P. LE REST 48 a d’abord été professeur puis est devenu éducateur spécialisé et ethnologue. Il intervient en prévention de l’alcoolisme et de la toxicomanie auprès d’enfants d’âge primaire et de jeunes de collège et de lycée du département de l’Eure-et-Loir. Il est chargé de cours à l’Université de TOURS.
Il nous présente l’opposition entre un monde d’adultes étranger aux adolescents leur imposant une violence, trop souvent non dite et les adolescents à cet âge de l’être humain, si fragile et si propice à la dépressivité et au doute existentiel. Cette adolescence encline aux conduites agies, somatiques ou transgressives révèle le mal-être et la difficulté à trouver sa place. Entre les deux, la prise de toxique représente le moyen idéal de se mettre à distance ou de mettre l’autre à distance.
Il prône que la prévention si elle se veut efficace, ne doit pas se cantonner à une approche-produit et aux jugements de valeur culpabilisants ou répressifs mais doit tenir compte de l’affectivité et de la relation humaine. Il faut accorder toute son attention au jeune, présent à lui, à son vécu, à ses représentations, prendre la distance nécessaire avec son savoir et ses techniques, pour être surtout disponible à ses difficultés et à sa parole en un mot être empathique au sens de Rogers. Car « les adolescents reprochent souvent aux adultes de ne pas les écouter, de ne pas entendre leur souffrance ». Pascal LE REST rend compte d’une manière détaillée de ses diverses interventions au sein des établissements où il a été invité.
Pour les élèves de 6ème, dans le cadre d’une action anti-tabac, les représentations qu’ils se font de l’usage du tabac sont particulièrement dévalorisées. Pour eux, les jeunes fument « pour faire comme les grands ». « Ils sont déjà conscients de l’effet mimétique dans les procédures initiatiques qui prévalent à l’usage de tabac ». Le fait de fumer ne renvoie à aucun critère positif. Il n’y a aucune évocation de la détente, du plaisir et du goût.
‘Pour des élèves de 5ème dans le cadre d’une intervention sur les drogues, il y a une nette différence dans la formulation des représentations par rapport aux élèves de 6ème. Ils sont moins catégoriques sur les produits et « P. LE REST souligne bien, comme nous le pensons nous-mêmes que « » Plus loin, il est confronté à ce qui peut troubler au départ l’acteur de prévention à savoir se trouver face à des jeunes qui consomment. Il met en avant la difficulté qu’il y a à constater l’opposition entre deux groupes et de ne pas se trouver entre deux feux. L’acteur de prévention ne doit pas être celui qui définit le bien du mal mais doit proposer une proue identificatoire aux adolescents qui en sont avides. Ainsi souligne-t-il l’importance de ne pas être dans la tartufferie : par exemple, ne pas faire de la prévention du tabagisme si l’on est soi-même fumeur.’Dans une autre intervention auprès de classe de 5ème, dans le cadre d’un échange qui se veut « libre », il note Il insiste également sur l’importance de l’analyse de la demande des jeunes dans ce type d’intervention en insistant sur le fait qu’il est important de rendre les jeunes acteurs plutôt que de les laisser dans la passivité. Il montre bien également que l’évaluation des actions entreprises n’est pas chose facile et conclut sur ce que nous appelons nous mêmes des questions qui fâchent : Dans une classe de 4ème, il évoque une stratégie d’intervention sur le cannabis dans un collège à distance d’une « histoire » d’intervention et de cession. Il développe une stratégie impliquant les adultes qu’ils soient enseignants ou professeurs avant l’intervention auprès des adolescents. Il note : Dans ces classes de 4ème, le cannabis est considéré le plus souvent comme une drogue douce comme le tabac. Certains citaient même le Rapport Roques qui disait que le cannabis est moins nocif que le tabac comme ils l’avaient entendu à la télévision. On note l’expression aussi bien d’idées telles que : « Les parents ne nous aiment pas », « Ils ne nous écoutent pas », « La drogue est une illusion », « Se droguer n’arrange rien », « C’est un moyen de se faire de l’argent facilement », « C’est une forme de suicide », « C’est un passage obligé ».
Si l’alcool n’est jamais cité comme une drogue, le cannabis est le produit qui suscite le plus d’interrogations. Et il met en avant quelque chose qui devrait interroger plus souvent les politiques : Nous ne pouvons que renchérir sur cette observation à travers notre expérience propre. Lors de nos interventions, les étudiants dans le cadre de l’enseignement ou les adultes dans le cadre de réunions de prévention sont tout autant ignorants et étonnés.
‘En classe de 3ème, comme en 4ème, il est bien rare que l’alcool soit cité comme une drogue. Pour le cannabis, les discours sont différents que l’on ait essayé ou pas. On voit bien également En mettant en avant ce paradoxe, il pointe un élément essentiel et incontournable de la psychopathologie de l’adolescent. Le paradoxe autour de la prise de risque, c’est qu’on ne peut nier le danger des produits ce qui pourrait inciter à la consommation et que trop insister sur les dangers peut produire des réactions négatives par rapport à la prévention. Il faut donc permettre à l’adolescent de trouver lui-même ses propres limites. Il peut se poser ainsi la question : qui demeure également une question centrale en matière de prévention.’Enfin, un des intérêts des actions de prévention auprès de cette classe d’âge est de susciter les interrogations qui vont mettre à jour les paradoxes multiples que nous avons évoqués. Ce que P. LE REST note sous la forme : L’intérêt pour nous de citer ces passages est de montrer l’évolution des représentations sur les débuts de l’adolescence, la nécessaire adaptation du discours et la connaissance de la psychopathologie. Nous aurons bien entendu l’occasion d’y revenir pour étayer des propos à venir.
LE REST, (P.), Les jeunes, les drogues et leurs représentations, L’Harmattan, Paris, 2000, 188 p.