2. 1. 2. 1. Les bases corporelles de l’empathie

L’expression et la reconnaissance des émotions sont sous-tendues par un ensemble de circuits neuronaux distribués au sein du cortex et des régions sous-corticales, incluant l’amygdale et le cortex temporal. Notre capacité de comprendre les émotions et les sentiments des autres en relation avec soi est un aspect fondamental de nos échanges sociaux, basé sur l’intersubjectivité. Nous pouvons imaginer le monde subjectif de l’autre en se mettant à sa place et réagir de manière appropriée. Ainsi l’empathie repose sur un partage affectif avec l’autre. Par exemple, nous pouvons utiliser l’expression émotionnelle d’une autre personne pour évaluer une situation à laquelle nous sommes exposés.

La résonance s’applique au domaine des émotions et il a été démontré que la perception de certaines expressions émotionnelles déclenche des représentations motrices qui sont responsables de leur génération. Cette résonance motrice s’organise de façon somatique car les zones du cortex pré moteur qui s’activent à la vue d’une action exécutée par autrui sont celles qui sont responsables d’une action réelle.

Des circuits neurologiques prédisposent à l’empathie. Des chercheurs (Rizzolatti, Fogassi et Gallese 1995) ont établi que des régions cérébrales, comme les cortex préfrontaux pré moteurs, émettent des signaux aux régions du cerveau sensibles au corps, ainsi que l’existence de neurones qui représentent dans le cerveau les mouvements que le cerveau voit dans un autre individu. Ces neurones sont présents dans le cortex frontal des singes et des humains. On les appelle « neurones miroirs ». Ces données neurophysiologiques montrent que le cerveau de l’observateur présente des activités analogues à celles qu’il aurait s’il réalisait l’action (Jeannerod, 1994) lorsque l’activité a un sens et qu’elle peut être identifiée.

Le modèle des cartes corporelles développé par Damasio (2003) indique que le cerveau établit des cartes motrices et sensorielles fondées non par la réalité actuelle de son propre corps, mais de celui de l’autre. Ce canal de communication peut servir de source à des affects analogues à ceux du partenaire. Cette découverte des neurones miroirs, situés à côté de des neurones moteurs fournit des mécanismes neurobiologiques pour la compréhension d’établir des lectures des états d’esprit d’autrui, de ressentir en écho ses émotions, donc de pouvoir établir un contact intersubjectif. Sur ce type de données, Damasio (1995) démontre que la compréhension des émotions exprimées par autrui nécessiterait une forme de simulation qui utiliserait des mécanismes neurophysiologiques communs à la production de ces émotions.

Cela peut s’accorder avec les idées de « corporéisation » de Cosnieret de « marqueurs somatiques » de Damasio sous-tendues par une cohérence entre la coordination du corps et de l’esprit. Bien entendu, des expériences négatives peuvent avoir des effets à long terme et être la cause de dysfonctionnements comportementaux ce qui peut donner du sens aux difficultés sociales de compréhension lorsqu’on sait que tout contact intersubjectif est médiatisé par le corps.

Le concept d’activation, mis en évidence par les physiologistes a pu représenter une mobilisation des psychologues autour de l’intérêt des émotions, avec un développement possible dans le domaine des motivations.

Avec la motivation et sa composante nécessairement affective, la voie de l’interaction est ouverte, comme début de la complexité.La recherche dans le domaine des émotions, longtemps caractérisée par la diversité et l’opposition de théories dualistes se recentre autour de modèles structuraux et on s’accorde à dire que les processus émotionnels font partie de systèmes complexes où ils entrent en interaction avec d’autres processus qui s’intègrent de façon dynamique, incluant la perception, la motivation et l’action.