III.2. La territorialisation du risque et de ses évolutions: les arguments du Système d’Information Géohistorique

La méthodologie mise en œuvre est basée sur la réalisation et l’analyse de cartes afin de spatialiser les différentes dynamiques et voir comment elles évoluent dans le temps. Cela passe par la mise au point d’un SIG historique, pris en tant qu’outil d’analyse à la fois diachronique et incrémental des dynamiques et des interactions.

Un des intérêts des SIG est de permettre le traitement de données tant qualitatives que quantitatives, en associant une base de données, des objets géographiques et des images raster géoréférencées. L’outil se prête à la gestion de données complexes : il permet aussi bien de structurer et de spatialiser des données existantes que de procéder à des analyses spatiales et à des traitements statistiques de ces données. Le géoréférencement des données permet de superposer des cartes à différentes dates et d’analyser et représenter l’évolution du risque dans le temps, selon une approche multiscalaire. En ce sens, cette approche se différencie de l’analyse historique classique, puisqu’il s’agit ici d’identifier et d’étudier les interactions spatiales des différentes composantes du risque sur un même territoire, à l’échelle locale et régionale.

Par un jeu d’échelle, le SIG historique permet d’identifier des secteurs où le risque évolue, dans le sens d’une aggravation ou d’une réduction. Un des apports majeurs de la spatialisation des dynamiques au moyen du SIGéohistorique concerne ainsi l’interprétation de la situation géographique du risque : visuellement, on voit apparaître une structuration des phénomènes, une territorialisation du risque entraperçue jusque-là à partir de documents ponctuels. Cette approche du SIG dans une perspective narrative est inspirée des travaux du géographe américain J. Sinton, qui a développé une approche spatiale et diachronique basée sur la cartographie sur les villes de Philadelphie et Cologne (Sinton, 1999 et 2001). La capacité narrative et analytique du S.I.G. s’insère ainsi dans la démarche du géographe, elle est complétée en amont et en aval par un travail d’enquête et de terrain ainsi que par un discours d’interprétation des cartes obtenues.

On obtient finalement des cartes évolutives, comme les séquences successives d’un film, qui, fortement enrichies par un discours de reconstruction et d’interprétation tiré de l’analyse et du recoupement des différentes sources, permettent de représenter les évolutions spatio-temporelles afin de comprendre le risque actuel à la lumière des interactions entre l’hydrosystème et l’aménagement de la plaine suscité par l’urbanisation.

Le SIG historique permet donc de combiner diverses sources d’information, historique et contemporaine, sur un espace donné. Les données rassemblées ont été collectées à partir du croisement de sources écrites, cartographiques et photographiques, complétées par des vérifications sur le terrain ainsi que par des entretiens semi-directifs avec les acteurs de la gestion du risque. Les sources sont mentionnées et critiquées dans les métadonnées accompagnant chaque fichier.

L’espace couvert par le SIG est celui du risque proprement dit ; l’échelle du bassin versant est bien sûr intégrée dans la démarche, mais elle n’est pas prise en charge par le SIG historique (cf. fig. 3). Le SIG est pensé selon deux échelles spatiales emboîtées, de précision différente et représentées sur la figure 4 : le Y lyonnais dans son ensemble, renseigné avec une précision allant du 1/20 000e au 1/80 000e, et un zoom plus précis sur le cœur urbain, au 1/10 000e.

Fig. 4. Les deux échelles spatiales du SIGéohistorique « Y lyonnais ».
Fig. 4. Les deux échelles spatiales du SIGéohistorique « Y lyonnais ».