Chapitre I. Un terrain à « boîte noire », propositions méthodologiques

Ce chapitre inaugure la première série de nos situations ethnographiques. Nous sommes devant l’enceinte monastique et nous nous apprêtons à franchir la clôture. Que voyons-nous dans cette première escale ? Une séparation, une mise à distance du monde. L’espace monastique se construit comme un lieu « à part », qu’il est parfois difficile de pénétrer. Dans ce chapitre, l’exercice ethnographique consiste à mettre en perspective les images produites par les acteurs autour des espaces séparés avec les possibilités méthodologiques dont nous disposons. Notre entrée sur le terrain va donc se faire en plusieurs temps. Nous donnerons dans un premier temps la parole aux acteurs pour qu’ils nous parlent de ce qui se passe derrière la clôture avant de la franchir nous-même pour nous retrouver « sur le terrain ». Le terrain dont il est question dans ce travail présente l’originalité de se définir localement en dehors de tout ancrage territorial : nous sommes dans un monastère athonite implanté… en France. Dans un tel contexte, la tradition à l’œuvre dans l’espace monastique prend un tout autre relief : son orthodoxie se heurte aux possibilités concrètes d’action hic et nunc. Se repose alors la question des relations avec le monde dont la tradition semble l’unique réponse… La prégnance de cette tradition, à même de justifier tous les actes observés dans la clôture monastique, constitue à la fois l’objet de notre recherche et la principale menace de notre travail ethnographique, reléguant systématiquement le sens de l’action sur un plan théologique. Le dernier temps de notre entrée sur le terrain tentera d’apporter les réponses méthodologiques à cette prégnance de la tradition.