1.1.3. La méthode du capital humain

Au début des années soixante, des économistes ont essayé de chiffrer le prix des vies perdues sur la route. Ils se plaçaient toujours du point de vue de la collectivité sans prendre en compte les pertes d'utilité pour l'individu. Cette approche tire ses sources du postulat suivant : la valeur accordée à la vie d'un individu est celle correspondante à sa contribution au bien-être de la société. Le bien-être considéré correspond à la production ou la richesse que l'individu procure à la collectivité par son travail rémunéré. Ainsi, en améliorant la sécurité sur les routes, le bien-être collectif mesuré par la production s'en trouve augmenté.

Le deuxième type de méthode change de principe, la valeur de la vie humaine n’est plus estimée ex-post mais plutôt ex-ante, avant que l'accident ne survienne. Il existe deux méthodes pour calculer la valeur d'une vie humaine selon l'approche du capital humain : l'approche nette et l'approche brute. Ces deux approches cherchent essentiellement à actualiser ce que l'individu peut apporter à la société jusqu'à son décès probable. Elles se rattachent à une certaine conception de l'homme assimilé ici à un capital productif. « À partir du début de la phase d'utilisation, la valeur économique d'un individu comme celle d'un bien capital peut être mesurée par la somme actualisée des valeurs annuelles de sa production future. » (Schultz, 1961).

Les méthodes dites du capital humain sont nées d'un double mouvement : d'une part, du besoin de l'État de rationaliser son action en pratiquant une certaine "arithmétique politique" et d'autre part, de la tradition des "ingénieurs-économistes" en France, appliquant des méthodes rationnelles et précises permettant de calculer le "coût" d'une vie humaine perdue sur la route.