2) Une circulation inégale

L’échelle de la circulation des copies dans l’agglomération lyonnaise ne compte pas qu’un unique barreau, loin de là. La 2ème vision constitue également un véritable enjeu, peut-être même plus important que la 1ère vision puisqu’il y a plus de salles en compétition. Un établissement qui passe un film après son passage en 1ère vision est en position avantageuse, si toutefois le film ne passe pas trop longtemps après sa sortie, le bouche à oreille ayant pu se faire dans la ville. Ainsi en est-il de Metropolis, dont « celui qui aura la 2 ème vision sera assuré de faire salle pleine » 1081 . A tel point que l’exploitant du cinéma Odéon, qui a obtenu la 3ème vision, entame sa campagne de publicité d’affichage avant même que le film ne débarque au Grolée pour sa 2ème vision, ce qui provoque entre les deux salles et le distributeur une altercation 1082 .

Les succès de la saison 1926-1927 recensés par l’Ecran lyonnais dans les « salles de seconde zone 1083  » (entendez salles de 2ème vision) sont directement liés à leur rang de passage. Au cinéma Grolée, les cinq premiers succès recoupent ceux des trois grandes salles d’exclusivité, succès peu étonnant puisque dans quatre cas sur cinq, le Grolée a obtenu les films en 2ème vision. La veuve joyeuse (The Merry widow, E. Lubitsch, 1925), quatrième plus grand succès du Tivoli est le film qui a le mieux marché au Lumina-Gaumont : la salle l’a obtenu en 2ème vision. Même constatation pour le cinéma Gloria, où les films qui ont le mieux marché ont tous été obtenus en 2ème ou 3ème vision. A contrario, les recettes de La châtelaine du Liban (M. de Glastyne, 1926) sont jugées insuffisantes au cinéma Grolée, ce qui est expliqué par le fait que la salle n’a eu le film qu’en 5ème vision.

Obtenir un film rapidement, c’est aussi l’obtenir en bon état ou tout du moins en meilleur état qu’en étant relégué en 6ème ou 7ème position. D’une part, les copies s’abîment et d’autre part, les exploitants ne se dérangent pas pour couper ça et là quelques scènes trop longues à leur goût. L’Ecran lyonnais fustige en 1927 la pratique « irréfléchie qui dicte parfois de très grandes coupures dans certains films 1084  ». Le cas est, en 1919, expressément prévu dans le contrat des loueurs : si plus de 5 % du métrage est manquant, l’exploitant est en droit de réclamer une ristourne 1085 (mais comment est-il censé s’en apercevoir ?), signe que la pratique est courante.

L’obtention de la 2ème vision des films est accaparée à Lyon par une minorité d’établissements :

Tableau 24. Circulation des films en 2ème vision, sortis dans les trois principales salles de 1ère vision entre septembre 1926 et avril 1927.
Salles obtenant la 2 ème vision Films sortis à la Scala Films sortis au Tivoli Films sortis à l’Aubert-palace Total En %
Lumina-Gaumont 7 8 9 24 27 %
Grolée 5 4 6 15 17 %
Gloria 0 11 3 14 16 %
Terreaux 4 0 2 6 7 %
Palace de Saint-Fons 1 5 0 6 7 %
Athénée 2 1 2 5 6 %
Odéon 2 0 3 5 6 %
Modern 1 2 1 4 4 %
Autres (6) 3 3 3 9 10 %
Total 25 34 29 88 100 %

La hiérarchie des salles selon le passage des films apparaît ici fermement établie : trois salles, Lumina-Gaumont, Grolée et Gloria, monopolisent à elles seules 60 % des 2èmes visions, et 90 % des films sortent en 2ème vision dans huit établissements, ne laissant que des miettes aux cinquante autres salles de l’agglomération. Après leur sortie dans l’un ou l’autre des palaces du centre-ville, les films partent donc majoritairement soit dans la quartier des Brotteaux, soit dans celui de la Guillotière ou reste exploités au centre de la ville. On trouve certaines accointances, certains accords sans doute, entre les salles. Si le Lumina-Gaumont et le Grolée obtiennent des trois salles de 1ère vision une proportion à peu près égale de films en 2ème vision, le cinéma Gloria fonctionne quasiment exclusivement avec les films sortis au Tivoli, et est imperméable aux films sortis à la Scala (quel que soit d’ailleurs le rang de passage). De l’autre côté, le Lumina-Gaumont et le Grolée absorbent à eux deux la moitié des 1ères visions sorties à la Scala et à l’Aubert-palace.

L’itinéraire des films dans l’agglomération lyonnaise privilégie de fait ces deux quartiers de Lyon. 35 % des films sont en effet repris en 2ème vision entre Terreaux et Bellecour, et 33 % dans les salles des Brotteaux, que cela soit au Lumina-Gaumont ou à l’Athénée. Plus des deux tiers des films ont donc, dans leurs premières semaines (ou premiers mois) d’exploitation, un itinéraire centre-centre ou centre-Brotteaux, repoussant d’autant la sortie de ces films dans les petites salles de quartier. La place du cinéma Palace de Saint-Fons, qui arrive en 5ème position devant des établissements du centre et du quartier des Brotteaux, se trouve alors en porte-à-faux avec ces conclusions.

Mais voilà. C’est que les films que la salle de banlieue obtient en 2ème vision n’ont a priori pas intéressé les salles plus importantes de l’agglomération. En effet, des ces six films, cinq disparaissent de la programmation des salles de cinéma lyonnaises après leur passage à Saint-Fons. Un seul est repris, Incognito, par la salle plutôt modeste des Variétés, avenue Berthelot, et plus de quatre mois après. Les six films que le cinéma Palace de Saint-Fons a obtenus ont en outre mis plus de six mois pour y parvenir après leur sortie.

Il en va de même pour les neuf films obtenus en 2ème vision par les « autres salles ». Deux d’entre eux ont été repris par le Majestic, qui est avant tout une salle de 1ère vision, mais ne rechigne pas parfois à reprendre les grands films passés en 1ère vision dans les salles concurrentes. Ces deux films, parmi lesquels Le Mécano de la « Général » (The General, B. Keaton et C. Bruckman, 1926), sont repris ensuite par d’autres salles. En revanche, les sept autres films, dont la 2ème vision est assurée par des petites salles de quartier, ne connaissent ensuite dans les salles dont je connais le programme aucune reprise, à l’exception du film Le prix d’une folie, qui sort au Tivoli le 4 décembre et est repris en 2ème vision par la Gaieté-Gambetta deux semaines plus tard. Le film est effectivement repris au cinéma Régina de Vaise, mais plus d’un an après. On le voit, à partir de l’étude de la circulation des films se dessine déjà la programmation des petites salles de quartier et de la banlieue, composée pour partie de films qui n’ont pas intéressé les grandes salles du centre ou des Brotteaux. En l’absence d’une 3ème vision, il semble un peu usurpé de parler de 2ème vision.

Un genre résume à lui seul le caractère populaire d’une partie de la production cinématographique : le western. Les westerns, en effet, suivent dans l’agglomération lyonnaise un itinéraire qui sort des sentiers battus et que l’on peut sans peine qualifier de populaire. A titre d’exemple, je me suis intéressé au parcours des films où figure Tom Mix, la plus grande star du genre – avec son cheval Tony – des années 1920.

Tableau 25. La circulation des films de Tom Mix (avec son cheval Tony) dans l’agglomération lyonnaise
  1 ère vision Date 2 ème vision Date
La manière forte Majestic 12/12 1925 Lacroix 20/02 1926
Le brigand gentilhomme Scala 07/02 1926 Saint-Fons 04/12 1926
Le vengeur Modern 27/03 1926 Bellecour 10/12 1926
Le maudit Scala 18/09 1926 Saint-Fons 28/05 1927
Vas-y Tony Bellecour 05/11 1926 Saint-Fons 30/04 1927
Le dernier de sa race Grolée 25/12 1926 Fémina 24/12 1927
Le brasier Saint-Fons 19/03 1927 Splendid 26/03 1927
Ventre à terre Bellecour 13/05 1927 Family 17/12 1927
L’indompté Majestic 09/07 1927 Family 29/10 1927
Ferme au poste Saint-Fons 30/07 1927 Lacroix 03/09 1927
Le rapide 113 Scala 05/09 1927 Lacroix 28/01 1928
Mission sacrée Majestic 19/11 1927 Saint-Fons 14/01 1928

Comme on peut le constater, les films de Tom Mix passent directement des palaces du centre-ville aux petites salles de la Croix-Rousse (le Lacroix, le Family) ou au Palace de Saint-Fons, sans aucune escale dans l’une ou l’autre des salles de la presqu’île. Quant au quartier des Brotteaux, il est absolument imperméable au genre. A deux reprises, le cinéma de Saint-Fons programme en exclusivité dans l’agglomération deux films de Tom Mix, qui sont repris ensuite en 2ème vision par une salle de quartier de Lyon. Cet intérêt des salles populaires pour le western est tel qu’il inverse les logiques de la circulation des films : Poigne d’acier, avec Buck Jones (autre grande vedette du western) sort en 1ère vision au cinéma de Saint-Fons le 9 avril 1927 et est repris deux mois plus tard par le cinéma Bellecour. C’est le seul exemple connu d’un itinéraire banlieue-centre-ville.

Tableau 26.: Les quarante-quatre films les plus repris à Lyon entre 1926 et 1927
Films Date de sortie Salle Nombre de reprises
La veuve joyeuse 20-nov-26 Tivoli 9
Nitchevo 22-janv-27 Tivoli 9
Madame sans-gêne 16-janv-26 Tivoli 8
La chatelaine du Liban 18-déc-26 Tivoli 8
Michel Strogoff 22-janv-27 Scala 8
Les bateliers de la Volga 29-janv-27 Tivoli 8
La femme nue 05-févr-27 Tivoli 8
Cobra 19-mars-27 Tivoli 8
Mare Nostrum 09-avr-27 Aubert-palace 8
Terre promise 27-févr-26 Scala 7
L’aigle noir 27-mars-26 Scala 7
La ruée vers l’or 16-avr-26 Scala 7
Ça t’la coupe 16-oct-26 Tivoli 7
La femme en homme 06-nov-26 Scala 7
Variétés 19-févr-27 Scala 7
Rêve de valse 06-nov-26 Aubert-palace 6
Le fils du Cheikh 20-nov-26 Scala 6
Marchand d’habits 02-janv-26 Scala 5
Le Bossu 09-janv-26 Scala 5
600 000 francs par mois 06-févr-26 Scala 5
Le puits de Jacob 13-févr-26 Scala 5
La marraine de Charley 13-févr-26 Tivoli 5
Don X, fils de Zorro 06-mars-26 Scala 5
Jack 27-mars-26 Tivoli 5
Ma vache et moi 11-déc-26 Aubert-palace 5
Le bouif errant 01-janv-27 Aubert-palace 5
Le chemineau 26-févr-27 Tivoli 5
Melle Josette, ma femme 16-avr-27 Scala 5
La ronde de nuit 24-avr-26 Aubert-palace 4
Il faut qu’ça gaze 22-mai-26 Scala 4
Vieux habits, vieux amis 11-sept-26 Tivoli 4
Les aventures de Robert Macaire 25-sept-26 Scala 4
La croisière noire 09-oct-26 Scala 4
Une femme sans mari 13-nov-26 Tivoli 4
Cramponne-toi 27-nov-26 Aubert-palace 4
Quand la femme est roi 04-déc-26 Aubert-palace 4
Le vertige 08-janv-27 Scala 4
Le fantôme de l’opéra 08-janv-27 Tivoli 4
Cyclone noir 08-janv-27 Aubert-palace 4
La grande amie 12-févr-27 Aubert-palace 4
Yasmina 26-mars-27 Aubert-palace 4
Poupées de Montmartre 02-avr-27 Tivoli 4
La barrière 30-avr-27 Aubert-palace 4
La femme de quarante ans 01-mai-26 Scala 4

On pourrait arguer bien évidemment que ces films n’ont pas eu de succès et que c’est à ce titre que les salles de quartier ou de la banlieue les obtiennent aussi vite. Certes, mais Le Cheval de fer (The Iron horse, John Ford, 1924), sorti le 3 décembre au cinéma Majestic a été l’un des très gros succès de la salle du centre-ville 1086 , ce qui ne l’a pas empêché de disparaître totalement des écrans lyonnais pendant plus d’un an avant de ressurgir au petit cinéma Lacroix. Par ailleurs, les films de Tom Mix connaissent pour la plupart une 3ème vision. Le rapide 113 après sa projection au cinéma Lacroix, passe à Saint-Fons trois semaines plus tard.

Quoiqu’il en soit, ce n’est pas la même chose d’obtenir la 2ème vision d’un film appelé à un important succès, et celle d’un film dont personne ne veut ou qui n’intéresse qu’un public restreint. Afin de mieux cerner les logiques de la circulation des films dans l’agglomération lyonnaise, je me suis intéressé au parcours des films repris par un minimum de quatre salles (soit, avec la 1ère vision, une occupation de plus de 10 % des écrans de la ville), une prégnance sur les écrans lyonnais qui semble indiquer un certain succès. Cela représente quarante-quatre longs-métrages (cf. tableau 26), sortis dans les trois grandes salles de 1ère vision entre janvier 1926 et avril 1927.

Tableau 27. Parcours des films à succès sortis dans les trois principales salles de Lyon entre janvier 1926 et avril 1927
  2 ème vision 3 ème vision Total
Lumina-Gaumont 20 2 22
Grolée 7 6 13
Gloria 7 2 9
Terreaux 3 1 4
Odéon 2 8 10
Modern 2 6 8
Majestic 1 2 3
Lafayette 1 1 2
Régina 1 2 3
Autres salles 0 14 14
Total 44 44 88

Ce qui saute d’emblée aux yeux, c’est que la concentration des 2èmes visions observée sur l’ensemble des films est accentuée pour les films à succès. Ici, le Lumina-Gaumont concentre à lui seul près de la moitié des 2èmes visions, et avec les cinémas Gloria et Grolée, plus des 3/4 des 2èmes visions. La circulation des films entre 1926 et 1927 semble bien ajustée. La 3ème vision constitue elle aussi un enjeu, même si son obtention apparaît plus démocratique. Tout de même, plus de 50 % des films circulent du centre aux Brotteaux, puis reviennent au centre 1087 ou, lorsque le Lumina n’est pas intéressé par le film (ou ne l’obtient pas ?), restent cantonnés au centre-ville 1088 .

Dans le cas de ces films à succès, les salles du centre-ville et les cinémas Lumina et Gloria réservent souvent jusqu’à la 5ème vision. Il semble d’ailleurs que la circulation des grands films fonctionne en quatre temps : l’exclusivité dans la salle de 1ère vision, la reprise en 2ème vision du film au Lumina, au Gloria ou au Grolée, le retour (ou le maintien) du film dans la presqu’île, et enfin, avec un certain décalage, la programmation du film dans les quartiers périphériques. La Veuve joyeuse sort par exemple au cinéma Tivoli le 20 novembre 1926. Il est repris deux mois plus tard en 2ème vision par le Lumina-Gaumont, puis en février 1927 au Grolée (3ème vision), en mars au Modern (4ème vision) et à l’Odéon (5ème vision), avant de disparaître jusqu’au mois d’octobre où il est programmé au Casino de Villeurbanne, avant de finir sa carrière dans les salles de quartier. Le 3 mars 1928, un an et demi après sa sortie à Lyon, il est au programme du cinéma Lacroix à la Croix-Rousse.

Car les salles les plus modestes, et leur public bien entendu, doivent attendre de longs mois avant de profiter des grands films, si tant est bien sûr qu’ils y soient programmés. Les habitués du Casino de Villeurbanne, la plus grande salle de la commune, patientent neuf mois pour obtenir Nitchevo, dix mois pour Michel Strogoff et onze mois pour L’Aigle noir (The Eagle, C. Brown, 1925). Les décalages sont équivalents au cinéma du Grand Trou, situé route de Vienne, qui attend neuf mois pour avoir le film Melle Josette ma femme (G. Ravel, 1926), onze mois pour Michel Strogoff et largement plus d’un an pour La femme en homme.

Reste à savoir si une hiérarchie existe entre les petites exploitations, ou entre les différentes parties de la ville. Une phrase des Ets Aubert à propos de La passion Jeanne d’Arc (C.T. Dreyer, 1928) que la ville d’Oullins demandait (« nous vous avions demandé d’attendre car l’exclusivité de ce film sur Lyon n’était pas terminée 1089  ») pourrait donner l’impression que les films sortent en banlieue après leur passage dans les salles de quartier lyonnaises. Mais il ne semble pas qu’il existe de règles de circulation strictes entre les salles de banlieue et celles de la grande ville. A Villeurbanne, par exemple, la salle du Casino arrive première après l’exploitation dans le centre de la ville de La veuve joyeuse, mais derrière les cinémas Lacroix de la Croix-Rousse et Régina de Vaise pour La Ruée vers l’Or.

Le cinéma de Saint-Fons ne peut donner d’informations fiables, étant exploité en parallèle au cinéma Splendid à Lyon. On peut juste remarquer que les films passent d’abord à Saint-Fons avant de passer route de Vienne, mais ce n’est pas systématique, et cela ne signifie peut-être pas grand-chose si ce n’est que l’exploitant privilégie Saint-Fons (qu’il exploite depuis sept ans) au détriment du Splendid (qu’il n’exploite que depuis deux ans). Encore qu’une différence d’une semaine ne soit pas réellement significative.

En revanche, il existe bel et bien une organisation de la circulation des films à l’échelle du quartier, sans que l’on sache malheureusement quel découpage les distributeurs adoptent pour l’agglomération lyonnaise. L’idée de la priorité dans un espace défini transpire dans une lettre de Paris-Consortium-Cinéma qui déclare ne pouvoir louer Les Misérables à la municipalité d’Oullins, le film ayant été « retenu par une salle de votre localité 1090  » Il semble en effet que les distributeurs – et les exploitants, bien sûr – rechignent à programmer un film deux fois dans le même quartier, à l’exception des abords de la place Bellecour.

Dans le quartier des Terreaux, le cinéma des Terreaux et le cinéma Odéon n’ont, d’octobre 1926 à mars 1928, jamais passé le même film, même avec un décalage. C’est le cas par exemple des quarante-quatre films à succès étudiés plus haut : dix-huit d’entre eux passent à l’Odéon, neuf autres au Terreaux. Ce qui, avec vingt-sept films projetés sur quarante-quatre (soit 61 %), pour la moitié d’entre eux en 2ème ou 3ème vision, place le quartier des Terreaux comme un carrefour incontournable de la programmation des films à succès. Même constatation aux Brotteaux. Le Lumina-Gaumont monopolise évidemment les films à succès (vingt-trois programmés sur quarante-quatre, soit plus de la moitié), mais certains lui échappent et atterrissent au plus modeste cinéma Athénée : c’est le cas de six des quarante-quatre films. Ce qui au final donne vingt-neuf films fédérateurs aux Brotteaux, quartier lui aussi incontournable. Et encore une fois, aucun des films programmés au Lumina ne passe à l’Athénée, même avec plusieurs mois de retard. Même phénomène enfin pour les deux salles situées l’une en face de l’autre sur l’avenue Berthelot. Aucun film en commun entre le cinéma des Variétés, qui obtient sept des quarante-quatre films à succès, et le cinéma Comœdia, qui se taille la part du lion du quartier avec dix-neuf films (ses recettes sont, il est vrai, trois fois plus importantes que celles de son voisin). Sur ces dix-neuf films, le Comœdia obtient le plus souvent la 4ème, 5ème ou 6ème vision. On peut émettre l’hypothèse, bien que l’on n’en sache rien, que cette règle de la priorité est également appliquée à la Croix-Rousse et à Vaise, où deux salles cohabitent.

Il reste que la circulation des films dans l’agglomération lyonnaise, profondément inégale, détermine une hiérarchie des quartiers selon la fraîcheur des films qui y passent, mais également selon les films qui y sont programmés. La distinction culturelle des espaces urbains est bien réelle.

Notes
1081.

Idem n°5, 17 juin 1927.

1082.

Idem n°32, 23 décembre 1927.

1083.

Idem n° 7, 1er juillet 1927.

1084.

L’Ecran Lyonnais n° 3, 3 juin 1927.

1085.

LEGLISE Paul, op. cit., page 40.

1086.

L’Ecran Lyonnais n° 7, 1er juillet 1927.

1087.

Tel Le Chemineau, sorti en 1ère vision au Tivoli, en 2ème vision au Lumina et en 3ème vision au Grolée.

1088.

Tel Rêve de Valse, sorti en 1ère vision à l’Aubert-palace, en 2ème vision au Grolée et en 3ème vision à l’Odéon, aux Terreaux. La 4ème vision est en outre obtenu par l’Athénée, aux Brotteaux...

1089.

AM Oullins : 2 R 2 : Lettre des Ets Aubert datée du 22 novembre 1929.

1090.

AM Oullins : 2 R 2 : Lettre de Paris-Consortium-Cinéma, datée du 17 mai 1929.