I.4. Tentatives communales de protection des terres agricoles contre les débordements du fleuve

Malgré l’amélioration apportée par les travaux de défense, la municipalité ne se satisfait pas pour autant de cette situation et poursuit son objectif d’endiguement complet en dépit de la loi de 1858 afin de protéger de la submersion les terres communales ou particulières situées en avant de l’endiguement. Mais cette ambition est freinée par la vigilance des services techniques de l’Etat et par la faiblesse des ressources communales.

En 1884, le conseil municipal est une première fois autorisé à exhausser de 1,4 m, soit 2 m sous le niveau de la crue de 1856, le chemin de la Bletta, situé en bordure du Rhône, au droit des quartiers du Bois-Perret et de La Feyssine. Dans les années suivantes, les communes de Vaulx-en-Velin et Villeurbanne présentent plusieurs demandes analogues, mais se heurtent à chaque fois au refus strict du Service Spécial, au nom de la loi de 1858. Cette obstination semble irriter quelque peu les ingénieurs du Service Spécial, qui soupçonnent la municipalité de Vaulx-en-Velin, et dans une moindre mesure celle de Villeurbanne, de chercher à protéger la totalité de leur territoire au moyen d’exhaussements ponctuels de chemins qui finissaient par constituer un endiguement continu. Lasse de solliciter l’Administration sans résultat, la municipalité de Vaulx-en-Velin se tourne même vers le Président de la République : par une pétition adressée au Chef de l’Etat de 6 octobre 1888, elle demande une subvention pour améliorer la défense de la commune contre les crues. Signalant l’aggravation de la fréquence des inondations, qu’il attribue à la construction des quais de Lyon, et déplorant le coût important occasionné par l’entretien des enrochements de berge, le conseil municipal demande une nouvelle fois l’édification d’un rempart insubmersible et suffisamment solide pour résister aux corrosions du fleuve275. Sans surprise, la requête des intéressés est rejetée par le Ministre des Travaux Publics le 4 janvier 1899.

Ne pouvant se protéger par un rempart de protection, la commune envisage alors de réduire l’aléa en améliorant l’écoulement des crues par un déboisement des îles, espérant ainsi pouvoir abaisser le niveau des submersions de façon significative (délibération du conseil municipal de Vaulx-en-Velin du 12 février 1899). Cette initiative reçoit un avis très favorable du Service Spécial, mais le projet élaboré par les Ponts-et-Chaussées représente une fois de plus une dépense hors de portée des ressources communales276.L’idée est donc abandonnée par délibération du 26 avril de la même année.

Suite à l’endommagement des enrochements défendant le quartier du Bois-Perret par la crue de 1910, un projet d’exhaussement et de consolidation du chemin de halage bordant les quartiers du Bois-Perret et de La Feyssine finit par être accordé, mais ne sera pas mené à bien pour des raisons budgétaires.

Elaboré à l’initiative de la municipalité de Vaulx-en-Velin avec l’accord de Villeurbanne, également intéressée par un renforcement de la protection dans ce secteur, ce projet est présenté le 15 janvier 1912 par le Service Spécial, pour un coût estimé à 24 500 francs277. L’Etat accepte de financer un tiers de la dépense, le reste demeurant à la charge des communes de Vaulx-en-Velin, Villeurbanne et Lyon. Ces dernières sont concernées au nom de la défense de la digue insubmersible des Brotteaux contre les corrosions du fleuve. Mais Lyon et Villeurbanne refusent de payer respectivement plus de 1 000 et 2 000 francs (soient 4 et 8 % du coût total), laissant plus de la moitié du montant des travaux à la charge de Vaulx-en-Velin. Cela s’explique probablement par le fait que le territoire de Vaulx-en-Velin constitue une « zone tampon » entre le fleuve et la digue des Brotteaux, ce qui fait que la menace des corrosions ne semble pas immédiate aux yeux des édiles lyonnais et villeurbannais. Faute de parvenir à s’accorder quant à la participation respective de chacun, le projet est abandonné. Deux nouvelles demandes de réparations sont ensuite formulées consécutivement aux crues de janvier 1918 et février 1928, mais l’Etat et la ville de Lyon estiment alors les dégâts suffisamment négligeables pour ne pas faire courir de risque à la digue des Brotteaux, et excluent donc d’apporter leur concours. La commune comble alors les lacunes créées dans la défense de rive par des immondices recouvertes de terre278.

Notes
275.

Archives du SNRS, inondations, demandes d’indemnités et de travaux, C1311 II D7439 L4, commune de Vaulx, rapport de l’ingénieur ordinaire du Service Spécial, 11 décembre 1888

276.

Archives du SNRS, inondations, demandes d’indemnités et de travaux, C1311 II D7439 L4, commune de Vaulx-en-Velin

277.

Archives du SNRS, inondations, demandes d’indemnités et de travaux, C1311 II D7439 L4, commune de Vaulx-en-Velin

278.

Archives du SNRS, inondations, demandes d’indemnités et de travaux, C1311 II D7439 L4, commune de Vaulx-en-Velin