4. 2. 2. Le modèle corporel et affectif de la transmission des émotions d’autrui : « l’analyseur corporel » de J. Cosnier

L’analyseur corporel pour Cosnier résulte de l’identification corporelle à l’autre, au cours d’une interaction, grâce à un processus d’échoïsation corporelle, la plupart du temps, non conscient. Cette reproduction du modèle effecteur induit un état affectif identique.

La théorie de l’« échoïsation corporelle » avancée par Cosnier (1994) suit le schéma de Wallon suivant trois niveaux d’élaboration :

Ces niveaux d’écho pourraient s’établir parallèlement aux stades émotionnels de Wallon

L’intériorisation de modèles affectivo-kinésiques est à la base de processus d’identification et ces modèles peuvent être réactualisés en certaines circonstances. Cette réactualisation se fait par la mémoire de « l’analyseur corporel » (Cosnier, 1994).

L’échoïsation est à la base de l’empathie et correspond à la mise en jeu de l’« analyseur corporel ». Le concept d’analyseur corporel signifie que chaque partenaire s’identifie corporellement à l’autre au cours de l’interaction par un processus d’échoïsation qui peut être manifeste mais qui reste souvent subliminaire. Dans la transmission, le corps de l’interlocuteur sert d’instrument de l’empathie. Le processus d’empathie permet la connaissance d’autrui. Il désigne le partage synchronique d’états psycho corporels, c’est-à-dire que, dans un même instant, les partenaires de l’interaction vivent et éprouvent un état semblable. Jacques Cosnierconçoit l’ontogenèse de l’ «analyseur corporel » sur les rapports de l’affectivité et du développement psychomoteur, dans la lignée des travaux de Wallon. Toutefois, il cite des auteurs plus contemporains : Trevarthen (1984) ; Stern (1985) ; Nadel (1986) et décrit trois étapes chronologiques, schématisées ainsi :

Il précise que l’adulte fonctionne plutôt sur le troisième mode, sans que les deux autres modes ne s’excluent. La dominance des deux premiers modes archaïque et primaire peut reprendre leur dominance en raison d’un contexte social, soit en raison de régression psychologique ou psychopathologique.

Pour illustrer cette possibilité, il évoque les échoïsations des adultes avec les jeunes enfants ainsi que les contagions de fou rire, de pleurs, les petits mouvements en miroir plus discrets. On pense aussi aux travaux de R. Girard (1972) sur le mimétisme, de S. Freudsur la contagion mentale dans les foules (1930).

Plus la relation avec l’autre est engagée, plus elle est fréquente, plus elle est intense et investie, plus l’échoïsation corporelle est importante (ce qui ne veut pas dire consciente) et potentiellement menaçante pour l’identité. Cette relation corporelle est majorée par la dépendance active mutuelle importante qu’on retrouve dans l’environnement de l’enfant handicapé mental et physique.