3. 1. 2. Le sentiment

Pour Damasio (1999), il succède à l’émotion avec les pensées qui l’accompagnent. L’état de sentiment implique que l’organisme qui ressent soit conscient de l’émotion et du sentiment qui en découle. Le sentiment est tourné vers l’intérieur alors que l’émotion est tournée vers l’extérieur. Pour ressentir un sentiment, la conscience est indispensable. Comment qualifier ces états d’âme troublants et instables ? La part affective de notre être est subjective. Tenter de cerner le sentiment nous renvoie à la cause et son objet, mais beaucoup moins à son contenu. Ce dernier, selon Damasio traduit l’état vécu dans le langage de l’esprit. C’est une représentation du corps, à moment donné. Les contenus de sentiments sont des perceptions de soi. Le rapport à la douleur est lié à une perception du corps. La souffrance, le bonheur s’associent à des représentations, des pensées et à un vécu du corps, agréable ou non.

Le sentiment est une perception du corps déclenchée par un objet émotionnellement compétent, présent ou évoqué. Le stimulus objet ne nécessite pas forcément sa présence physique, mais peut garder sa valeur de déclenchement à son évocation sensorielle, un mot, une image, une odeur. . . Cette définition du sentiment nous fait penser à la notion de relation d’objet conceptualisée par la psychanalyse pour fixer l’empreinte et le souvenir des premiers émois et liens avec la mère ou son substitut, liés à la conscience de soi. Les sentiments, comme les émotions complexes peuvent être liés à une histoire, par exemple la jalousie. Dans la parole sur les sentiments se déploient des affects complexes et différenciés qui sous-tendent de nombreux états émotionnels contigus à la notion de sentiment : des désordres émotionnels, des traits émotionnels, des traits caractériels comme être hostile, par exemple, timoré. La parole subit « l’irrigation affective » selon la formule de Scherer (1986) mais elle la régule aussi ainsi qu’a pu le montrer Cosnier (1997).