II.1.c. Exhaussement du chemin de halage en rive droite du canal de Jonage

En plus de cela, le rempart de protection doit être complété par l’exhaussement du chemin de halage du canal de Jonage à une cote insubmersible, soit 50 cm au-dessus du niveau de la crue de 1928. La construction du canal de dérivation de Jonage au sud du secteur, au pied des Balmes viennoises, remonte à la fin du XIXe siècle (photos 32 et 33). Mis en service en 1999, il alimente l’usine hydroélectrique de Cusset ; à la sortie de l’usine, le canal de fuite s’éloigne du tracé des Balmes pour aller rejoindre le canal de Miribel au nord et isole ainsi le quartier Saint-Jean du reste de Villeurbanne284. Lors de la crue du 16 février 1928, les eaux avaient submergé la digue édifiée en rive droite de l’ouvrage, dans la section située en aval du pont de Cusset, alimentant ainsi l’inondation des quartiers du Pont des Planches, à Vaulx-en-Velin, et de Saint-Jean à Villeurbanne285. Une digue large de 2 à 7 m est ainsi prévue depuis le pont sur le déversoir de la Rize, en amont du pont de Cusset, jusqu’à l’extrémité aval de la digue en terre des Brotteaux, devenue digue Saint-Jean. Enfin, pour éviter l’inondation du secteur nouvellement protégé par les eaux de crue de la Rize, il est prévu de couvrir le ruisseau et de poser des vannes sur le pont qui le franchit, à proximité du pont de Décines, ainsi que sur l’aqueduc du contre-fossé du canal d’amenée de Jonage, 300 m à l’aval de l’usine de Cusset286.

Le projet, dont le coût est initialement estimé à 17 millions de francs, est approuvé par la commune de Vaulx-en-Velin le 16 mai 1950, puis par le syndicat du quartier Saint-Jean le 26 juillet de la même année, et enfin autorisé par le Ministre des Travaux Publics le 16 avril 1952. Il doit permettre de protéger une zone de 300 ha habitée à l’époque par 2 300 habitants et comportant 110 ha de terres cultivables, aux lieux dits Le Mas du Taureau, le Pot Carron et les Noisettes. A ce titre, le projet reçoit une subvention à hauteur de 30 % du Ministère de l’Agriculture, qui s’ajoute à une participation identique du Ministère des Travaux Publics et des Transports, pour la protection des lieux habités, et à celle du département du Rhône, se portant à 20 % du montant total, pour la protection des chemins départementaux n°5 et n°6. Les 20 % restant sont pris en charge à parts égales par les communes de Vaulx-en-Velin et de Villeurbanne.

Photo 32. La digue de halage en rive droite du canal de Jonage
Photo 32. La digue de halage en rive droite du canal de Jonage

(source : AML, sous-série 38 Ph, Fonds de la Société lyonnaise des transports en commun TCL00073).

La vue est prise vers l’amont, face à l’usine de Cusset (au fond à droite)

Photo 33. Le tronçon exhaussé de la digue de halage
Photo 33. Le tronçon exhaussé de la digue de halage

La vue est prise vers l’aval. On distingue le niveau initial de la digue de halage en bas à gauche.

Fig. 72. Carte de synthèse de l’endiguement de la plaine de Vaulx-en-Velin.
Fig. 72. Carte de synthèse de l’endiguement de la plaine de Vaulx-en-Velin.

Finalement, le tracé de la digue de Vaulx-en-Velin sera reculé 200 m vers le nord (photo 34) pour englober la totalité du quartier du Petit Pont, suite aux demandes exprimées par le comité d’intérêt local de ce quartier en 1952 et 1953. Les frais supplémentaires sont pris en charge par les intéressés. Le projet coûtera au total près de 22,2 millions de francs.

Commencé en 1954 et achevé en 1956, le rempart a rempli son office lors de la crue de 1957 (photo 35). Seule la digue de halage a été renforcée après-coup à la demande des communes, en un point où la perméabilité des remblais sur lesquels la digue a été fondée a causé la formation de renards importants en février 1957, qui ont fait craindre la rupture de l’ouvrage287. Le remblai initial est alors fouillé jusqu’au gravier et remplacé par du remblai argileux compacté, pour un coût de 450 000 francs réparti selon les mêmes modalités que le projet principal.

Mais l’entretien des ouvrages pose question. En 1958, le maire de Villeurbanne fait part au SNRS de son inquiétude concernant l’incidence des arbustes qui ont poussé sur la digue et demande leur recépage par EDF. L’Etat refuse d’effectuer ces travaux qui sont normalement à la charge des communes responsables de l’ouvrage. De la même façon, la digue de Vaulx-en-Velin est réputée pour son mauvais état qui hypothèque son efficacité et fait peser sur l’agglomération le risque d’une rupture (photo). Risque qui serait d’autant plus dommageable que, dans l’esprit des vaudais, l’ouvrage a définitivement supprimé la contrainte d’inondation.

Photo. 34. Le tronçon reculé vers le nord de la digue de Vaulx-en-Velin.
Photo. 34. Le tronçon reculé vers le nord de la digue de Vaulx-en-Velin.
Photo 35. La digue de Vaulx-en-Velin lors de la crue de février 1957.
Photo 35. La digue de Vaulx-en-Velin lors de la crue de février 1957.

(source : SNRS).

Pour la première fois, le village de Vaulx-en-Velin a été épargné par les eaux, lors d’une crue importante.

Notes
284.

Le tracé de l’ouvrage, calé au pied du versant des Balmes en bordure orientale de la plaine, respectait donc le principe de la non entrave à l’écoulement des eaux édicté par la loi du 28 mai 1858.

285.

Archives SNRS, Demandes des riverains, C1474 D8515 L25, rapport du 17 décembre 1948

286.

Archives SNRS, C1474 D8515 L25, défense du quartier Saint-Jean et de la commune de Vaulx-en-Velin contre les inondations, notice descriptive et justificative, 17 et 20 mars 1950

287.

Délibération du conseil municipal de Vaulx-en-Velin le 27 mai 1957, et de celui de Villeurbanne le 8 juillet 1957