9. 2. 3. 4. Résultats de l’analyse automatique de contenu :

Nous avons relevé les fréquences des modalisations d’intensité, les fréquences des verbes d’action et des verbes d’état, d’utilisation des adjectifs objectifs et subjectifs et des pronoms. La comparaison des résultats va permettre de donner un avis sur la distanciation et l’implication des différents partenaires, comme effets du partage des émotions avec l’enfant polyhandicapé.

Les modalisateurs d’intensité donnant une dramatisation du discours sont importantes dans les deux groupes. Cette constatation semble aller dans le sens d’une intensité globale importante éprouvée par les personnes de l’environnement, aussi bien chez les parents que chez les soignants.

Cependant lorsqu’on en fait l’inventaire, on s’aperçoit que les modalités sont attachées à la personne de l’enfant et caractérisent l’état émotionnel de l’enfant chez les mères.
Chez les soignants, les modalités d’intensité sont mixtes dans leur attribution et se fondent aussi bien sur leur propre personne que sur celle de l’enfant.

Faut-il voir là un positionnement professionnel d’entraînement à parler de leurs propres émotions face aux enfants, comme attitude professionnelle ?

Le discours des mères est imprégné par la culpabilité psychique et celui des soignants par l’angoisse professionnelle de ne pas parvenir à comprendre les enfants.

Les adjectifs jouent un rôle important dans la construction de la perception et dans l’intention communicative du locuteur. La répartition des adjectifs s’est avérée non significative :

CHI 2. = 0, 315, pour 1 ddl, p= 0, 574

Les adjectifs objectifs indiquent l’existence ou l’absence d’une propriété. Ils sont relativement normés selon Kerbrat-Orrechioni (1980) et n’impliquent pas une interprétation personnelle du référent. Les adjectifs subjectifs représentent la fréquence la plus élevée de l’ensemble des critères exploités, avec une faible différence parent soignant Les adjectifs indiquent un jugement de valeur ou une réaction émotionnelle. Ce type d’outil ne nous a pas permis d’évaluer qualitativement les contenus.

Nous donnons ici un aperçu de l’aspect qualitatif des adjectifs par les différents locuteurs, à propos des qualifications.

‘« Intéressant, terrible, rare, tiède, pénible, maigre, triste, forte, insupportable ».’ ‘« Expressif, malheureux, impressionnant, volontaire, triste, petit, douloureux, horrible, impensable, communicatif, intense ».’

Autre exemple pour un autre enfant par un soignant :

‘« Contente, forte, petite, costaude, conflictuelle, méchante, positive, forte, infernale, terrible, sauvages, difficile, autonome ».’

Une mère pour le même enfant :

‘« Contente, bonne, grande, expressive, importante, petite, fugace, fort ».’

Les émotions des enfants sont présentées par les soignants comme intentionnelles et parfois agressives dans l’interaction. Elles sont présentées par les mères à partir de l’expressivité. Ces différences de sens sont mises en évidence au niveau des verbes et des pronoms.

Il apparaît en effet que si l’implication est commune au niveau de l’intensité dans les deux groupes, la distanciation se manifeste différemment. En effet, ces différences portent sur l’emploi des verbes et des pronoms. Les soignants utilisent plus de verbes factifs, c’est-à-dire des verbes d’action. Les mères utilisent plus de déclaratifs, c’est-à-dire des verbe d’état.

CHI 2. = 13, 25, pour 1 ddl. p. = 0, 001

Chez les professionnels, les verbes factifs qui expriment l’action sont plus nombreux. Il y a une prépondérance de l’action et donc du « faire ». Nous pouvons supposer qu’ils représentent une référence à leur pratique. On peut aussi penser qu’ils traduisent des mécanismes de défense de mise à distance de leurs propres émotions. Les verbes déclaratifs qui évoquent des états ou des notions de possession sont plus nombreux chez les parents.

La moindre occurrence chez les soignants de l’utilisation des pronoms je et il et l’emploi du on dans leur fonction référentielle traduit l’effacement du locuteur et moins de différenciation et de personnalisation de l’enfant.