IV. L’aménagement de vastes plateformes industrielles « insubmersibles » en lit majeur

IV.1. Le souci de favoriser et préserver les intérêts industriels

Le principe de la création d’une plateforme industrielle insubmersible en rive gauche du canal de fuite de Pierre-Bénite a été adopté dès la conception du projet CNR225. Cependant, afin de répondre à la question urgente du développement du couloir de la chimie, il est décidé d’anticiper sur l’achèvement de l’ouvrage (1966) en réalisant une partie de la plateforme dès la fin des années 1950.

Le Service Navigation est alors chargé de définir les zones à remblayer et les précautions à prendre afin de ne pas aggraver le risque jusqu’à la mise en service de l’aménagement. Une fois le canal de fuite et le canal évacuateur de crue réalisés, l’impact des remblais doit être compensé par l’importance du débit dérivé par la CNR, mais l’Etat est soucieux de ne pas courir de risque d’ici là. Il s’agit de ne pas menacer les enjeux des usines Lumière, Plymouth, de l’Arsenal d’Irigny, des usines de produits chimiques de Saint-Fons et les zones habitées. Remarquons que l’Etat ne se préoccupe ici que d’une éventuelle aggravation locale du risque, mais ne semble absolument pas se soucier des effets du nouvel aménagement sur l’aval.

Trois dispositions sont mises en œuvre sur la base des résultats d’une étude hydraulique confiée au Laboratoire National d’Hydraulique de Chatou. D’une part, les usines Lumière et Plymouth sont protégées par la construction d’une digue de ceinture calée au-dessus du niveau de la crue centennale. D’autre part, le lit du Vieux-Rhône est dégagé : on décide à la fois de déboiser les francs-bords situés entre la rive droite du fleuve et le talus de la voie ferrée Lyon-Nîmes226, et de déraser un champ d’épis noyés situés en rive gauche, au droit de l’usine Rhodiaceta227.

Les terrains choisis pour la création de la zone industrielle se situent dans une zone de stockage des eaux, sans courant, que le Service Navigation juge possible de remblayer sans aggraver l’écoulement des eaux de crue. Le remblaiement est prévu en deux étapes : de 1958 à 1962, 50 ha doivent être mis hors d’eau sous la direction du Service Navigation, suivis d’un remblaiement de 1 million de m3 supplémentaires à partir de 1962, encadré par la CNR. L’écoulement doit être assuré par la pose de buses sous une partie des remblais projetés. L’accumulation des eaux d’infiltration entre le terrain naturel et les remblais sera évitée grâce à une couche de limon disposée dans les creux, et le ménagement d’une pente suffisante pour drainer les eaux d’infiltration vers le fossé du chemin départemental n°4.

Notes
225.

La zone industrielle prévue est limitée au nord et au sud par l’usine Rhodiaceta (dite de Belle Etoile) et le lieu dit « La Pagantière », à l’est par l’autoroute Lyon-Vienne entre la porte de Feyzin et Solaize.

226.

Ces travaux de déboisements sont effectués sur 1 km, du PK 7 au PK 8.

227.

Rapport de l’Ingénieur en Chef Agard des 24 et 31 octobre 1962