« Mourir pour des idées, l’idée est excellente, […] Mourons pour des idées, d’accord, mais de mort lente » fredonnait Georges Brassens, mais les résistants de 1851, eux, s’exposaient en connaissance de cause 1370 à périr de mort violente, peut-être pour une « illusion ». Pierre Bourdieu rappellerait alors que « l’illusio » :
‘« c’est le contraire de l’ataraxie, c’est le fait d’être investi, d’investir dans des enjeux qui existent dans un certain jeu, […] et qui n’existent que pour les gens qui, étant pris dans ce jeu et ayant des dispositions à reconnaître les enjeux qui s’y jouent, sont prêts à mourir pour des enjeux qui, à l’inverse, apparaissent comme dépourvus du point de vue de celui qui n’est pas pris à ce jeu, et le laissent indifférent » 1371 . ’Quels étaient les enjeux de leur mobilisation ? Ont‑ils tous voulu donner leur vie pour sauver la République ? Ou pour reprendre l’interrogation de Voltaire dans sa Vingt-cinquième Lettre philosophique : « la difficulté n'est pas seulement de savoir si on croira des témoins qui meurent pour soutenir leur déposition, […], mais encore si ces témoins sont effectivement morts pour cela […] ». Autrement dit : les insurgés de 1851 étaient-ils tous entrés en résistance pour sauver la République ? La problématique pourrait être aussi abordée avec une autre perspective. Y a-t-il forcément corrélation entre militants républicains des années précédant le coup d’État et participants aux insurrections de Décembre 1851 ?
Le département de l’Ardèche était en état de siège depuis le mois de septembre 1851.
Pierre Bourdieu, « Un acte désintéressé est-il possible ?», dans Raisons Pratiques. Sur la théorie de l’action, Éditions du Seuil, 1994, pp. 152.