Section 1. Estimation du modèle en taux de croissance

Le modèle à élasticité variable n’est pas le modèle le plus fréquemment utilisé pour estimer la relation entre la demande de transport et la production. Ce modèle offre pourtant a priori plus de garanties que le modèle double-logarithmique du point de vue de sa cohérence économétrique ou de sa pertinence. Dans la présente section, le modèle est estimé pour expliquer l’évolution de la demande de transport de marchandises à travers les Alpes.

Les estimations qui suivent distinguent trois types de demande de transport de marchandises. Les caractéristiques de ces flux de transport de marchandises sont présentées en annexe (Annexe 4). Il est néanmoins possible de brièvement décrire ces flux de transport transalpin :

  1. Le premier type de demande de transport transalpin considéré (notée n) est la demande de transport de marchandises en transit à travers l’Autriche, la Suisse et le Nord des Alpes françaises. En termes de volumes, il s’agit du principal type de demande de transport de marchandises à travers les Alpes. La distribution géographique de ces flux de transport varie selon les passages transalpins. Par exemple, l’Allemagne est le pays d’origine ou de destination de la majorité des flux de transit observés au Brenner ou en Suisse, alors que le transport de transit avec les pays du Bénélux ou les îles britanniques est majoritaire dans le Nord des Alpes françaises.
  2. Le second type de demande de transport transalpin considéré est la demande de transport de marchandises en échange bilatéral entre la France et l’Italie (notée f). Cette demande de transport de marchandises concerne les passages du Nord des Alpes et le passage littoral de Vintimille. Le choix d’un itinéraire plutôt que d’un autre est essentiellement déterminé par la région d’origine ou de destination des flux en France. Les flux de transport à Vintimille concernent quasi-exclusivement des régions du Sud de la France (Méditerranée et Sud-Ouest, pour reprendre les dénominations des zones NUTS1) alors que les flux de transport à travers le Nord des Alpes françaises concernent le reste de la France.
  3. Enfin, le dernier type de demande de transport transalpin considéré est la demande de transport de marchandises en transit au passage littoral de Vintimille (notée p). Il s’agit pour l’essentiel (98%) de flux de transport de marchandises en provenance ou à destination de la péninsule ibérique.

La base de données Alpinfo (2006) retrace l’évolution de la demande agrégée de transport de marchandises à travers les Alpes pour ces trois types de demande de transport de marchandises entre 1984 et 2005 sur la base d’une donne annuelle. Cette base de données est constituée par le ministère suisse des transports en rassemblant des données statistiques recueillies par les ministères des transports autrichien, suisse et français. Elle distingue la demande de transport de transit et la demande de transport d’échange et considère, pour le transport routier de marchandises, deux dimensions de la demande de transport avec les volumes (tonnes) et les trafics (véhicules). Dans ce qui suit, la demande de transport retenue est le volume de transport de marchandises. Les limites de cette base de données sont précisées dans une présentation de la donne annexée au présent travail (Annexe 1).

Trois éléments incitent à utiliser cette donne avec prudence. D’abord, il n’existe pas de méthodologie unique dans le recueil des données puisqu’elles sont recueillies, indépendamment, par les ministères des transports de chaque pays. Ensuite, il existe des trous dans les séries temporelles, concernant la demande de transport ferroviaire de marchandises en transit au passage du Brenner. Le transit ferroviaire au Brenner est, pour cette raison, ignoré pour constituer une série temporelle continue de 1984 à 2005. Enfin, la méthode utilisée pour distinguer le transport de transit du transport d’échange pose problème. La répartition entre le transport de transit et le transport d’échange repose en effet sur des enquêtes réalisées tous les cinq ans. Dans certains cas, il est alors possible d’observer la répartition entre transit et échange se reproduire d’années en années avant de brusquement changer suite à ces enquêtes.

La donne macoréconomique italienne est constituée à partir d’une base de données de l’Istituto nazionale di statistica (ISTAT, 2006). Pour la production économique, la variable retenue est le produit intérieur brut italien à valeur constante, prix de base 2000. Pour la production industrielle, la variable retenue est la valeur ajoutée de l’industrie au sens strict, c’est-à-dire sans le secteur de la construction. Le transport de denrées agricoles représentant des volumes non négligeables à travers les Alpes 13 , la valeur ajoutée de l’activité agricole, piscicole et sylvicole est jointe à la valeur ajoutée de l’industrie. Par commodité, le terme valeur ajoutée industrielle (VAI) sera utilisé dans ce qui suit pour qualifier la somme de la VA industrielle et de la VA agricole italienne. Par ailleurs, la VAI italienne est prise en valeur constante (prix de base 2000).

Un modèle à élasticité variable est estimé à partir de cette donne. La faible significativité du modèle en taux de croissance annuel (I) incite à estimer un modèle de moyen terme (II) utilisant des variables lissées. Si la significativité de ce modèle est plus satisfaisante, le lissage des variables provoque un biais d’auto-corrélation des erreurs (III).

Notes
13.

Par exemple, le transport de denréesagricoles représente près de quinze pour-cent des volumes de transport de marchandises traversant les passages franco-italiens en 1999 (CETE Méditerranée, 2000).