I.4. L’urbanisation favorise la reconnaissance du risque et sa gestion, et cette volonté de gestion modifie le risque, le déplace, le diffuse

Mais si la ville favorise l’augmentation des risques, elle favorise également leur reconnaissance et la volonté de les gérer (Laganier, 2002, Pigeon, 2005). Il y a donc apparemment une ambiguïté du risque urbain : l’urbanisation entraîne une recherche accrue de sécurité tout en favorisant l’augmentation du risque. La mise en œuvre de politiques de gestion du risque va modifier ce dernier, dans le temps et dans l’espace, et le territorialiser. La prise en compte du politique introduit la dimension temporelle du risque et souligne le rôle des héritages, naturels et anthropiques, qui influencent le risque et sa gestion (Laganier, 2004 et 2006 ; Pigeon, 2005).

Concernant le risque d’inondation, la contrainte fluviale est ainsi un élément d’organisation spatiale qui va susciter des choix d’aménagement de la part des sociétés riveraines, lesquelles vont avoir un effet en retour sur le risque. La question du risque d’inondation en milieu urbain montre la complexité des interactions nature-sociétés, et risque-urbanisation. Tout en démontrant « la tendance actuelle au glissement des effectifs humains vers les grands axes fluviaux »3, J. Bethemont (1977) souligne ainsi que la question des inondations illustre « l’ambiguïté et la complexité des rapports existant entre l’homme et l’eau », et pose un double problème d’ajustement dans le temps et dans l’espace. Les bénéfices apportés par la proximité d’un cours d’eau ont fait la fortune de nombreuses villes (bien que la qualité d’un site ne suffise pas à assurer la prospérité d’une cité) et entraîné une volonté de gestion de la contrainte fluviale, qui s’est souvent traduite par un rapport conflictuel entre l’homme et le fleuve, longtemps marquée par une volonté de maîtriser l’aléa et de supprimer le risque, plutôt que par une recherche d’équilibre (Bethemont, 1977 ; Guillerme, 1983).

Voyons à présent, à travers quelques exemples choisis, quelles sont les différentes modalités de la contrainte fluviale en milieu urbain et comment les villes ont abordé la problématique du risque d’inondation, et plus particulièrement du risque de crue fluviale.

Notes
3.

Le risque d’inondation est le risque dit naturel le plus répandu en France : « il concerne à des degrés divers environ un tiers des communes, dont la plupart des grandes villes, et représente 80% des dommages imputés aux risques naturels » (Laganier, 2006, p.7)