2. 2. 1. L’influence de Descartes : la dualité entre le corps et la pensée 

Les théories de Descartes sur les émotions serviront de base à la psychologie jusqu’au vingtième siècle, jusqu’à ce que Freud apporte un autre angle de vue sur la question.

Pour Descartes (1649), les émotions se situent dans l’âme des hommes. Le corps et l’âme sont deux entités distinctes qui ne communiquent pas. Cette théorie dualiste imprégnera profondément la pensée occidentale sur le rapport entre corps et esprit. Le philosophe propose une liste des états émotionnels de base qu’il nommera « passions primitives  » : l’admiration, l’amour, la haine, le désir, la joie et la tristesse. Descartes amorce une vision cognitiviste de l’émotion.

Il observe tout d’abord que l’émotion infléchit le comportement car elle incite souvent à l’action. Ensuite, il constate que l’apparition du sentiment est précédée, en amont, d’une analyse cognitive de la situation. Il faut que le contexte ait un sens pour la personne avant qu’elle réagisse émotionnellement. La cognition et l’émotion sont liées.

Au-delà de cela, l’émotion aide à mieux nous comprendre puisqu’elle nous indique, indirectement les valeurs auxquelles nous sommes attachés. L’émotion doit être contrôlée par la raison pour ne pas influencer négativement le comportement de l’homme : C’est la théorie du libre-arbitre. Descartes se situe ainsi dans la lignée du stoïcisme.

Enfin, les émotions permettent de fixer le souvenir en mémoire. Cette dernière observation est très novatrice. Il compare les émotions à un torrent qui rompt une digue, alors que les passions, s’exerçant de manière plus continue, fonctionnent comme un fleuve qui creuse son lit.

Selon Spinoza, l’émotion est loin d’être reléguée dans le domaine de l’irrationnel. Il propose dans le livre de l’Ethique (1677), un parallélisme corps esprit, tout en privilégiant encore la corporéité des émotions. Il abandonne le terme anima, âme et lui substitue celui d’esprit, introduisant ainsi une nouvelle approche de la conscience. Il caractérise ainsi l’esprit comme activité de penser un objet, c’est-à-dire être conscient. Cette citation illustre ses hypothèses sur les origines corporelles de la psyché : « L’objet de l’idée constituant l’esprit humain est le corps et rien d’autre ».

C'est au dix-huitième siècle que les sciences humaines ont pris leur essor, avec différents courants de pensée, l'influence de l'école anglaise du siècle des Lumières et la psychologie subjective, expérientielle, introspective qui annonce la philosophie de Bergson.