V.2. Un remblaiement incontrôlé qui inquiète l’Etat

En 1975, Le Service Navigation réalise soudain l’ampleur de ces excès (cf. fig. 67 p. 333) et fait alors part au Préfet du Rhône de son inquiétude quant à l’impact des volumes remblayés sur le risque d’inondation dans le secteur et à Lyon : « toutes les réserves sont à faire sur les conséquences actuellement imprévisibles qui résulteraient d’une crue importante du Rhône et dont rien n’exclut le retour » 232.

Les inquiétudes concernent en particulier certains remblais qui n’ont pas fait l’objet d’une demande d’avis auprès du SNRS :

  • les dépôts de l’entreprise Laferrère vers le PK2
  • ceux effectués pour la réalisation d’une zone industrielle vers le PK5
  • des dépôts au droit du PK7 : les remblais de l’entreprise Laferrère et de la Société Déblais-Service en rive droite ; ceux de l’entreprise Del Castillo dans l’Ile de la table Ronde, en rive gauche, autorisés par arrêté préfectoral du 10 juillet 1974 sur proposition du Service des Mines, sans que le SNRS n’ait été consulté alors même qu’ils sont d’une « importance volumique exceptionnelle » 233.

L’Etat enjoint donc la CNR à clarifier la situation en réalisant une étude hydraulique qui permette d’apprécier les conséquences des remblais existants ou prévus sur l’écoulement des crues. Dans l’attente des résultats, le Préfet décide un moratoire sur les remblais.

L’étude, confiée au LNH de Chatou, conclut a posteriori que l’impact des remblais sur le risque d’inondation est localement compensé par l’importance du volume dérivé dans le canal de fuite (1200 m3 pour une crue centennale), par la revanche des digues édifiées et par les dragages prévus entre le pont de Vernaison et la restitution du canal au Rhône, sur la commune de Ternay. Il est même prévu que les dragages provoquent un abaissement de la ligne d’eau de la crue centennale, malgré les dépôts prévus234. La situation pour une crue égale à celle de 1957 et pour une crue centennale n’étant finalement pas aggravée dans la plaine du Rhône entre Lyon et Grigny, les remblais projetés sont acceptés. Encore une fois, seule une éventuelle aggravation locale du risque inquiète les services de l’Etat, alors que les conséquences sur l’aval ne sont pas prises en compte ni même évoquées.

Notes
232.

SNRS, rapport de l’Ingénieur en Chef T. Crousle, 5 février 1975

233.

SNRS, rapport de l’Ingénieur en Chef T. Crousle, 5 février 1975

234.

Courrier du Directeur Général de la CNR à l’Ingénieur en Chef du SNRS, 29 mai 1975 ; Aménagement de Pierre-Bénite, Rhône court-circuité : calcul des lignes d’eau de crues, étude CNR d’après les calculs de lignes d’eau du LNH de Chatou  9 mai 1975