Deuxième partie. Genèse d’une insurrection

Chapitre IV. La République bleue, blanche, rouge

« Tout l’enjeu des révolutions est inscrit dans la diversité des significations données au mot république. C’est pourquoi je tends à privilégier la recherche de l’historicité qui exige l’attention au sens des mots, à condition de mettre celui-ci en relation avec le sujet qui le porte »  631 .

Cet avertissement lancé par Michèle Riot-Sarcey nous servira de balise pour définir ce concept de République. « La République » ? Sommes-nous seulement suffisamment armés pour nous attaquer à la définition de ce concept qui, d’après son étymologie latine, selon Alain Rey  632 , renvoie au « rien », à ce pronom qui par affaiblissement de sens a pris la signification vague et générale dévolue à « chose ». Claude Nicolet qui lui a consacré une longue étude nous décourage d’emblée : « Je me propose de rechercher si, en français, le mot République a un sens »  633  ; cinq cents pages plus loin, son interrogation initiale laisse toujours « subsister doutes et incertitudes »  634 . Sommes-nous donc suffisamment aguerris pour nous aventurer sans assistance sur ce terrain qui risque très vite de ce transformer en bourbier et qui a déjà été exploré en 2002 par plus d’une centaine d’auteurs sous la direction de Vincent Duclert et Christophe Prochasson. Ce collectif d’auteurs avait voulu rassembler leurs réflexions dans une somme dédiée à « la compréhension de la République ». Organisé en huit ensembles thématiques  635 , Le Dictionnaire critique de la République  636 voyait le jour afin « d’éclairer l’Histoire d'une culture nationale et d'une tradition démocratique sur lesquelles l’esprit critique se doit d'intervenir ». Dès sa parution, ce pluralisme de points de vue suscitait la polémique ouverte par Nicolas Rousselier dans les colonnes de la tribune de L’OURS :

‘« Entre l’éclectisme qui est censé laisser le lecteur libre de ses appréciations et le désarroi dans lequel ledit lecteur pourra tout aussi bien plonger, il y a une différence qui, semble-t-il, a été sous-estimée par les directeurs »  637 .’
Notes
631.

Michèle RIOT-SARCEY « Conclusions : comment meurt la République », Actes du colloque de Lyon, déjà cité, pp. 454.

632.

Dictionnaire historique de la langue française sous la direction d’Alain REY, Dictionnaires Le Robert, Paris, 1998, (1ère édition 1992).

633.

Claude NICOLET, L’idée républicaine en France (1789-1924). Essai d’histoire critique, Gallimard 1994, (1ère édition 1982), p 9.

634.

Claude NICOLET, L’idée républicaine en France, ouv. cité, p 502.

635.

« Des Républiques en France, de 1789 à nos jours », « Les Idées et les Valeurs », « Les Modèles et les Représentations », « Les Espaces et les Temps », « Les Pouvoirs et les Institutions », « Les Symboles et les Savoirs », « Les Pratiques et les Identités », « Des républicaines et des républicains en France ».

636.

Dictionnaire critique de la République, collectif d’auteurs sous la direction de Vincent DUCLERT et Christophe PROCHASSON, Flammarion, 2002, 1340 p.

637.

Nicolas ROUSSELLIER, dans L’OURS, n° 326, mars 2003.