Conclusion

Comme on peut s’y attendre, bien qu’on relève le plus fréquemment une infériorité dans l’encodage et le décodage des émotions à partir de groupes différents dits « pathologiques » : enfants autistes, handicapés mentaux, handicapés sensoriels, handicapés moteurs, les auteurs ne peuvent qu’être amenés à conclure que l’interprétation des signaux non verbaux fait appel à plusieurs procédures, chacune pouvant être altérée par une pathologie particulière (Feyereisen, et al, 1988).

Les facteurs qui peuvent contribuer à un déficit de l’analyseur corporel auront un impact important dans les situations relationnelles où les émotions sont sollicitées. L’empathie, l’imitation et les identifications représentent des voies de ce partage corporalisé. Ce sont des expériences de fonctionnement de communication émotive qui pourront évoluer vers une compréhension émotionnelle, avec des représentations et un langage sur celles-ci.

L’empathie est un mode de connaissance de l’autre au sein duquel l’affect prend une place importante. L’imitation première peut être considérée comme un modèle biologique. Lorsque percevoir devient être, les modèles physiologiques se construisent en parallèle aux modèles psychiques dans des modes de transmission et de partage peu conscientisés.

Les thèses du mimétisme, de l’identification en miroir, de l’image spéculaire (conceptualisées par Wallon, Lacan, Winnicott et Girard) peuvent être mises en parallèle avec des notions développées dans d’autres disciplines, évoquant les concepts de mimétisme moteur (Bavelas, op. cit. ) et de neurones miroirs. Le lien intime entre émission et réception est mis en évidence en s’intéressant d’abord à la simple observation des réponses du décodeur. Rizzolatti, Fogassi et Gallese (1995) ont établi que des régions cérébrales, comme les cortex préfrontaux pré-moteurs, émettent des signaux aux régions du cerveau sensibles, ainsi que l’existence de neurones-miroirs qui représentent dans le cerveau les mouvements que le cerveau voit chez un autre individu.

La dimension psychique de ces identifications inconscientes et conscientes permet de concevoir qu’il y a une projection dans l’autre pour en capter ses attributs. C’est à Mélanie Klein que nous devons d’avoir établi l’importance de l’identification projective, concept central de sa théorie qui apparaît comme une projection des parties de soi dans un objet pour prendre possession de ce dernier.

Les questions posées par le polyhandicap vont nous conduire à réfléchir aux effets sur des proches de l’enfant de la communication émotionnelle non verbale où sont requis des processus corporalisés et souvent peu conscientisés. On va pouvoir repérer des problèmes posés par les conséquences de déficit d’un ou de plusieurs canaux sensoriels. Par ailleurs, il a été estimé que les risques de maltraitance sont plus élevés lorsque les enfants présentent une atteinte chronique, comme une incapacité développe mentale ou une atteinte chronique, dès la naissance, concernant les enfants sévèrement handicapés. Dans d’autres situations, au contraire, on trouve une compensation de la dépendance émotionnelle par une grande protection en maintenant des modèles de relation, identiques à ceux qui sont adoptés avec les bébés.

Quand on repère l’importance des capacités expressives et les problèmes liés au déficit de l’organisateur corporel, il devient alors intéressant de formaliser les processus de la compréhension et d’aller interroger les proches de l’enfant sur la façon dont ils s’y prennent pour entrer en communication avec lui. C’est ainsi que la compréhension lorsqu’elle est invitée à être représentée, devient un processus plus secondaire pouvant être parlé.