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Je tiens à exprimer mes remerciements à :
Monsieur le professeur Portalier pour la bienveillance avec laquelle il m’a accueillie et intégrée au sein de son équipe de recherche, Perception Cognition et Handicap. Son soutien et son accompagnement rigoureux, son expérience clinique ont nourri ma réflexion et organisé ma pensée. Pour tout cela, je lui exprime ma gratitude.
Madame le professeur Régine Scelles qui me fait l’honneur d’être rapporteur de cette thèse. Je lui suis reconnaissante de l’intérêt qu’elle porte à son sujet. La richesse de ses travaux, sa clinique et sa rigueur scientifique m’éclairent tout particulièrement.
Monsieur le professeur René Pry qui me fait l’honneur d’être rapporteur de cette thèse. L’importance de ses travaux m’a guidée dans ma recherche comme un modèle d’approche sur les émotions chez les enfants autistes.
Je tiens à remercier Monsieur le professeur Jacques Cosnier qui a accepté de participer à ce jury, ce qui représente pour moi un honneur pour l’inspiration majeure que sa pensée a suscitée.
Monsieur François VITAL-DURAND pour sa gentillesse et son écoute attentive sur les problèmes de handicap, en reconnaissance de sa compétence et de son travail clinique sur les bébés handicapés et leurs familles.
Monsieur Jacques Aupetit pour sa disponibilité et son aide méthodologique, comme autant d’apports précieux à la réalisation de ce travail.
Je remercie la direction de l’IME Les Sittelles de l ‘ADAPEI du Rhône ainsi que la direction de l’IME de l’association HANDAS à Villeurbanne pour avoir permis de réaliser ce travail en toute confiance.
J’adresse une pensée particulièrement reconnaissante aux familles et professionnels, touchée par l’accueil qu’ils ont pu faire à mon questionnement ainsi qu’à l’authenticité de leur participation.
Enfin et surtout, je n’oublie pas ici les enfants qui m’ont émue par leur sensibilité étrange et leur façon de communiquer. Ils sont au centre de ce travail.
Les effets émotionnels qu’entraîne l’arrivée d’un enfant polyhandicapé dans sa famille, auprès des professionnels et des familiers de son environnement, sont peu étudiés. Cette recherche, conduite auprès de parents et de professionnels de deux institutions accueillant des enfants polyhandicapés, tente de mettre en exergue les compétences affectives et relationnelles des partenaires de la relation. Chez ces enfants non verbaux, considérés à partir de leur âge de développement, la communication empathique est perturbée mais jamais absente.
Pour mener cette investigation, le dessin du visage, l'analyse du discours des parents et des professionnels et l’utilisation d’un questionnaire adapté ont permis de révéler des particularités communicologiques et affectives propres à ces enfants.
Des composantes de compréhension sont mises en relief à partir de deux voies de communication non verbale : l’échange des signaux et le partage des ressentis.
La recherche met en évidence que les signaux kinésiques et les signaux sonores sont plus informatifs que les signaux faciaux dans un ensemble cependant déroutant, marqué par la déliaison. L’implication des familiers est très importante, par une dépendance émotionnelle active qui prend la forme d’une compétence communicative primaire. L’intensité des échanges premiers réciproques, faits de résonance et de mimétisme, s’organise dans un langage privé proto empathique de psychisme à psychisme. Les parents et les soignants ont des approches différentes de compréhension des émotions, en termes d’adaptation au lexique émotionnel de l’enfant. La capacité des mères à partager et à ressentir les états émotionnels de l'enfant est supérieure à celle des soignants. L'analyse du discours confirme la subjectivité des deux groupes et une forte intensité dans le ressenti.
Comprendre et se faire comprendre avec un enfant polyhandicapé sont plus liés à la chaîne des échanges qu’à la seule expression indépendante. Le feed-back informatif fourni par les réactions émotionnelles des familiers, selon le postulat empathique, est riche d’enseignement sur les compétences relationnelles des partenaires qui entourent l’enfant. Ces travaux fournissent un appui à la compréhension des états émotionnels partagés et pourraient permettre une valorisation des fonctions parentales ainsi que celles des professionnels pour une meilleure qualité de vie de l’enfant polyhandicapé.
Mots-clés : enfant polyhandicapé, parent d’enfant polyhandicapé, professionnel du handicap, émotion, communication, empathie, déliaison.
Little previous research has explored the emotional effects that the birth of a disabled child may have on the family circle and on the professionals working with the child. The present study of parents and professionals in two institutions for disabled children aims to explore the emotional and relational competences of both partners in child – adult interactions. Due to their developmental age and disabilities, the children in the study were unable to communicate through speech, and their emotional communication was disturbed but never nonexistent.
For this study, a face drawing task, discourse analysis of parents and professionals and a specialised questionnaire revealed some distinctive features in the emotional communication of these children. Two aspects of non-verbal communication appear to be the main elements in shared comprehension: exchange of signals and shared feelings
This study highlights the fact that kinetic and sonic signals relay more information than facial signals, in an interactive context marked with unbinding. Family members appear particularly implicated in the relationship, displaying an active emotional dependence which can be seen as a primary communicative competence. The intensity of these early interactions, marked with echo and imitation, is organised in a unique emotional language from mind to mind. Parents and professional caregivers approach these differently in terms of emotions, understanding and adaptation to the child’s emotional vocabulary. Mothers showed a superior ability to feel and share the child’s emotional states, compared to professional carers. The discourse analysis confirms this difference, revealing a high intensity of emotional feelings.
Understanding and making oneself understood with a disabled child seems to depend more upon a chain of emotional exchanges, than to an expression in itself. The informative feedback given by emotional reactions within a family, from an empathic point of view, reveals certain interactive competences of those familiar with the disabled child. These observations help to understand the shared emotional states in the interactions between adults and disabled children and could lead to a greater appreciation of parenting practices as well as caregiver’s skills, for an improvement in the quality of life of the disabled child.
Keywords: child, multiple handicap, parent, professional, emotion, communication, empathy, unbinding .
Etre en relation avec des enfants polyhandicapés pose de fait une interrogation : Comment entrer en communication avec ces enfants, c’est-à-dire comment les comprendre et se faire comprendre d’eux ? Rapidement, après les premiers contacts, on mesure l’intensité émotionnelle dans les échanges, émotions qu’ils expriment d’une façon désordonnée dans une kinesthésie maladroite mais aussi émotions qu’ils font naître dans cette rencontre étrange.
Les partenaires proches de l’enfant, parents et professionnels, impliqués dans une forme d’interdépendance émotionnelle active, établissent des liens particuliers qui vont se développer dans un domaine spécifique, éloigné du référencement social : un langage privé.
C’est bien autour de la relation non verbale, le rapport entre le non verbal et le corporel que la compréhension va s’organiser dans un double mouvement, comprendre et se faire comprendre, avec un partage émotionnel. Ce partage se réalise en fonction d’une capacité empathique, de la fonction d’imitation et des identifications.
Nous avons donc interrogé, de la place où ils se trouvent dans le processus de communication, les parents et les professionnels d’une première institution lyonnaise sur ce qu’ils pensent pouvoir décoder et percevoir du monde émotionnel de l’enfant, en les interrogeant sur six émotions de base.
Les entretiens ont été enrichis d’un recueil projectif des perceptions de formes à compléter, dessinées, d’expressions faciales perçues. Se projeter en dessinant renvoie au modèle effecteur des émotions qui introduit le ressenti comme organisateur du partage émotionnel. Nous avons dès lors construit un questionnaire sur l’identification des émotions et leressenti présenté auprès de parents et professionnels d’une autre institution lyonnaise pour conforter cette approche de la compréhension des émotions d’enfants très perturbés.