I.2.b. Un constat clair : le risque s’est aggravé, notamment en milieu urbain

L’étude a fait le constat chiffré de l’importance des dommages potentiels et de la grande vulnérabilité des enjeux urbains. D’après les résultats obtenus, l’ensemble des 556 000 habitants réparti sur les 2 450 km² de la vallée alluviale est susceptible d’être touché par les inondations directes et indirectes dues aux crues du fleuve. Sur les 310 communes riveraines du fleuve, la moitié se situe dans des pôles urbains et concentre près de 90 % de la population de la vallée (505 000 habitants), dont 60 % dans la seule agglomération lyonnaise (330 000 habitants).

Les débordements du Rhône (compte non tenu des inondations des affluents) affecteraient 28 000 personnes en cas de crue moyenne (environ décennale), 62 000 en cas de crue forte (de période de retour environ 100 ans, à l’exemple des crues de 1856 sur le Rhône à partir de Lyon ou de 1990 en amont du confluent de l’Ain) et 158 000 en cas de crue très forte (d’un débit d’occurrence millénale, tel l’événement de 1840 sur la Saône). Plus des trois quarts des populations concernées se situent dans les villes13. A cela s’ajoutent plus de 400 000 personnes pouvant être inondées par la remontée de la nappe d’accompagnement du Rhône ou par la saturation du réseau hydrographique affluent du fleuve (Hydratec pour Territoire Rhône, 2003).

Par ailleurs, plus de 13 000 entreprises représentant 100 000 emplois sont situées en zone inondable, ainsi que 103 000 ha de terres agricoles dont le mode d’exploitation n’est pas du tout adapté à la submersion (71,8 % sont cultivées en céréales et 28,2 % en cultures spécialisées à forte valeur ajoutée : maraîchage, vignes, vergers, serres). A cela s’ajoutent les nombreux équipements et les infrastructures de transport (route et rail) susceptibles d’être mis hors service par la progression des eaux et d’handicaper fortement la gestion de la crise, mais qui n’ont pas été entièrement recensés par l’EGR.

Les dommages directs (tab. 1), compte-non tenu des dommages aux équipements et aux réseaux de transports et de communication, ni de ceux aux équipements collectifs ou induits par les interruptions de service, ont été estimés à 0,6 milliard d’euros en crue moyenne, 2 milliards d’euros en cas de crue forte et 4,3 milliards d’euros en cas de crue très forte. Ces chiffres ne sont qu’une approximation14, mais ils donnent néanmoins un ordre de grandeur du coût considérable qui serait à supporter par la société le jour où un événement de grande ampleur surviendra. Ils ont d’ailleurs été confirmés à la hausse (excepté pour le montant des dommages agricoles, sachant que la saison durant laquelle se produit la crue fait varier les dommages de 1 à 2) par le montant des pertes recensées suite à l’inondation du Rhône aval en décembre 2003 (DIREN de bassin Rhône-Méditerranée, 2005a).

Tab. 1. Répartition par type d’enjeu des dommages estimés à l’échelle de la vallée pour trois niveaux de crue du Rhône, en milliards d’euros
Tab. 1. Répartition par type d’enjeu des dommages estimés à l’échelle de la vallée pour trois niveaux de crue du Rhône, en milliards d’euros

(source : Hydratec pour Territoire Rhône, 2003, p. 26).

Voyons plus en détail quelle est la répartition spatiale des enjeux15 (tab. 2 a, b et c):

Notes
13.

75 % en cas de crue moyenne, 77 % en cas de crue forte et 80 % en cas de crue très forte

14.

Territoire Rhône estime que la marge d’incertitude des chiffres avancés est de 50 à 100 %

15.

Les scénarios de crue envisagés par l’EGR tiennent compte de brèches accidentelles dans le delta mais supposent la bonne tenue des digues par ailleurs.