2. Définition de la notion de la valeur au sein de la mode

Le discours journalistique 305 nous fournira un ‘’stock’’ des noms, attribués aux valeurs pour chaque collection. La collection constitue un discours empirique d’où émerge un dispositif des valeurs constitutives de son plan du contenu. La « collection-discours » est une « sémiotique-objet » pour le discours de presse et les valeurs sont des catégories sémantiques qui servent à axiologiser l’objet.

Lorsque nous nous référons à la valeur, nous faisons allusion : a) à la valeur sémantique qu’on peut extraire dans le traitement des termes du corpus linguistique, b) à la « valeur » en termes d’évaluations esthétiques et axiologiques, et c) à la valeur en tant que critère d’acceptabilité des collections dans le champ de la «haute couture ». Avec cette dernière catégorie, on touche au caractère persuasif du discours qui tend à « faire croire » à la valeur « mode » l’objet décrit.

Un nombre limité de termes tels que la beauté, l’élégance, le sexy et le chic, sont récurrents dans le domaine de la mode et sont chargés d’un « poids » particulier. Les catégories sémantiques spécifiques à la mode sont surtout chargées de valider (ou au contraire refuser) le vêtement comme objet digne d’entrer dans la haute couture et de juger une collection comme réussie.

La particularité des valeurs appartenant à la mode vient du fait qu’elles doivent être compatibles avec les exigences à la fois du discours, de la haute couture, de la marque et des tendances générales 306 . Ainsi elles doivent s’accorder avec d’autres types de valeurs, qui sont des catégories sémantiques propres à l’univers caractéristique de chaque maison. 307 Si par exemple, nous admettons que la maison de couture Valentino a comme valeurs spécifiques la /tradition/, ou l’/élégance/ 308 , elle sera facilement adaptée aux valeurs de la mode et/ou de la haute couture. Par contre, la maison Versace, avec ses propres valeurs de /provocation/ ou /sexualité/, se situe aux limites de la haute couture et en conflit avec ses valeurs. Si dans le système des valeurs de l’identité de la maison, ou dans le système des valeurs d’une collection d’une certaine marque ’manque’’ 309 un certain élément, se créent alors un certain déséquilibre et une certaine tension. Le réseau des catégories sémantiques au sein des marques constitue donc des micro-univers sémantiques (dynamiques et tensifs) qui sont des sièges des « vibrations » en quête d’ajustement et d’équilibre 310 . La question d’adaptation ou d’intégration des valeurs spécifiques à chaque maison précise le style particulier (identité) de la marque par rapport aux valeurs de la mode.

Notes
305.

Il faudrait noter que notre objectif n’est pas d’effectuer une analyse sur le discours de presse.

306.

Le terme tendance dans le sens strict du terme se réfère au prêt-à-porter, mais on l’emprunte aussi pour la haute couture.

307.

A noter que dans le domaine de la haute couture, une autre série des valeurs s’ajoutent, comme le /luxe/, le /précieux/, et d’autres catégories sémantiques connotées de /richesse/ et de /rareté/. Quel est le ‘’poids’’ de ses catégories ?

308.

Quant aux valeurs spécifiques de chaque marque, on s’appuie sur leur organisation dans le discours de mode.

309.

Cf., les commentaires sur la maison Valentino 2003 et Givenchy 2003.

310.

La notion de la valeur ajoutée ou survaleur crée, au sein du réseau des valeurs, un système des modulations, des degrés et des seuils.