III - Face aux pouvoirs spirituel et temporel

La vision que porte Guillaume de Sauqueville sur le monde religieux de son époque – expression très générale que nous allons préciser, et qui concerne avant tout la hiérarchie ecclésiastique – est très révélatrice des tensions qui animent des hommes d’Eglise confrontés à la nécessité de mener une carrière qui leur permette de vivre décemment, tout en accomplissant leur office, mais aussi, probablement, d’un état d’esprit plus largement partagé dans la population du royaume, et qui vise la « mauvaise vie » du clergé. Deux questions reviennent sans cesse sous la plume du dominicain : la décadence des mœurs du clergé, qui ne se trouve plus, selon lui, en position d’offrir aux fidèles une image exemplaire, et une forte insatisfaction sur la façon dont les bénéfices ecclésiastiques sont attribués. Il est important de noter d’emblée que ces deux critiques font partie des lieux communs de la littérature médiévale dès le XIIIè siècle et ce pour plusieurs siècles et qu’on les retrouve sous la plume des prédicateurs, mais aussi des fabulistes 424 . Guillaume de Sauqueville reprend donc ces poncifs et les mêle à ses propres récriminations. Il fait néanmoins preuve d’une virulence peu commune.

Notes
424.

Jean-Charles Payen, « La satire anticléricale dans les œuvres françaises de 1250 à 1300 », dans 1274, année charnière. Mutations et continuités , colloque CNRS 1974, Paris : CNRS, 1977, p. 261-280. L’auteur revient sur l’anachronisme des mots qu’il emploie en titre de son article et ajoute, dans sa typologie des critiques contre le clergé, les attaques qui se multiplient contre les ordres mendiants à partir de 1250, et qui sont naturellement absente des sermons de Guillaume.