II.4.b. Augmentation du débouché de la Saône et prolongement de l’endiguement de la rivière

Sur la Saône, deux séries de mesures sont prises pour réduire le risque que la catastrophe de 1840 venait de matérialiser, financées à double compte par l’Etat et la Ville (fig. 30).

La première nécessité qui s’impose est de réduire l’aggravation du niveau des eaux provoquée par les nombreux obstacles édifiés en travers de la Saône. On décide donc de reconstruire les ponts avec des piles moins massives et moins nombreuses et des arches plus hautes, et de supprimer l’éperon rocheux du rapide de la Mort-qui-Trompe, en saillie dans le lit du fleuve au niveau du défilé de Pierre-Scize. Dans un premier temps, les travaux concernent le pont de Serin, qui est exhaussé de 1,90 m environ, le vieux pont de pierre (du Change), dont les arches sont agrandies en réduisant considérablement l’épaisseur des piles qui faisaient auparavant 10 à 11 m d’épaisseur, et le pont de la Mulatière, dont on supprime une pile sur deux. Le pont du Change est démoli en 1843 et remplacé par un nouvel ouvrage baptisé pont de Nemours. Parallèlement, on commence les travaux de déroctage à l’amont de ce même pont sur une hauteur de 86 cm. Les roches ne sont cependant pas arasées au droit du pont lui-même, et continuent à encombrer le débouché du nouvel ouvrage : le remous produit par l’ouvrage était de 78 cm en 1840, il sera de 23 cm en 1856 mais aurait été de 40 cm en cas de crue égale à celle de 1840 selon les ingénieurs de l’époque93. Il est également prévu de remplacer les gradins du port Lépine par un bas-port, car ils s’avancent en travers de la rivière et réduisent la section d’écoulement, mais l’entreprise est finalement ajournée du fait de l’insuffisance des ressources nécessaires.

Parallèlement à cette première série de mesures qui visent à abaisser le niveau des eaux en temps de crue, on décide de renforcer l’endiguement de la Saône.

Fig. 30. Travaux réalisés suite à l’inondation de 1840 et état de l’endiguement en 1856.
Fig. 30. Travaux réalisés suite à l’inondation de 1840 et état de l’endiguement en 1856.

En rive droite, la protection doit ainsi être étendue vers l’amont jusqu’à la gare d’eau de Vaise. Les travaux des quais de la Chana et de l’Observance, à l’aval du pont de Serin, débutent dès 1841. A Vaise même, un quai est décidé en 1843. Dans la partie aval de la ville, on peut enfin commencer la même année à construire le quai Fulchiron décidé à l’aval de Bellecour en 1838, la totalité des maisons à démolir ayant pu être rachetée par la ville.

En rive gauche, le quai Saint-Antoine, dont les travaux étaient commencés depuis 1838, sont révisés dans le sens d’un exhaussement, et achevés en 1843. L’année d’avant, on venait d’achever la construction du quai de l’Arsenal entreprise dès 1839 à l’aval de Bellecour. On décide également l’exhaussement du quai de Serin. Enfin, le quai des Augustins, encore sommaire jusque-là, est remplacé par un véritable quai en 1853.

Malgré l’ampleur des dommages causés par la submersion de 1840 à l’amont de Lyon, les travaux de protection de Vaise et Serin ne sont pas activement menés ; ils ne sont toujours pas achevés lorsque survient la crue de 1856 treize ans après le début des travaux, ce qui donne une idée de la faiblesse des crédits qui y furent consacrés, et de l’ampleur de la question.

On évoque également la possibilité de dévier une partie du débit de crue de la Saône par une dérivation souterraine pour réduire les hauteurs dans la traversée de la ville. Deux tracés sont envisagés : l’un se déversant dans le Rhône en traversant la colline de la Croix-Rousse, l’autre passant sous la colline de Fourvière à partir du pont de Serin et rejetant une partie des eaux en aval du confluent. Face à l’ampleur de la dépense, estimée respectivement à 23 et 30 millions de francs, aucune des deux possibilités n’a été sérieusement envisagée.

Notes
93.

AML 925 WP 227