7.3. Synthèse

Le tempo de la collection est relativement lent et le rythme entre les espaces est : de l’espace A vers l’espace B décroissant, de l’espace B à l’espace C symétrique et enfin de l’espace C à l’espace D décroissant. A l’intérieur de chaque espace, la tonicité est plutôt faible au niveau perceptif. Il suffit de quelques éléments d’une tonicité grande pour « briser » cette réalité en apparence atone.

Les effets de présence sont réalisés par l’intensité entre le plan de l’expression et le plan du contenu. Quand il y a du « trop » sémantique, le niveau plastique est mis en arrière. En revanche, ce n’est que quand il y a un effet d’accalmie que la tonicité au niveau perceptif est mise en relief. Il y a échange entre plastique et sémantique, comme il y a relation entre plan de l’expression et plan du contenu. Une première tension est à relever entre le sérieux de la coupe (lignes strictes et coupes précises) et la thématique sémantique ludique.

Le sentiment de surprise, le sourire qui se dessine, sont réalisés sur le mode de la suggestion et de la subtilité. L’intensité est annoncée par des petites touches ici ou là. L’ensemble est très bien orchestré.

Le style de Gaultier est relatif à la couture et les valeurs ludiques. Confiant en son style, Gaultier ne crie pas, mais suggère. Son style devient le fil conducteur de sa (poly-) thématique. Le ludique et tous les sujets abordés sont traités avec le même sérieux. Même si il s’agit de la mythologie, même si il s’agit de l’art ou de la couture, les sujets s’entremêlent mais sans jamais être dissociés. La cohérence vient de sa couture : ainsi par les effets de découpe, de décalage, sa couture est présente et règle le ludique et tous les thèmes utilisés.

Les couleurs dominantes bleu et vert, couleurs qui évoquent la mer, ne sont montrésqu’indirectement et successivement 416 . Le créateur Gaultier donne le ton de la collection par des petites astuces. Les couleurs dominantes, rouge et jaune s’imposent petit à petit. Le jaune complète la palette de la mer et de l’été (soleil). On passe au rouge par le violet. Les couleurs dominantes sont présentées par leurs composées. Le ludique et la suggestion dérivent des formes étroites qui s’élargissent et qui s’ouvrent.

Le bleu sera introduit par la présence du violet (bleu et rouge) et par sacomplémentaire. Gaultier joue des complémentaires et présente des couleurs dans leur plus grande intensité (orange –plus intense de jaune, fuchsia-plus intense de rose). Ce qui est intensifié et donc souligné c’est la suggestion. La répétition des couleurs et des formes ouvertes vers la fin, a pour effet d’activer le dynamique et le virtuel.

Le traitement de la couleur se manifeste à deux niveaux : complémentaire, propre de la couture. Le bleu est entre le vert et le noir et évoque en même temps la mer 417 .

Les effets de surprise éclatent d’une façon lente et préparée. La suggestion est aussi activée par les modalités du /montrer/ -/cacher/ et inversement les modalités du paraître sont à nouveau d’actualité. Un autre effet de surprise est la provocation de la robe de mariée.

Même le parcours rythmique (décroissant, symétrique et décroissant) provoque un effet d’étonnement. En effet, il va à l’inverse du schéma « classique » où le final est suivi d’un crescendo. Cette orientation du rythme peut se justifier à cause de l’intensité pathémique qui nécessite un tempo plus vif pour qu’elle se dégage.

Notes
416.
417.

Cf. Ceriani sur la question de la synesthésie. CERIANI G., « A propos d’identité visuelle : le cas DUNE », L’image réfléchie : Sémiotique et marketing (Groupe eidos, Paris I), pp.65-71, Paris, L’Harmattan, 1998.