4. 1. Du postural au lien, les bases psycho biologiques des états émotionnels : Un modèle de communication non verbale selon Wallon

Voie d’expression, voie de transmission, le corps d’autrui, par la participation affective de l’émotion, mettant en jeu la motricité et le mouvement, entre en résonance avec celui de l’interlocuteur. Dans le contexte ambiant, suivant les aspects dynamiques, il constitue un mode de connaissance et d’appréhension qui peut ensuite se combiner avec un système cognitif et rationnel.

Dans la conception de Wallon, les actes moteurs sont guidés par des rétroactions proprioceptives. La proprioception est un premier invariant du développement. Le deuxième invariant, l’action propre, la volonté de produire des mouvements volontaires apparaîtra dans le lien interpersonnel, vers le deuxième mois. La fonction humaine de l’émotion au niveau postural, d’abord biologique prend ensuite valeur d’échange et de culture.

Le système qui unit le tonus et les sensibilités proprioceptives et intéroceptives constitue la fonction posturale. Elle joue un rôle essentiel dans le développement psychique de l’enfant, une sorte de tronc commun d’où s’élaborent toutes les fonctions. La conception de la fonction posturale est la thèse fondamentale que défend Wallon dans « L’enfant turbulent ».

Elle a une fonction :

  • D’expression gestuelle, puis symbolique, tournée vers le monde intérieur immédiatement liée à la conscience de soi, corps et esprit en rapport avec l’entourage humain 
  • De transformation du monde en vue de le connaître et d’agir sur lui.

L’émotion s’inscrit dans un système de variations issues du biologique. L’émotion primitive constitue ce mouvement, de l’intérieur à l’extérieur, qui se régule par la rétroaction du milieu, de l’externe vers l’interne (feed-back). L’interaction se construit dans ces différents niveaux d’intégration des variations. Le psychisme en est le produit. Les facteurs environnementaux sont très importants et ont une influence reconnue sur l’expression et le développement émotionnels de l’enfant. Lorsque des connexions sont précocement lésées, il résulte des symptômes qui semblent associés à cette perte de l’intégrité de la régulation tonique. La catatonie peut en résulter ou au contraire des discontinuités spasmodiques, des symptômes mixtes d’attitudes explosives, de persistance toniques, d’impuissance à se dégager, des relâchements , des intermittences fonctionnelles. Sur le plan de l’expression le fait de grincer des dents, de relâcher les muscles de la bouche, d’avoir des explosions de rire incohérentes déroutent l’interlocuteur, attestent d’un malaise d’autant que ces attitudes se produisent souvent en présence d’autrui, justement par cette forme de pulsion interpersonnelle qui est innée. La complexité résulte de l’intrication entre le biologique, la régulation tonique et le psychique impliquant des degrés d’évolution différents. Le mouvement d’entrée dans le monde perceptif d’autrui permet de devenir sensible à tous les mouvements des affects qui se produisent en soi. Dans la mesure où le corps entre en résonance avec celui d’autrui, les affects induits déterminent des associations de l’ordre d’images ou d’idées qui s’exécutent non seulement en l’absence ou à l’insu, mais parfois en dépit de la conscience.

Ces mouvements vont participer, d’une part à la conscience d’un soi, au travers des changements de posture et de tonus, d’autre part à un partage des éprouvés subjectifs avec autrui, dans des mouvements rythmés. Dans ce schéma, les déliaisons pourraient se trouver dans la chaîne des variations.

Nous pouvons schématiser la conception de Wallon de ces processus qui mettent en jeu une coordination d’opérations à éléments très multiples dont certaines même psychiques.

La figure suivante a pour but de visualiser les différentes variations physiologiques qui s’étayent sur le biologique et participent, à la fois aux échanges entre l’intérieur du sujet, par la conscience d’un sentiment de soi et l’extérieur avec la perception d’autrui dont dépend ce sentiment de soi.

Figure. 3. Mouvements de l’émotion à partir des variations physiologiques et du tonus postural
Figure. 3. Mouvements de l’émotion à partir des variations physiologiques et du tonus postural

Ces mouvements vont participer, d’une part à la conscience d’un soi, au travers des changements de posture et de tonus, d’autre part à un partage des éprouvés subjectifs avec autrui, dans des mouvements rythmés. Dans ce schéma, les déliaisons pourraient se trouver dans la chaîne des variations.