L'un des constituants principaux des régulations de la présence et du dispositif discursif est le rythme. Dans les chapitres précédents de la partie analyse, nous avons utilisé la notion du rythme principalement au niveau du contenu pour régler les effets de modulation des valences (intensité et étendue +/-I, +/-E) des sèmes entre eux. Nous avons utilisé le terme de tonicité, en se référant indifféremment à l’intensité ou à l’étendue. La modulation des valeurs est ajustée afin d’atteindre la justesse recherchée à l’intérieur des tensions et des effets de présence provoqués. C’est ainsi que le discours est envisagé dans sa dimension des ensembles signifiants, où le contexte est le lieu de transfert d’énergie et des tensions. Un second rôle du discours est celui de l’ajustement de la configuration rythmique des tonicités-valences. Ce rôle sert à assurer les conditions de la bonne visibilité-lisibilité, telle que les opérations interprétatives (assimilation, dissimilation, propagation).
Dans le chapitre précédent, nous avons effectué pour la première fois dans notre thèse la corrélation entre le plan de l’expression et le rythme. Au-delà de la fonction du rythme en tant que régulateur des tensions, celui-ci (le rythme) concerne le nombre des unités de la collection-discours, silhouettes-images de chaque marque. Si le nombre d’unités est grand, dans ce cas le tempo (perceptif) sera lent ; inversement si le nombre d’unités est petit, le tempo sera vif. Le rythme sera nommé décroissant si on passe du tempo vif de l’espace A au tempo lent de l’espace B, symétrique si le tempo entre les deux espaces est identique, et ascendant lorsque le tempo lent de la série A devient un tempo vif.
Dans ce chapitre, nous avons choisi d’approfondir la question du rythme. Nous avons constaté que le rythme démontre aussi bien la fonction poétique du discours 418 que son élasticité (contraction, expansion) 419 . Nous allons attribuer aux rythmes intervenant au plan de l’expression le terme de perceptif ou plastique et à ceux qui concernent le plan du contenu le terme sémantique.
Le rythme plastique concerne le vêtement, celui-ci considéré en lui-même comme objet esthétique-plastique. Il est composé de la texture, des couleurs et des formes, qui sont des éléments régis et agencés par les effets rythmiques (rythmes et rimes plastiques) 420 . Le rythme peut aussi concerner la lumière, le décor, les mouvements, ainsi que les poses des mannequins, ce qui ne sera pas traité dans cette thèse.
Notre objectif est d’étudier l’objet-vêtement de la collection dans une logique des ensembles signifiants (un tout de signification) et comme constitutif de l’identité de la marque. Comme pour la Gestalt, une forme d’équilibre et de justesse est indispensable, il en est de même pour le rythme sémantique qui assure une symétrie, tant au niveau de l’expression qu’au niveau de contenu. Si la Gestalt est soumise à des règles telles que la bonne continuation, le rythme 421 , lui, est capable éventuellement de régler les excès, aussi bien sémantiques que visuels-perceptifs.
JAKOBSON (Roman).- ESSAIS DE LINGUISTIQUE GÉNÉRALE. 1. Les fondations du langage. Paris, Les Éditions de Minuit, 1963, 260 p.
Pour Landowski (Passions sans noms, op.cit.), le rythme est corrélé avec la présence comme une manifestation corporelle des effets phoriques : « L’objet en est clairement désigné : à défaut des unités d’une grammaire de la signification (…), ce sont les configurations plastiques et les pulsations rythmiques qui conditionnent esthésiquement l’émergence du sens ». p.186.
A ce propos voir : i) GROUPE µ Traité du signe visuel, ii) LANDOWSKI E., Passions sans nom op.cit., iii) FONTANILLE J
La gestalt et l’interprétation globale pourraient être approchées soit par le point de vue de l’interprétation sémiotique dans sa globalité, soit par les chiasmes, les formes tactiques (cf. RASTIER F., Sens et Textualité, Paris, Hachette, 1989), et l’accentuation du plan de l’expression. En même temps, ce serait intéressant de les rapprocher aux formes sémantiques et formes expressives et l’idée du parangon, des formes, du contour de forme, et de fond, et ainsi de la sémantique interprétative. (cf . MISSIRE R., « Rythmes sémantiques et temporalité des parcours interprétatifs », http://www.revue-texto.net/).