire plus particulièrement des modèles d’influence européenne en retenant une acception stricte du couplage, à savoir la relation entre la demande de transport de marchandises et le PIB, par opposition aux modèles d’influence nord-américaine.
Comme la partie qui précède l’a montré, l’intensité de transport de marchandises est un indicateur souvent utilisé pour mesurer le couplage en économie des transports. Cet indicateur correspond au ratio entre le nombre de tonnes-kilomètres observées dans un pays et la valeur du PIB de celui-ci. D’autres variables peuvent toutefois être utilisées et venir se substituer à la tonne-kilomètre comme le montrent les articles de Stead (2001) ou de Banister et Stead (2002).
Des variables alternatives peuvent donc être utilisées. Par exemple, l’utilisation des volumes de CO2 émis par le secteur des transports permet d’estimer un indicateur qu’il est possible de désigner comme l’intensité des émissions de CO2 du transport. Le transport routier étant le principal responsable des émissions de GES, l’intensité de trafic routier de marchandises peut être entendue comme le ratio entre le nombre de véhicules-kilomètres et le PIB. L’utilisation de tels ratios est néanmoins incertaine car il existe peu de bases de données présentant les variables nécessaires à leur estimation (émissions de CO2 dues au secteur du transport routier de marchandises, véhicules-kilomètres du transport routier de marchandises).
La Figure 8 reproduit l’évolution de l’intensité de transport routier de marchandises en Europe pour un panel de neuf pays de l’Union Européenne entre 1982 et 1998. Il est possible d’observer que, pour la quasi-totalité des pays de l’échantillon, l’intensité de transport routier de marchandises est stable ou croissante. Le seul pays en situation de découplage apparent serait l’Espagne pour lequel il convient toutefois de remarquer la taille plus réduite de la période d’étude.
Parmi ces pays, il est possible de distinguer des pays en situation de couplage fort et des pays en situation de couplage faible. Les pays en situation de couplage fort sont les pays pour lesquels l’intensité de transport routier de marchandises a le plus augmenté. Se trouvent, parmi ces pays, la Grèce, la France ou l’Allemagne 8 . Ces pays correspondent à des cas de découplage négatif expansif pour reprendre la typologie de Tapio (2005). Parallèlement à ceux-ci, il existe des situations pour lesquelles l’intensité de transport routier de marchandises est constante au cours du temps. Ces situations correspondent à des cas de couplage faible. Sont dans cette situation la Grande-Bretagne, les Pays-Bas ou encore le Danemark.
Sources : Eurostat (2002), Heston et al. (2002).
En suivant l’équation (5), l’intensité de transport routier peut se décomposer en quatre facteurs selon l’identité mathématique suivante :
L’équation (6) s’interprète donc ainsi
L’intensité de transport routier de marchandises est donc décomposée en quatre facteurs. Ces facteurs correspondent à différents niveaux de couplage ou de découplage. Les facteurs mis en avant par cette décomposition sont relativement proches de ceux qui se retrouvent dans la littérature. L’originalité de cette décomposition par rapport à la littérature consiste en l’introduction d’un facteur relatif à la part de l’industrie dans le PIB. L’introduction de ce facteur se justifie par le moindre rôle des activités de service dans la génération de transport de marchandises. L’autre avantage de cette décomposition est sa simplicité puisque les quatre facteurs isolés représentent des variables dont le sens est clairement identifiable.
Une identité mathématique permet donc d’isoler quatre facteurs de couplage ou découplage à partir de l’intensité de transport routier de marchandises. L’objet de la section qui suit est de proposer une analyse empirique des facteurs de couplage ou de découplage qui viennent d’être identifiés. Cette analyse se distingue de ce qui a été fait dans la littérature car elle est la première à recourir à l’analyse économétrique pour estimer les facteurs de couplage ou de découplage.
L’Allemagne est un cas toutefois particulier car la période d’étude recouvre la réunification de ce pays.