1851

3 janvier 1851. Le général Changarnier est révoqué. Démission de plusieurs ministres dont le ministre de la Guerre.

22 janvier 1851. Perquisition du procureur de la République à Serrières chez le perruquier Dutal dit Arago, président du comité démocratique de Serrières. Les portraits de Robespierre, Saint‑Just, Couthon ont été saisis.

23 janvier 1851. Selon le commissaire de police de Vallon, vers 22 heures, une centaine de démocrates sociaux ou socialistes chantaient La Marseillaise au café Hyppolite Villard. « La Marseillaise, chantée par une foule d’une centaine d’individus, prenait un caractère politique qu’on ne pouvait tolérer ». Un procès verbal a été dressé à Villard.

24 janvier 1851. Remaniement ministériel après la crise provoquée par la destitution du général Changarnier qui cumulait les commandements de la division militaire et de la Garde nationale de Paris. Des parlementaires du parti de l’Ordre font cause commune avec la gauche pour voter contre la confiance accordée à ce « petit ministère ».

Nuit 26/27 janvier. Troubles à Aubenas. Des jeunes gens ont parcouru les rues en chantant et en renversant les bornes des rues et les escaliers qui se rencontraient sur leur passage, une croix en bois a été pendue sur la caisse de l’arbre de liberté, place du Champ de mars. Les auteurs arrêtés ont été condamnés à 15 francs d’amende et cinq jours d’emprisonnement.

5 février 1851. Agitation à Vallon. Placards contre le commissaire de police et le juge de paix. Une guillotine rouge a été peinte sur la porte du juge de paix.

6 février 1851. Circulaire du ministre de l’Intérieur Vaisse : « le devoir de l’autorité est de veiller avec soin au maintien de la tranquillité publique : vous aurez donc à user des pouvoirs que la loi du 19 juin 1849 vous confère. Il importe d’empêcher ou d’interdire toute démonstration qui vous semblerait incompatible avec le bon ordre ou qui serait de nature à exalter les mauvaises passions ».

6-26 février 1851. Le 2ème conseil de guerre juge à Lyon 39 inculpés (24 arrêtés et quinze par contumace) impliqués dans les événements de Saulce et Cliousclat du mois de septembre 1850. Ernest de Saint-Prix, contumace, est condamné à 20 ans de prison, les autres contumaces à des peines allant de cinq à dix ans de détention. Les accusés présents à leur procès écopent de peines s’échelonnant de 6 mois à cinq ans d’emprisonnement.

19 février 1851. Manifestation devant l’hôtel de ville de Vallon contre le commissaire de police de la ville. 500 ou 600 personnes. Jets de pierres.

23 février 1851. Le sous-préfet de Tournon apprend que le général Lapeyre lui envoie 200 artilleurs dont 30 à cheval pour s’opposer à la tenue d’un banquet à Annonay organisé par

24 février 1851. Rapport du sous-préfet de Tournon sur le banquet d’Annonay qui s’est tenu dans un parc public: « pour empêcher toute apparence de banquet, j’avais fait briser toutes les tables qui avaient été conscrites. 700 à 800 personnes se sont réunies par famille ou par groupe de 7 ou 8. Quelques-uns ont chanté la Marseillaise, on les a fait taire. On leur a ordonné de se retirer vers 5h ».

24 février 1851. 200 jeunes gens de Joyeuse ont parcouru la commune de Rosières en chantant des « airs séditieux ».

24 février 1851. Enterrement de Bérard, fils d’un conventionnel de 1793. Discours prononcé par Victorin Mazon : « l’heure de la moisson a sonné, il est honteux de subir plus longtemps le joug de l’administration ordurière de l’Ardèche ». 300 auditeurs ont ensuite assisté à un repas.

28 février 1851. Rapport du sous-préfet de Largentière « Le calme qui subsistait depuis deux mois dans l’arrondissement fait place pour les cantons du midi à un état d’agitation réveillée par l’anniversaire des événements de février ».

2 mars 1851. Au Teil, selon le maire, « une farandole assez nombreuse a parcouru les rues. Des chansons impies et démagogiques ont porté l’effroi parmi les honnêtes gens. Manifestation à la porte de l’église violemment frappée à coup de pied au moment où plus de 200 personnes étaient en prière devant le Saint Sacrement exposé. La chanson la plus atroce contre le souverain pontife a été chantée sous les fenêtres du presbytère. La Carmagnole et la Marseillaise ont été chantées. On a attaché à l’arbre de la Liberté une croix et une lanterne. Sur les observations d’un honnête passant des injures et des menaces de mort dignes de 93 ont été proférés ».

17 mars 1851. Rapport du commissaire de police de Vallon suite à des manifestations à l’annonce du jugement des prévenus de Salavas à Privas. « Des individus, des deux sexes, hommes, femmes, filles et enfants, le tout composé de tout ce qu’il y a de plus vil et de plus crapuleux dans Vallon, se sont livrés hier soir depuis 7h30 jusqu’à 10h du soir à des scènes de désordre... 400 à 500 personnes formaient le rassemblement. , une bande de femmes et de filles occupait le centre, les filles se livraient à des chants républicains, chantant gesticulant, en criant à tue-tête de manière qu’on ne voyait que bras et tête en mouvement  ».

18 mars 1851. Décret du président de la République dissolvant le conseil municipal d’Aubenas. Le 2 avril, le préfet nomme une commission de cinq membres : Cuchet Gabriel, Mathon expert, Baratier avocat, Gay-Laprade aîné, négociant, de Rocher Jules. 3K 85, n°60.

23 mars 1851. Ouverture du procès en cours d’assises des prévenus inculpés dans le cadre de l’affaire de Salavas.

23 mars 1851. Rapport du sous-préfet de Largentière concernant Vallon : « On coupe les mûriers du juge de paix, on incendie sa porte, on ne parvient pas à saisir les prévenus de Salavas, on met le feu à la maison du commandant de la garde nationale qu’on sait dévoué à l’ordre, on tente d’assassiner le commissaire de police, on lui jette des pierres plein le visage...Aucune poursuite judiciaire n’est possible, personne n’a rien vu, rien entendu ».

14 mars 1851. Théodore François Emmanuel Boissin-Laroche, de Saint-André-de-Cruzières, est condamné par le tribunal correctionnel de Largentière à douze jours de prison pour outrages envers Jean Louis Eugène Graffand, maire de la commune. Il a été défendu par Jules Cazot, avocat montagnard d’Alès. Son retour donne lieu à des troubles dans la commune de Saint-André-de-Cruzières.

25 mars 1851. Suspension des fonctions de Dumas, premier adjoint au maire de la commune de Saint-André-de-Cruzières. « Considérant que dans la journée du 16 mars alors que des désordres graves avaient lieu dans la commune, Dumas n’a pas prêté son concours au maire pour maintenir la tranquillité publique Il a manqué à tous ses devoirs ». 3k 85, n°54.

24 mars 1851. Rapport du commissaire de police de Vallon : « un grand nombre de rouges sont allés sur la montagne cueillir du thym ou de petits symboles ou emblème de la montagne. Le soir j’ai entendu des chants nocturnes sur la place de la halle. […] J’ai aperçu un rassemblement de 200 à 300 personnes. Dans la prévision de cette manifestation, j’ai recommandé au brigadier de venir immédiatement avec toute la brigade, la baïonnette au bout du fusil ».

31 mars 1851. A Largentière à 10h30 du soir, rassemblement assez considérable devant la caserne de gendarmerie. Des cris séditieux ont été renouvelés à 11h30. Le lieutenant qui s’est montré à la terrasse a été assailli par des pierres lancées en grand nombre. A Joyeuse, troubles en relation avec l’arrestation d’une personne interpellée dans l’affaire de Saint-André-de-Cruzières. Le maire a voulu procéder à une arrestation. Une soixantaine de personnes ont arraché le prisonnier à la gendarmerie. Deux gendarmes ont eu leurs vêtements complètement déchirés.

La préfecture a été assaillie chaque soir à coups de pierres. Les vitres ont été brisées.

1 er avril 1851. Circulaire du ministère de l’Intérieur concernant « un mouvement insurrectionnel comprenant une vingtaine de départements. L’opinion serait bien préparée et attendrait un signal ».

4 avril 1851. À Largentière, 70 à 80 personnes font la farandole et chantent la Marseillaise. En apercevant la gendarmerie, les cris de « à bas les mouchards » ont été proférés. Le maire qui faisait quelques remontrances à des jeunes gens a été bousculé.

10 avril 1851. Remaniement ministériel. Léon Faucher à l’Intérieur.

10 avril 1851. Le ministre de l’Intérieur adresse par mandat une somme de 300 francs destinée à des frais de police secrète.

14 avril 1851. A l’annonce de la clémence du jury dans le procès des prévenus de Salavas, une foule considérable se porte au devant des acquittés, (1 500 personnes environ chantant la Marseillaise). Une troupe de jeunes filles a entonné un hymne républicain. Les cris de « vive la République » ont été poussés.

18 avril 1851. Le sous-préfet de Largentière au préfet : le mouvement dont vous me parliez dans votre lettre du 14 est annoncé à Largentière parmi la gent socialiste pour la nuit. Les fidèles ne connaissent pas encore le jour mais ils attendent à chaque instant le mot d’ordre de Saint-Étienne et de Lyon. L’insurrection ne devra pas dépasser le 4 mai ».

1er mai 1851. Le ministère de l’Intérieur avertit le préfet que selon un rapport du chef de la 15e Légion de gendarmerie une grande réunion de chefs socialistes de la Drôme, de la Haute-Loire et de l’Ardèche doit avoir lieu à Aubenas dans le courant de mai.

3 mai 1851. Rapport de gendarmerie à propos d’une rixe qui a éclate à Villeneuve-de-Berg. Arrestation mouvementée. Les gendarmes ont été frappés à coup de pied.

Nuit du 3 au 4 mai 1851. une trentaine d’individus armés ont parcouru les rues du village de Saulce en tirant des coups de feu et en appelant les habitants aux armes avant de franchir le Rhône pour se réfugier à Baix.

7 mai 1851. Au petit matin, le village de Baix est cerné par 200 militaires sous les ordres du préfet de l’Ardèche. Le plan de cette vaste expédition de police destinée à arrêter les prévenus inculpés dans les événements de Saulce a été projeté par le général Lapène en collaboration avec le préfet de la Drôme et les autorités judiciaires.

16 mai 1851. Un pigeon voyageur a été intercepté alors qu’il s’abattait dans l’écurie de Baratier, aubergiste aux Granges à proximité de Guilherand. Il portait cousu avec un linge à la patte droite deux billets roulés et une inscription codée en chiffres. Le docteur Savin, de la commune de Saint-Péray, voulait absolument qu’on lui remette ce pigeon.

19 mai 1851. Des gendarmes procédant à l’arrestation d’une personne qui a crié « vive la République démocratique et sociale » sont pris à partie par une foule et contraint de lâcher leur prisonnier.

1 er juin 1851. Discours présidentiel de Dijon, le président se plaint de l’Assemblée « Lorsque j’ai voulu faire le bien, améliorer le sort des populations, elle m’a refusé son concours ».

7 juin 1851. Au hameau de Combemaure, dans la périphérie de Grâne, huit des condamnés contumaces dans le procès de l’affaire de Saulce ont échappé à la gendarmerie de Loriol. Au cours de leur fuite, ils ont blessé le brigadier et deux gendarmes.

11 juin 1851. Le ministre de l’Intérieur, faisant état de la demande du préfet de la Drôme, évoque l’idée de mettre en état de siège le département de l’Ardèche ou les arrondissements de Privas et de Tournon. «  Les arrondissements de Privas et de Tournon servent très souvent de refuge aux bandits, sont animés d’un fort mauvais esprit et sont comme autant de réserves où les malveillants politiques de la Drôme trouvent des affiliés et des auxiliaires ».

11 juin 1851. Arrêté préfectoral en relation directe avec les événements de la Drôme : « Quiconque soit pour envahir des domaines, propriétés ou deniers publics, places, soit enfin pour faire attaque ou résistance envers la force armée agissant contre les auteurs de ces crimes, se sera mis à la tête de bandes armées, ou y aura exercé une fonction ou un commandement quelconque sera puni de mort. Les mêmes peines seront appliquées à ceux qui auront dirigé l’association, levé ou fait lever, organisé ou fait organiser les bandes ou leur auront, sciemment et volontairement, fourni ou procuré des armes, munitions et instruments de crime ou envoyé des convois de subsistance, ou qui auront de toute autre manière pratiqué des intelligences avec les directeurs ou commandants des bandes ».

27 juin 1851. Le préfet de l’Ardèche ne partage pas l’opinion de son collègue de la Drôme pour la mise en état de siège du département. « Une semblable mesure n’ajouterait rien aux moyens de répression dont l’autorité dispose ». Il demande la mise en place « d’un système de surveillance secret » pour découvrir les coupables.

3 juillet 1851. Le commissaire de police d’Aubenas est informé de la présence d’une fabrique de poudre à Aubenas à 2 km de la ville « destinée à fournir des munitions à la démagogie ».

7 juillet 1851. Des gendarmes de Largentière voulant arrêter des jeunes gens qui chantaient des chants séditieux ont été assaillis à coup de pierre. L’un d’eux a riposté par un coup de pistolet. Dans la nuit, plusieurs coups de feu ont été tirés au-dessus de Largentière.

9 juillet 1851 Arrêté préfectoral. Les clubs, banquets et autres réunions politiques sont interdits. Recueil des actes administratifs. 3K85, n°129.

11 juillet 1851. Effervescence à Largentière signalée par le sous-préfet suite à des lettres de Ledru-Rollin qui engagent les démocrates à persister dans leurs exigences et que sous peu ils obtiendraient satisfaction.

13 juillet 1851. Selon le sous-préfet, à Largentière, toutes les affiches sur lesquelles étaient imprimées le discours du président de la République ont été maculées d’ordures. On avait apposé sur l’une de ces affiches une bande de papier : « de l’Élysée hélas voici ce qui nous reste, de la m.... à t’offrir en attendant le reste ».

14 juillet 1851. À la fête votive de Grospierres, les gendarmes qui ont voulu procéder à des arrestations se sont fait entourer. On a tenté de les désarmer. Le maire a ordonné au brigadier de faire ranger les gendarmes, croiser la baïonnette et faire les sommations. Il demande au préfet d’interdire les fêtes votives et de mettre le département en état de siège.

18 juillet 1851. Rapport du sous-préfet de Tournon sur la ville d’Annonay « A Annonay les ouvriers se montrent plus turbulents et plus insoumis. Les nuits sont troublées par leurs promenades et leurs chants. J’attribue cette recrudescence à l’approche de la discussion sur révision de la constitution ».

18 juillet 1851. Des chants dans des cafés de la ville de Largentière. La présence de Mazon est signalée. Une personne a été arrêtée. Des jeunes gens de Chassiers, Rocher et Vinezac escortèrent le prisonnier. Au moment de l’incarcération : jets de pierres sur la gendarmerie. Un gendarme atteint a fait feu.

19 juillet 1851. L’Assemblée repousse la révision constitutionnelle.

20 juillet 1851. À Tournon, au milieu d’une foule considérable réuni sur la place des Capucins, plusieurs ouvrier ont chanté une chanson dont le refrain est « mettez au bout de nos fusils tous les ministres de Paris, le Changarnier , le pape aussi, les peuples sont pour nous des frères et les tyrans des ennemis ». Les chanteurs au nombre de sept ou huit ont pris la fuite à l’arrivée des gendarmes.

28 juillet 1851. Le commissaire de Police de Vallon signale des chants montagnards « des monts sacrés de la lumière viens donc déployer ta lumière en 1852 » ainsi que des appels à Ledru-Rollin.

5 août 1851. Interdiction de la fête votive de Montréal autorisée dans un premier temps par le maire. Malgré l’interdiction, des farandoles se mettent en place. La gendarmerie voulut s’y opposer, le maire les autorisa. La présence de Victorin Mazon est signalée. La brigade se retira à 11h du soir. Au départ de la brigade de gendarmerie, le maire signale « des cris anarchiques, bagarres, batailles, coups de pistolets et coups de couteau ».

5 août 1851. Troubles à Labastide-de-Virac. Des gendarmes veulent s’interposer dans une rixe qui a éclaté dans un café « rouge » où étaient « enfermés 200 démocrates protestants ». Ils sont agressés, « des cris de mort furent proférés tumultueusement » Plusieurs habitants du village ont été agressés par des individus originaires de la commune de Salavas.

9 août 1851. Le curé de Malarce signale qu’une société secrète s’organise dans la commune.

10 août 1851. A Laurac, « des événements d’une nature extrêmement grave se sont passés pendant la fête votive qui avait lieu dimanche ».

11 août 1851. Considérant que les fêtes votives ne sont le plus souvent que des réunions politiques déguisées et qu’elles ont donné lieu aux plus graves désordres dans plusieurs communes de l’arrondissement de Largentière à Labastide-de-Virac, et Laurac => La fête de Vagnas du 17 août est interdite. Recueil des actes administratifs 3K85, n°146.

12 août 1851. Les fêtes votives sont interdites dans l’arrondissement de Largentière pendant les mois d’août, septembre, octobre, novembre 1851. Recueil des actes administratifs 3K85, n°149.

12 août 1851. Les réunions périodiques qui se tiennent chez Louis Hilaire, cabaretier aubergiste de Laurac, ont un but politique. La fréquentation de cet établissement, après le guet-apens du 10, constitue un danger permanent pour la sécurité publique. => Fermeture jusqu’à nouvel ordre. Recueil des actes administratifs 3K85, n°150.

13 août 1851. Selon les révélations d’un prévenu de l’affaire de Laurac, Mazon et les « chefs de la démagogie » veulent renouveler à Largentière les troubles de Laurac. « Une rixe sera tentée pour faire sortir la gendarmerie de la caserne, l’attirer dans la ville et on procédera à l’assassinat de ces braves militaires. Les principales autorités se transporteront sur les lieux où on leur imposera le même sort et delà on se jettera sur les prisons et la poudrière ». Le sous-préfet de Largentière croit « l’état de siège entièrement désirable ».

14 août 1851. Le général commandant les 7e, 8e et 9e divisions militaires de Montpellier donne l’ordre de faire partir de la garnison de Pont-Saint-Esprit 300 hommes de troupe qui devront rallier Largentière.

16 août 1851. La tentative pour arrêter Vincent, l’un des inculpés dans l’affaire de Laurac, échoue. « Au moment où les hommes sont partis à une heure du matin, un coup de pistolet a été tiré sur la montagne ».

19 août 1851. Arrestation à Largentière de Courtin ancien porteur de contraintes à Vallon. Compromis dans l’affaire de Laurac. Organisateur des sociétés secrètes à Balazuc selon le garde champêtre.

19 août 1851. Incidents à la fête votive de Valgorge. « 250 jeunes gens appartenant presque toutes à des communes étrangères à Valgorge sont arrivés avec des cravates rouges, des cannes à bec crochus, ils ont poussé des cris anarchiques, chanté des chants prohibés, ils ont dressé sur une place une table, ont commencé un petit banquet et se sont pris à danser autour de la table en continuant à répéter « vive Blanqui, vive Barbès, vive Ledru-Rollin ». L’autorité du maire a été méconnue. On lui a répondu qu’il n’avait pas le droit de parler sans son écharpe ». Deux brigades de gendarmerie et une compagnie de fantassins se sont transportées sur les lieux, les perturbateurs avertis ont pris la fuite dans toutes les directions.

19 août 1851. Arrestation manquée de Lemaire et de Jacques Froment à Lachavade.

21 août 1851. Un soldat isolé d’un détachement stationné à Prunet est abordé par un homme à cheval puis par six individus sortant d’un trou du rocher : « Moi qui te parle, je suis le chef de ces montagnes, mes sociétés m’obéissent, me cachent et quand on me croit d’un côté je suis averti et déjà de l’autre ».

22 août 1851. Des visites domiciliaires ont lieu à Rosières, Lablachère, Joyeuse. 14 fusils de guerre ont été trouvés chez l’armurier Casimir Allemand, le « Mazon de Joyeuse » selon le sous-préfet.

23 août 1851. Agression d’un gendarme de la brigade des Vans à Lablachère. «Trois coups de feu ont été tirés sur lui. Blessé à la cuisse et au genou, dans les reins par du gros plomb ».

26 août 1851. À Saint-Genest, 8 000 à 10 000 personnes présentes à la foire. Plusieurs fois des chants anarchiques ont été commencés mais sur le champ un coup de tambour rappelait tous les militaires qui dispersaient les groupes. « Vers 3h des chants séditieux furent proférés, une arrestation eut lieu, l’agitation fut grande, on criait « zou, zou » et on menaçait de tenter la délivrance du prisonnier. Le soir, on voulait organiser des farandoles. Le capitaine jugea que les allures des démagogues prenaient un caractère assez alarmant pour devoir prescrire de charger publiquement les armes. Cette démarche a suffi pour ramener le calme ».

27 août 1851. Fête de Saint‑Alban. L’intervention de la troupe a été nécessaire pour interrompre des farandoles s’organisant sur la voie publique. Le soir vers 10h quelques pierres ont été lancées de loin sur la troupe. Le lieutenant qui commandait a été blâmé énergiquement par ses supérieurs pour n’avoir pas poursuivi les perturbateurs.

27 août 1851. D’après la préfecture du Rhône, le 20 juin, une réunion secrète et de nuit se serait tenue dans les environs de Grâne. Présidée par Larger qui a joué un rôle actif dans l’organisation des sociétés secrètes de Paris. Une vingtaine de civils, un certain nombre de sous-officiers et de soldats du 13ème de ligne cantonnés dans le pays y assistaient. Larger leur annonça qu’un mouvement insurrectionnel se préparait, que son point central serait dans l’Ardèche, que les insurgés de la Drôme devaient y concourir et qu’on comptait sur une réunion de 25 000 hommes. On fit prêter à ces militaires les serments de prendre part au mouvement et on leur donna pour instruction de tuer leurs officiers s’ils faisaient mine de résister.

28 août 1851. Le ministère de l’Intérieur signale la tenue d’une réunion à Condrieu d’un certain nombre de délégués de l’Isère, de l’Ardèche et du Rhône pour discuter de la nomination d’un candidat que la faction doit porter à la présidence en 1852 ainsi que les moyens de mettre de côté la loi du 31 mai.

31 octobre 1851. Troubles à Vinezac lors de la fête votive autorisée par le maire. Au moment de la fermeture des lieux publics, des patrouilles d’infanterie accompagnant les gendarmes font évacuer les auberges et les cabarets. Un rassemblement « hostile » de 150 personnes se serait formé à la sortie des auberges. Des sommations eurent lieu. Le rassemblement se dissipa et se recomposa en groupe de 15 à 20 personnes dans les principales ruelles de Vinezac. La sentinelle qui gardait l’avant-poste fut attaquée et des pierres lancées sur la patrouille. Les soldats répliquèrent par des coups de feu qui blessent plusieurs personnes. Six arrestations sont effectuées et le maire qui aurait parlé « d’une façon très inconvenante » au lieutenant commandant le détachement, est révoqué de ses fonctions par arrêté ministériel, le 13 novembre 1851.

1 er septembre 1851. Des inculpés dans « le complot de Lyon » acquittés par le Conseil de guerre sont arrivés au Pouzin par le bateau de midi. L’un d’entre eux qui était resté coiffé d’un chapeau noir pendant le trajet de Lyon au Pouzin a retiré une casquette rouge de sa malle et s’en est coiffé en arrivant.

2 septembre 1851. Suspension de Cellier par arrêté préfectoral. 3K 85, n°155.

3 septembre 1851. Arrêté préfectoral interdisant toutes réunions dans le Café de la Fraternité de Dupuis à Vinezac. Fermé jusqu’à nouvel ordre. 3K85, n°156.

2 septembre 1851. Trois coups de pistolet ont été tirés sous les fenêtres de la caserne de Largentière.

7 septembre 1851. Surveillance de la foire et du pèlerinage de Lablachère. 4 000 à 5 000 pèlerins. Selon le sous-préfet il y aurait dix gendarmes, 160 hommes sous les ordres du commandant du 14e de ligne, un lieutenant colonel du 35e de ligne avec près de 400 hommes, 150 hommes sous les ordres d’un capitaine du 16e Léger, 60 hommes du 14e Léger qui ont été portés sur Joyeuse et Lablachère. 30 hommes sur Joannas, 30 hommes pour Pradons, 40 soldats à Largentière.

11 septembre 1851. Arnaud, agent secret relevant de Constant chef de cabinet à la préfecture de Paris, arrive en Ardèche.

12 septembre 1851. Département en état de siège.

13 septembre 1851. Les six prévenus inculpés dans les troubles de Labastide-de-Virac se sont constitués prisonniers. Condamnés à des peines de 6, 10 et 18 mois de prison plus 25 francs d’amende.

15 septembre 1851. A Prades, la fête était dans tout son entrain au moment où un détachement de 30 hommes est arrivé. Tout le monde s’est enfui, les danses se sont arrêtées.

15 septembre 1851. Arrêté préfectoral interdisant le port de la couleur rouge et de signes distinctifs de ralliement. « Considérant que dans plusieurs communes, certains individus affectent de se montrer en public avec des ceintures rouges ou des pièces d’étoffe rouge posées autour du cou et déployées sur la poitrine ou placées à la boutonnière, que de pareils insignes sont des signets de ralliement et de provocation ; que les porter en public, c’est exciter au désordre : le port public de tous insignes de ralliement, non autorisés par la loi ou les règlements de police, tels que bonnets rouges, cravates, ceintures ou rubans rouges, est formellement interdit ». Recueil des actes administratifs 3K 85, n°164.

17 septembre 1851. Pierre Breysse inculpé dans l’affaire de Laurac se serait entretenu avec un soldat devant la porte de la sous‑préfecture

21 septembre 1851. Placards séditieux affichés dans plusieurs points de Largentière. Arrestation de Desportes comme prévenu d’avoir composé et édité le pamphlet.

23 septembre 1851. Quatre chasseurs sont interpellés dans la commune de Saint‑Sylvestre par la gendarmerie. Un des chasseurs assène un coup de crosse sur la tête d’un gendarme tandis qu’un autre chasseur ouvre le feu sur le gendarme. Arrestations, les quatre chasseurs sont traduits devant le conseil de guerre. Selon le sous‑préfet de Largentière « Il faut imprimer à la population des campagnes une crainte salutaire ».

24 septembre 1851. Selon le commandant de Luxer, 90 hommes de son bataillon stationnés au Pont-Saint-Esprit allaient être dirigés vers Largentière pour s’ajouter aux 360 hommes de troupe déjà en place.

25 septembre 1851. Arrivée d’un agent de renseignement de la police secrète à Largentière.

25 septembre 1851. Selon les renseignements fournis par le maire de Lagorce : les affiches officielles relatives à l’état de siège ont été couvertes d’ordures et déchirées à Vallon.

26 septembre 1851. Placards « séditieux » affichés dans plusieurs points de Largentière.

27 septembre 1851. Arrêté du général Faivre , commandant l’état de siège en Ardèche, prescrivant le désarmement de toutes les gardes nationales.

28 septembre 1851. Selon le capitaine commandant la gendarmerie du département des affiches ont été placardées dans les communes de Vallon et Jaujac : à Jaujac : il est défendu par ordre de M le Préfet de chier sous peine de manger la merde, à Vallon sur l’affiche annonçant l’état de siège : Servitude, Privilège, égoïste, arbitraire. Plus bas au nom des burgraves, mangeurs de budget, gare 52.

1 er octobre 1851. Arrêté du général Faivre interdisant la vente et le colportage du Suffrage universel, journal édité dans l’Hérault sous la direction d’Eugène Guiter, ancien préfet de l’Ardèche. Les directeurs des postes devront retenir tous les numéros.

4 octobre 1851. Rappel à l’ordre du général Faivre au préfet « On me rend compte que mon arrêté du 27 septembre relatif au désarmement de la garde nationale n’est parvenu à Largentière que le 2 octobre. J’ai l’honneur de vous prier de bien vouloir bien donner des ordres pour que l’envoi des arrêtés que je pourrai prendre ait lieu désormais avec plus d’exactitude et de célérité »

5 octobre 1851. Un coup de fusil a été tiré sur un agent de police à La Voulte.

6 octobre 1851. Arrestation par la brigade de Saint‑Agrève de Roche Théodore Ferdinand âgé de 30 ans, courtier de remplacement militaire, pour provocations et insultes envers la gendarmerie Il est mis à la disposition du général commandant l’état de siège du département.

7 octobre 1851. Nouvelles perquisitions chez Dutal perruquier à Serrières. Plusieurs livres et journaux ont été saisis.

Arrêté du général Faivre interdisant la vente et le colportage deLa Feuille du Village, les loisirs d’un proscrit, le peuple souverain, l’abolition de l’autorité, la République, le Semeur républicain, La solidarité, la constitution de la démocratie, Jésus le Montagnard, Le Nouveau Monde, la lumière des peuples, la propagande démocratique, aux Paysans de la France, La Réforme.

10 octobre 1851. Annonce de l’arrestation du 15ème prévenu dans l’affaire de Laurac.

13 octobre 1851. Arrêté du général Faivre : Les cafés de Métras Antoine et Benoît Victor à Aubenas sont fermés pendant 30 jours suite à des perquisitions faites et au cours desquelles des où des gravures prohibées ont été saisies : « le portrait de Dru-Rollin (sic) et de Raspail, un tableau représentant Pagnerre, Marrast, Arago, Marie, Lamartine, Granier Pagès (sic), Le Dru-rollin (sic).

13 octobre 1851. Détachement de la troupe de ligne envoyé sur l’ordre du commandant Luxer dans différentes communes du canton de Largentière pour surveiller la fermeture des lieux publics et dresser procès verbal contre les cabaretiers ne respectant pas les heures de fermeture.

14 octobre 1851. Arrestation de l’agent secret Vigier dans un cabaret à Thueyts pour propagande démagogique. En prison, il dévoile son identité au lieutenant de gendarmerie.

16 octobre 1851. Circulaire du Ministère de l’Intérieur Léon Faucher au sujet de tentatives de désordre et des attaques contre la force publique qui ont éclaté dans le département du Centre.

17 octobre 1851. Arrestation de Jean Auguste Froment « chef de société secrète », accusé contumace du complot de Lyon.

19 octobre 1851. Vers les 6h du soir, un coup de fusil a été tiré du chemin sur la caserne de gendarmerie « cinq plombs n°7 ont cassé un carreau ».

26 octobre 1851. Arrestation de Louis Larozière et Jean Bollon par la brigade de gendarmerie de Saint‑Agrève. Larosière pour défaut de passeport et absence de justification de sa présence dans la localité. Jean Bollon instituteur révoqué à Flaviac exerçant à Saint-Pierreville pour interdiction de séjour à Saint‑Agrève, « à cause des ses opinions dangereuses ».

27 octobre 1851. Crise ministérielle, Léon Faucher démissionne.

27 octobre 1851. À Largentière, 78 mûriers appartenant à un avoué et au 1er adjoint faisant depuis quinze jours fonction de maire ont été coupés dans leurs propriétés situées à Largentière.

28 octobre 1851. Arrestation de Brot dit Fayolle, inculpé de rébellion à main armée le 10 août à Laurac.

31 octobre 1851. Arrêté du général commandant l’état de siège dans l’Ardèche : « il est expressément interdit de se réunir sur la voie publique au dessus de 300 personnes pour assister à des cérémonies funèbres ».

1 er novembre 1851. 19 mûriers appartenant à Rouvière, notaire à Largentière, ont été coupés pendant la nuit.

4 novembre 1851. Le président de la Républiquefait devant l’Assemblée législative le « compte sommaire des faits importants qui se sont accomplis depuis son dernier message ». Dans son « résumé », il propose un projet de loi permettant l’abrogation de la loi électorale du 31 mai : « Le rétablissement du suffrage universel sur sa base principale donne une chance de plus d’obtenir la révision de la Constitution ».

9 novembre 1851. Affiche signée par le comité républicain socialiste de Largentière et placardée à Largentière au sujet du message du président de la République sur l’abrogation de la loi du 31 mai : « Plus de folies car nous avons besoin de toutes nos forces pour combattre. N’allons point grossir inutilement les phalanges déjà trop pleines des martyrs de la Liberté. Patience, encore quelques mois et 1852 verra tomber à la fois et Bonaparte et Bourbons, empereurs, rois et présidents pour voir briller de tout son éclat, de toutes ses vertus, de toute sa justice la loi de la République démocratique et sociale ».

13 novembre 1851. L’Assemblée rejette la proposition présidentielle d’abroger la loi électorale du 31 mai.

13 novembre 1851. Le sous-préfet de Tournon signale au préfet que « les mesures rigoureuses qu’amènent nécessairement l’état de siège causent des mécontentements dont la propagande anarchique cherche à tirer parti et que probablement des élections qui auraient lieu en ce moment s’en ressentiraient ».

17 novembre 1851. La Proposition des questeurs rappelant le droit du président de l’Assemblée nationale de requérir la force armée pour assurer la défense de la représentation nationale est rejetée par 403 voix contre 300.

19 novembre 1851. Le sous-préfet de Largentière signale au préfet que les mesures prises par le général commandant l’état de siège en Ardèche « sont jugés sévèrement même par des hommes d’ordre, il serait à regretter qu’on persistât à voir dans ces mesures le bras caché de l’administration ».

27 novembre 1851. L’agresseur présumé de l’agent de police de La Voulte est condamné à dix ans de travaux forcés pour tentative d’assassinat. Le général commandant de l’état de siège demande de faire « toute la publicité possible à ce jugement du conseil de guerre ».

Mardi 2 décembre 1851. Coup d’État

Nuit du jeudi 4 au vendredi 5 décembre. Les régions de Chomérac, Saint-Symphorien, Brune, Saint-Lager-Bressac, Saint-Vincent-de-Barrès s’insurgent. Des colonnes armées marchent vers la préfecture.

Samedi 6 décembre 1851. Arrêté du préfet et du général Faivre . « Tout individu pris les armes à la main ou construisant une barricade sera fusillé sur le champ ».

Dimanche 7 décembre 1851. Plusieurs mouvements insurrectionnels peuvent être identifiés :

Agitation à Saint-Laurent-du-Pape et départ en direction de Valence.

Prise d’armes au Teil et à Viviers pour marcher sur Privas.

Insurrection à Vallon avec occupation de la mairie. Rassemblements en armes à Lablachère et Joyeuse. Mobilisation à Aizac. Tous ces mouvements convergent en direction de la sous-préfecture de Largentière dans la nuit du 6 au 7 décembre.

Lundi 8 décembre 1851. Ultimes conciliabules pour prendre la ville de Valence.

Mardi 9 décembre. « L’ordre est rétabli ».

9 décembre 1851. Arrêté du préfet fermant le café Grégoire à Cruzançon, hameau de Saint-Lager-Bressac. 3K85 ; n°215.

20 et 21 décembre 1851. Plébiscite sur l’approbation du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte.

26 décembre 1851. Nomination de la Commission militaire en Ardèche.