5. 1. La reconnaissance des expressions faciales 

Le visage humain se caractérise par une grande richesse expressive. La reconnaissance des visages est sans doute un processus fondamental de la cognition humaine. Dans cette perspective, un auteur comme Bruyer(1988) montre que le visage n’est pas un objet d’études mineur. Au contraire, le traitement de la reconnaissance des visages et de l’information faciale s’articule sur la perception, la mémoire, l’affectivité, la cognition. Selon les théories psycho évolutionnistes, son expressivité est mise à profit dans la communication émotionnelle. C’est donc un élément central dans les relations interpersonnelles et dans l’adoption des codes sociaux-culturels.

Bruyer cite plusieurs expériences réalisées pour étudier les relations dans le traitement de l’information sur l’expression émotionnelle. Il a été trouvé qu’il y avait une influence de la familiarité sur le traitement de l’expression faciale. La familiarité favorise ce traitement surtout si celui-ci est perturbé. Il a été aussi démontré que les personnes souffrant de difficultés à identifier les visages ont des difficultés à admettre que des expressions différentes peuvent appartenir à une même personne. Un des comportements les plus spectaculaires du nouveau-né est sa capacité à imiter certains gestes faciaux, comme la protusion de la langue ou le gonflement des joues que leur proposent les adultes ( Metzoff et Moore, 1977). Ceci suggère que le nouveau-né a une connaissance pré-câblée de son visage encore non-visible de lui et qu’il peut sélectionner, parmi un ensemble de réponses possibles, la mimique d’un congénère. On peut penser que cette capacité pré-câblée de l’enfant va anticiper et ouvrir la voie à deux types de manifestations d’où émergerait et se développerait une conscience de soi, de son corps différencié de l’autre, à travers des imitations et surtout déterminerait ou déclencherait des comportements chez son partenaire qui initieraient des proto-conversations. Ceci milite en faveur d’interactions intersensorielles au cours de la petite enfance en soulignant leur fragilité et leur nécessité pour un développement harmonieux des relations entre l’enfant et ses proches. Ce que l’on peut retenir de ces arguments, c’est aussi le fait que lorsque des difficultés neurologiques pré-natales ou néo-natales interviennent, des dysfonctionnements interactifs précoces se manifesteront, soit par absence visible de la reconnaissance du mouvement affectif, non décodable ou par l’absence de celui-ci, suscitant un malaise. On est tenté de comparer cette situation avec celles que présenteraient des visages impassibles immobiles, sans variation, telle que l’a expérimenté D. Stern (1981), à propos des conséquences sur l’enfant d’un visage impassible de la mère, en se penchant du côté des répercussions chez la mère d’un visage peu expressif et dynamique de son enfant, entraînant un refroidissement des affects, de façon défensive, afin de se protéger de la souffrance. Aussi, peut-on se poser la question de l’état affectif qui circule pendant l’interaction et lorsque des mouvements affectifs d’une certaine nature laissent place à d’autres, du visuel au tactile, au tonique au sonore, entraînant anticipation et transformation. Je présenterai les caractéristiques des expressions faciales à partir de différentes approches qui cherchent à les caractériser puis j’aborderai le déroulement de la production des expressions faciales émotionnelles et de la reconnaissance.