6. 2. 3. Imitation et intériorisation

Il y a donc des liens entre l’attachement et l’imitation. Chez le bébé, les stimuli les plus significatifs à imiter sont ceux qui sont émis par les proches : La signification est « portée » par la relation affective avec le modèle. De ce fait, il existe un haut niveau de corrélation entre niveau de construction de l’objet et niveaud’imitation, ce qui semble confirmer que ces deux fonctions se développent conjointement. Dans le contexte de la psychologie traditionnelle, il est courant de séparer les domaines de la subjectivité provenant de la différenciation entre soi et l’objet, avec l’acquisition de la conscience de soi et de l’intersubjectivité qui serait secondaire à la subjectivité. On pense dans cette optique que l’enfant, avant cette différenciation soi objet ne peut avoir une notion d’autrui et que l’intersubjectivité est une acquisition de l’expérience sociale.

Au contraire, les conduites d’imitation différée décrites par Meltzoff et Moore (1977) chez des enfants de 12 à 21 jours dans les gestes faciaux et manuels sont considérées comme très probablement innées et effectuées pour le plaisir. L’imitation a alors probablement des liens avec la perception qui est physiquement imitative  : imiter pour percevoir, puis pour être l’objet, dispositif distinct du modèle d’incorporation freudien et éclairant les mécanismes d’identification primaire.

On peut d’ailleurs trouver des convergences au sujet de l’imitation en miroir avec :

  • Les jubilations décrites en face de l’image spéculaire par Wallon (1934) 
  • Les effets organisateurs ou de leurre décrits dans le stade du miroir par Lacan (1949) 
  • Le rôle de la mère comme premier miroir de l’enfant mis en évidence par Winnicott (1971).

Cependant ces arguments ne sont pas pour autant décisifs pour affirmer l’existence de l’expression mal définie de « relation d’objet » qui a donné naissance à des travaux très divergents quant au fait que l’enfant n’ait pas d’existence psychique propre dès la naissance.

Si on peut considérer que l’imitation, à elle seule, ne suffit pas à la réalisation d’un échange inter affectif ou à la compréhension émotionnelle, on peut argumenter qu’elle va favoriser des processus de transformation dans la relation. En effet, lorsque le parent imite le bébé, est-ce qu’il traduit un certain comportement qui lui parait avoir une signification et l’enfant peut, à son tour, comprendre que la réaction correspondante a un rapport avec sa propre sensation ou bien cette imitation traduit-elle une émotion primaire indifférenciée ? Comment s’articulent alors l’émotion ressentie et l’émotion perçue, puis l’émotion transmise et l’affect transformé, c’est-à-dire assorti d’une représentation ?

En résumé il y aurait plusieurs types d’imitation : l’imitation liée à la perceptio, à la projection puis à l’intériorisation de l’objet.